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La monarchie dans les régimes politiques européen
et marocain
Par: Ben Hemmou Hassan –militant du MEA
Pourquoi travailler
sur ce sujet? pourquoi le mouvement estudiantin amazigh (MEA), force politique
nationale et nationaliste très active au sein du mouvement amazigh marocain,
dérange et interpelle toutes les composantes de la société civile marocaine pour
penser au devenir du Maroc? On ne peut pas répondre à ces questions d’une
manière hâtive, sans nous arrêter sur un ensemble de faits politiques qui ont
marqué la vie politique marocaine depuis la disparition de l’ex roi et
l’intronisation d’un autre; cet événement politique a été largement salué par la
classe politique marocaine qui a cru que le changement est amorcé et que la
rupture est enfin réalisée. Or, toutes ces notions de changement, rupture, jeune
roi, démocratie, pluralisme, réforme, modernité, nouveau concept d’autorité… ne
sont que des notions vidées de leur essence et destinées à la consommation
interne et externe; car depuis juillet 1999 jusqu’à nos jours, la structure du
makhzen traditionnel ne fait que perdurer, voire se renforcer dans le cadre d’un
new makhzen plus autoritaire et plus absolutiste. Cette réalité inéluctable qui
façonne le champ politique marocain est une évidence que semble camoufler un
discours officiel et partisan qui vantent et exaltent les grands exploits
superflus d’un régime monocratique au sein duquel la situation politique,
économique et socioculturelle du Maroc et du peuple marocain, ne fait que se
dégrader d’une manière intense dans un pays classé 126e sur le plan du
développement des pays du monde, par les organes de l’ONU, juste derrière le
Tchad. Dans ce misérable pays, seul le makhzen, structure sociopolitique
traditionnel composée de la famille royale et de toutes les familles makhzen qui
y sont liées par des relations de mariage, d’intérêt économique, d’autorité,
bénéficie des richesses du pays.
C’est cette réalité amère d’un pays sous développé, très arriéré sur tous les
plans (droits de l’homme, démocratie, liberté, infrastructures… ) où 2/ 3 du
territoire national est marginalisé: le Rif avec ses séismes multiples et sa
population condamnée à vivre dans l’indigence totale sans routes, autoroutes,
ports, aéroports, chemin de fer, hôpitaux, écoles, universités, usines, avec une
identité amazighe bafouée et non reconnue… l’oriental oublié, le Sud exploité et
privé… que semble ignorer les farauds démocrates et militants arabophones qui ne
cessent de parler de réformes superficielles sans toucher à la véritable nature
archaïque, absolue et monocratique d’un régime politique patriarcal obsolète.
Or, le mouvement amazigh, force nationale et nationaliste à caractère
révolutionnaire, qui a émergé au cours du 20e siècle, en tant que courant
politique, philosophique et culturel, qui exprime un nouveau discours dans le
champ de la pensée politique marocaine et maghrébine, est un courant qui dérange
car la pensée lumineuse dont il est le porteur, le met au banc des accusés: il
s’agit, pour le makhzen et pour les petits panarabes marocains, d’une force
raciste, séparatiste, anti-arabe, anti-islam… Ces accusations gratuites
expriment la faiblesse et l’incapacité des anti-amazigh à faire face (et à
accepter) à la nouvelle pensée nationaliste amazighe qui tend à remettre en
cause tout un système politique et idéologique pourri et corrompu; ce refus
pathologique de tout ce qui est amazigh n’est que le reflet du complexe
d’infériorité duquel souffre une classe de petits farauds intellects face à la
force et à la ténacité d’un discours national et nationaliste qui fait fi des
pseudo tabous ritualisés d’un régime politique anachronique.
Travailler sur ce sujet s’inscrit donc dans le cadre de cette exposition
continue de la nouvelle pensée amazighe tenue par le MEA; pour cette mouvance
politique, le Maroc d’aujourd’hui ne peut plus, et ne doit plus, vivre encore
dans le cadre d’un régime monocratique, autocratique, un régime autoritaire
absolu; les marocains, et surtout toutes les forces vives de la nation, doivent
y penser, d’où l’intérêt que suscite ce sujet dans le cadre d’une étude
comparative entre les régimes en question.
