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Congrès Mondial
Amazigh:
Maroc: la répression comme seule
réponse au désarroi
Depuis le séisme du 24 février 2004 qui a sévèrement frappé
la province d’Alhocema dans la région du Rif (nord du Maroc), des centaines de
familles, notamment dans les zones rurales, vivent à ce jour, dans le plus grand
dénuement, sous des tentes légères non adaptées à la rigueur des conditions
climatiques de la montagne, exposées aux intempéries et aux plus dures
conditions de vie. Pourtant l’aide humanitaire internationale a été massive et
les promesses gouvernementales n’ont pas manqué.
Cette situation d’extrême précarité qui perdure et le sentiment d’abandon qui en
a résulté, ont poussé les sinistrés à protester pacifiquement à maintes reprises
afin d’exiger des autorités locales et nationales une contribution publique
conséquente pour les aider à reconstruire leurs habitations, ce qui allégerait
leur calvaire. Mais leurs appels de détresse répétés n’ont trouvé aucun
véritable écho auprès des autorités marocaines.
C’est pour rappeler cette pénible réalité et pour interpeller les plus hauts
responsables gouvernementaux sur leurs responsabilités et leurs engagements non
tenus, que l’association des citoyens de Tamassint, créée pour défendre les
intérêts des sinistrés du séisme, a décidé d’une marche populaire prévue pour le
19 mai 2005, de la localité de Tamassint vers la wilaya d’Alhocema (40 km). Mais
dès l’annonce de la nouvelle, les forces de l’ordre ont procédé à l’arrestation
de trois responsables de cette association (Moatassim El Ghalbzouri, Salim
Ghallit et Mohamed Aberkan, âgé de 70 ans) qui seront jugés le 26 mai 2005 par
le tribunal de Nador. En même temps, d’importantes forces de police ont été
déployées, créant un climat de tension et de peur dans la région.
Devant l’arbitraire de cette incarcération et malgré les intimidations, les
citoyens de Tamassint ont maintenu leur initiative de marcher vers Alhocema le
19 mai pour réclamer leurs droits légitimes et exiger la libération de leurs
camarades. La marche a démarré avec plus de 10 000 manifestants et après une
dizaine de kilomètres, elle fut brutalement stoppée par d’imposantes forces de
sécurité qui se sont violemment attaquées aux manifestants, les frappant
sauvagement et les poursuivant jusque dans la montagne. Les forces au sol ont
été appuyées par des hélicoptères qui ont lancé des bombes lacrymogènes sur la
population. Une vingtaine de personnes ont été arrêtées et plusieurs dizaines
d’autres ont été blessées, dont des enfants.
Cette répression disproportionnée a rappelé aux populations locales la sinistre
période Hassanienne durant laquelle le Rif a connu une des périodes les plus
noires de son histoire, faite de crimes, de persécutions et de marginalisation
économique et sociale. C’est d’ailleurs ce qui a provoqué il y a quelques jours,
le rejet par la population rifaine de la mascarade organisée par l’Instance
Equité et Réconciliation (IER) qui consistait à auditionner et à indemniser
quelques victimes du régime de Hassan-II, feignant d’oublier que c’est toute la
région qui a subi l’exclusion, les violences et les privations pendant un demi
siècle.
Le Congrès Mondial Amazigh exprime toute sa sympathie et sa solidarité avec les
victimes de l’agression policière de Tamassint et appelle l’ensemble du
mouvement amazigh tant au Maroc qu’à l’échelle internationale à manifester d’une
manière ou d’une autre, son soutien actif aux populations rifaines meurtries.
Le CMA alerte également les ONG spécialisées dans la défense des droits humains
ainsi que les instances compétentes des Nations Unies, particulièrement les
organes de surveillance de l’application des conventions et traités
internationaux, concernant notamment la lutte contre les arrestations et les
détentions arbitraires et la protection des personnes contre la torture et
autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Aux côtés des populations et de l’ensemble du mouvement citoyen amazigh de la
région du Rif, le CMA exige:
•la libération immédiate et sans conditions de tous les détenus de Tamassint,
•la prise en charge par l'État des blessés de Tamassint,
•l’arrêt de toute forme de répression et d’intimidation,
•le jugement et la sanction exemplaire des gendarmes et policiers, auteurs et
responsables de l’agression contre les marcheurs pacifiques de Tamassint,
•la prise en charge totale des revendications légitimes des populations
sinistrées,
•la mise en œuvre d'un vaste plan de rattrapage économique de cette région
délaissée.
Paris, le 24 mai 2005
Le Bureau du CMA
Congrès Mondial Amazigh
BP 60 – 75861 Paris cedex 18
Web : www.congres-mondial-amazigh.org
Email : congres.mondial.amazigh@wanadoo.fr
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