| |
Idaouigmmad / taroudant:
Le Moussem International de l'Arganier,… de la poudre aux yeux.
Par: Bouzidi Lahcen
Moussem International d'arganier tenu à d'Idaouigmad,
dans sa quatrième épisode/ mascarade ressemble aux précédentes. Il s'est tenu le
samedi, dimanche et lundi,28, 29 et 30 Avril 2OO6. Les visiteurs sont venus de
la France, du Canada, de l'Angleterre, de l'Allemagne,… le premier jour s'est
passé dans les festivités officielles avec la visite / inauguration des
représentants des autorités locales. Puis, elles ont commencé les interventions
des chercheurs participants selon le dépliant distribué par les organisateurs et
dont seuls les étrangers en ont eu une copie. Les populations locales sont
présentes au moussem mais comme des spectateurs. Ils n'avaient pas compris de
quoi il s'agit; parce que aucun des organisateurs n'avait pris la peine de les
convoquer d'une manière officielle. Certes, les intervenants parlent d'huile
d'arganier comme matière recommandée par les grands centres cosmétiques du
monde.
Le dimanche matin, le même scénario de la veille recommence. Un des
organisateurs détient le micro. Seuls ses amis ont eu l'autorisation d'avoir la
parole. Le micro passe de main en main. Des membres de la société civile qui s'y
sont déplacés attendent leur tour. Ils se posent des questions auxquelles ils ne
trouvent pas de réponses. Mais ils n'ont même pas le droit de parler. A treize
heures, ils attendrent encore leur tour. Quelques membres des associations
locales ont lâché prise, tandis que d'autres insistent. Ils veulent exprimer
leurs points de vue. Une pure fassie, membre du comité organisateur grogne. Elle
se lève à chaque fois pour souffler quelque mot dans l'oreille d'un de ses
collaborateurs. Elle ne voulait pas que les "autochtones" prennent la parole.
- Mazal gaa ma kmmelna nnas lli jaw men lbladat;…dit-elle en levant la main pour
protester et pour parler à celui qui distribue la parole, un meknasi.
Bien qu'il soit du même avis qu'elle, il accepte enfin d'ajouter des noms
nouveaux sur la liste des intervenants. Cependant, il parie de sa part sur le
temps. Les quelques membres de la société civile restant s'impatientent. Cette
fois-ci, ils auront la parole. Tout le monde a faim; mais ceux-ci veulent
exprimer Leur mécontentement.
Il est quatorze heures ou presque, le détenteur du micro ne sait plus quoi
faire. Il décide d'ouvrir la liste des questions, une manière de lui de déjouer
la demande insistante des locaux… Il cède enfin le micro. Ils sont quatre et on
leur donne trois minutes chacun; pas plus. La raison est connue.
Ces derniers ont exprimé leur inquiétude compte au manque de clarté et de
communication entre les populations locales et l'association Aman organisatrice
du moussem. En effet, cette association qui a été créée on ne sait même quand,
dont les membres sont des Rbatis et des fassis, dont on ne connaît même pas les
principes et les objectifs,… Les locaux savent une chose: L'arganier qui leur
appartient depuis l'aube du temps est menacé. Des richissimes au niveau national
se frottent les mains. La preuve par mille, les terres communales du Maader/
Tafingoult (et qui se trouvent non loin du lieu du moussem) subissent le même
sort. C'est une question de temps simplement.
Les gens des douars d'Idaouigmmad sont là, debout dans un soleil aride de midi,
tandis que les organisateurs sont assis sur les chaises. Ils sont là bien qu'ils
ne soient pas convoqués. Car l'association Aman organisatrice n'avait même pas
pris la peine de les informer. Quand les jambes ne les soutiennent plus, ils
vont faire un tour du côté de quelques stands aléatoires faits la veille de
l'inauguration.
L'après-midi, à seize heures, une troupes d'ismgane ( troupe de musique locale)
est là pour divertir, puis une autre qui jouait jusqu'à une heure tardive de la
soirée. Les gens, puisqu'ils ne comprennent rien aux débats qui se déroulaient
sous la tente quaïdale, accourent vers la troupe de musique (ismgan). Ainsi, les
organisateurs auront-ils la paix. Quelques membres d'associations locales se
sont donnés rendez-vous sur des chaises laissées sous une autre tente. Ils
discutaient de la rédaction d'un communiqué de presse. Ils dénoncent ce mutisme
pratiqué par l'association Aman, dont le président est détenteur d'une société
spécialisée dans la production de l'huile d'arganier. De là les criantes d'un
plan dissimulé, qui va à l'encontre des intérêts des populations locales.
Le lundi, lorsque les invités et les gens des douars avoisinants sont entrés
chez eux, les membres de l'association Aman sont eux restés sur place. Réunion à
huit clos. Aucun ne connaît mot du rapport final, du but même de la réunion.
En guise de conclusion, le mot "oil" est le mot qui résonne encore dans nos
têtes de tout ce qui a été dit. C'est un mot anglais qui signifie "huile", en
l'occurrence l'huile d'arganier. Mais il peut bien s'agir d'autre signification.
"Oil" signifie aussi "pétrole". Cette dernière signification est à retenir;
surtout quand on sait que malgré la flambée du prix du pétrole, un baril d'huile
d'arganier coûte dix fois plus chère que celui du pétrole. Ils ne se sont pas
trompés. Ils ont déjà trouvé une issue dans l'exploitation des terres
communales, de la nappe phréatique,… Le tour est celui de l'arganier; l'or
liquide. Cependant, tout cela se fait au dépend des intérêts des populations
locales –les Imazighens- qui considèrent l'arganier comme "l'arbre de survie".
Car sans lui, tout le monde immigrera vers les bidonvilles. Tandis que les
terres de la plaine de Souss seront désertiques.
C'est pour quand le vrai développement, celui qui tient en compte les intérêts
des population locales, qui respecte leur dignité; et surtout qui prend l'Homme
amazigh, sa culture et sa langue comme le point central des programmes de
développement local et national. Tout le monde sait que c'est grâce aux
Imazighens et leur culture – millénaire- qu'on a pu avoir cet arbre aujourd'hui.
Cet arbre est une fierté pour le Maroc, une valeur ajoutée au patrimoine humain.
Tout notre avenir dépend de lui.
(Bouzidi Lahcen, Taroudant, Tafing44@yahoo.fr)
|