La place de la monarchie dans les systèmes politiques européens
Comment l’Europe a-t-elle changé ses monarchies? Il s’agit d’un processus
historique qui date depuis la révolution anglaise de 1688 et française de 1789;
ces deux révolutions libérales et bourgeoises ont joué un rôle de premier plan
dans les multiples changements politiques qu’à connus l’Europe depuis cette
époque; et ce dans la mesure où elles ont influencé le destin politique du reste
des pays européens; ceux-ci ont tous évolué soit vers des républiques
démocratiques mettant fin à l’absolutisme monarchique, soit vers des monarchies
constitutionnelles symboliques où le roi n’est q’un symbole plus q’un dirigeant
politique; c’est le cas des régimes monarchiques espagnol, anglais, suédois,
danois, belge… où la monarchie est cantonnée dans un rôle politique minoré,
alors que le pouvoir politique et exécutif est tenu par le premier ministre et
par son cabinet ministériel; c’est le cas aussi des républiques allemande,
italienne et portugaise… Dans ces régimes pluralistes où sont organisées des
élections libres et hautement supervisées, chaque parti politique qui parvient à
gagner le plus grand nombre de sièges au parlement, constitue un gouvernement
national dirigé par le chef du parti gagnant, et ce, tout les quatre ou cinq
années que dure la législature; c’est le cas aujourd’hui du premier ministre
espagnol Juan Rodregez Zapatero, et du premier ministre britannique Tony Blear.
Dans ces deux modèles européens, le monarque règne sans gouverner, ce qui permet
aux différents acteurs politiques d’animer une vie politique pluraliste et
démocratique; une vie où le pluralisme et la démocratie ne sont pas de simples
mots à consommer; il s’agit de régimes où les populations ont pu atteindre un
haut niveau de culture et de conscience politique à tel point qu’aujourd’hui
sont envisagés des referendums pour supprimer les monarchies une fois pour toute
de toute l’Europe; ce haut degré de culture politique fait que les pays
européens sont parvenus à un stade de démocratie où la volonté populaire est
capable d’abroger tel ou tel régime.
Ce statut minoré réservé à la monarchie dans les pays européens, est accompagné
d’une dépossession des monarques de toutes leurs richesses qui sont converties
en biens publics, comme il s’est accompagné d’un engagement solennel de tous les
monarques européens à respecter les règles du jeu de la démocratie libérale qui
consacre la souveraineté du peuple; dans ces conditions, la place et le rôle de
la monarchie dans les régimes politiques européens sont fortement limités à tel
point qu’il est difficile de connaître que tel ou tel pays est une monarchie; le
rôle de celle ci s’est fortement éclipsé et se sont les premiers ministres et
leurs gouvernements, élus tout les quatre ans, qui assurent et exercent la
totalité du pouvoir politique et exécutif; ces démocraties modèles sont
l’exemple à imiter pour les pays sous développés comme le Maroc où la monarchie
est l’État, l’État est la monarchie; d’où le deuxième volet de cet article.
La place et le rôle de la monarchie dans le système politique marocain
Comment l’absolutisme s’est accaparé du Maroc? Il s’agit d’un système de
gouvernement étrange au pays amazigh, et ce dans la mesure où ces derniers ont
vécu avant l’islam avec l’institution d’Agellid (Ajedjid) dans tout le pays
amazigh avec igeldan: Hierbas, Izalkas, Micipsa, Massinissa, Jugurtha, Aderbal,
Boukus, Yuba, Ptolémée… et après l’islam avec des empereurs tel Yusef Ben
Tachfin, Ben Toumert El Mehdi, Abdelmoumen Ben Ali, Al Mansour Ddahbi… mais sans
qu’Agellid soit un despote qui maîtrise le pays et le peuple du Nord au Sud, de
l’Est à l’Ouest avec une main de fer; imazighen ont vécu avec l’institution d’Agellid
dans le cadre d’un système fédéral où chaque groupement social est organisé sous
forme de fédération tribale autonome et maître de son territoire et de la
gestion de ses affaires politiques, économiques, socioculturelles et
religieuses; cette réalité historique a dominé toute l’histoire de tamazgha,
avec toujours des rapports de force entre le centre (la capitale du monarque) et
le reste des fédérations tribales; celles-ci contrôlaient au Maroc ante colonial
2/3 du territoire national alors que le makhzen du 19e siècle ne contrôlait qu’
1/3 de ce territoire.
Cependant, depuis l’arrivée de la puissance coloniale française au Maroc,
puissance introduite par le makhzen lui même pour le protéger contre imazighen,
depuis cette date a commencé une ère nouvelle dans l’histoire politique du
Maroc; il s’agit d’une déclaration de guerre totale contre imazighen dans le
Rif, le Moyen Atlas, le Haut Atlas, l’Anti Atlas, l’Oriental, le Sahara… il
s’agissait d’un génocide perpétré contre imazighen qui ont dû affronter deux
puissances coloniales (la France et l’Espagne) pendant 60 ans de guerre sans
merci (depuis 1900 date des guerres de Touat, Tindouf avec les tribus Zénètes
jusqu’à 1960 date de l’étouffement total de l’ALN sud et nord (armée de
libération nationale) par les forces espagnoles, françaises, américaines et
makhzaniènnes; c’est donc depuis ces mémorables dates noires dans l’histoire d’imazighen
que la France a créé l’État perçu dans le sens d’appareil doté de la puissance
et de la force (armée, police, services de renseignement). C’est cet État créé
par la France qui est offert à la monarchie au Maroc d’après indépendance. Par
quoi se caractérise ce régime monarchique?
Les traits caractéristiques de la monarchie marocaine.
Ils sont multiples et divers mais on peut les grouper dans deux catégories: la
première catégorie est liée à l’aspect féodal du régime politique marocain;
cette catégorie englobe les caractères suivant: c’est un régime monocratique,
autocratique et théocratique, un régime qui repose sur une légitimation divine
du pouvoir du monarque qui est le commandeur des croyants; c’est le modèle de
gouvernement arabe omayyade importé de l’orient pour qu’il soit implanté dans le
pays des hommes libres et nobles «Imazighen» qui refusent de se soumettre à la
nouvelle tyrannie omayyade; le reste du petit peuple n’est que des sujets
considérés comme un petit peuple mineur sous tutelle du seigneur. La
constitution marocaine affirme dans l’un de ses articles que «la personne du roi
est sacrée et inviolable». Il y a donc une sacralisation du roi élevé au statut
d’une petite divinité pour laquelle le petit peuple doit allégeance et
prosternation. D’ailleurs l’article 19 de la constitution marocaine actuelle ne
fait que consacrer et renforcer cet aspect absolutiste de la monarchie
marocaine; alors que la seconde catégorie de traits est liée à l’aspect
autoritaire de ce régime; cette catégorie concerne le caractère patrimonial et
patriarcal du régime monarchique marocain où le roi est considéré comme le père
de la nation; dans ce régime patriarcal qui fonctionne sur la base des relations
clientélistes, l’administration makhzaniènne est avant tout une force de
contrôle et de répression, un appareil composé essentiellement des serviteurs du
palais.
Il s’agit d’un régime autoritaire qui n’a rien à voir avec la démocratie des
régimes politiques monarchiques européens; le comparer avec ces régimes relève
de l’impossible; car le caractère superficiel et formel des institutions ne
fait que dissimuler l’aspect féodal et patriarcal d’un régime archaïque. Il faut
donc penser à la mise en place d’une constitution démocratique élaborée par une
assemblée nationale constituante pour établir une monarchie symbolique à l’image
de la monarchie espagnole, britannique, suédoise, belge, danoise.
Le mouvement amazigh, en tant que force politique, nationale et nationaliste
combattue par le pouvoir, les islamistes et les gauchistes panarabes,
prône pour:
-une monarchie à l’espagnole (le palais marocain absorbe 227 milliards de
centimes annuellement de toutes les richesses du Maroc, 19 fois ce qu’absorbe le
palais espagnol);
-le fédéralisme comme mode d’organisation politique et administratif du pays.
Le mouvement amazigh affirme sa détermination à oeuvrer pour le bien du Maroc,
d’un Maroc uni, fort et capable de faire face aux défis internes et externe. Un
Maroc amazigh libéré, et du joug de l’autoritarisme, et de l’idéologie fasciste
et raciste que constitue le panarabisme qui a mystifié l’identité amazighe de
notre peuple voulu par les instigateurs de l’arabisme et de l’arabêtisation
qu’il soit arabe par la force.
(Ben Hemmou Hassan –militant du MEA, Octobre 2004)
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