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NE REVEILLEZ PAS UN MAKHZEN QUI DORT!

Par: Mohend Amrabed

Il est environ 2h30 ce matin du 24.02.2004 quand cette maudite secousse de 20 secondes provoque le désastre à Imzouren, Ait Kamara et les environs. Les plus chanceux ont très peur, ils sont choqués, puis commencent à chercher leurs proches.

Quant à nos dirigeants, ils dorment paisiblement à Rabat et leurs commis n’oseront pas les réveiller. A la radio et à la télévision, les chansons et les programmes habituels sont diffusés pendant que les autres chaînes internationales parlent du tremblement de terre et de la désolation à Al Hoceima.

Tout de même à 8h15, l’information est dite en troisième position dans le radio-journal amazigh, et brièvement «un tremblement de terre à Al Hoceima a fait 20 morts, que Dieu ait leurs âmes». La radio ne pipe mot des secours, des survivants, des répliques, ni d’un déclenchement de plan catastrophe. Puis des chansons et programmes habituels. Vers 11 heures, la radio change de ton, elle parle de catastrophe; là les responsables sont réveillés, ils sont sûrement en train de prendre leur petit déjeuner en écoutant les télés et radios étrangères.

Au Maroc, aucune catastrophe n’est possible, tant qu’elle n’a pas été décrite officiellement et les officiels bien sûr, décrètent au réveil mais avant la sieste. Ainsi va le makhzen depuis la nuit des temps. Après la sieste, le makhzen se rend compte qu’il faut envoyer des secours. Les secours nationaux arrivent après les secours internationaux. Ces derniers sont bloqués. Le makhzen fait la sieste et la sieste, c’est sacré dans ce pays bien heureux. Après tout, les sinistrés sont des rifains, des contrebandiers et des trafiquants de drogue et des ennemis de la nation, qui veulent leur indépendance des arabes colonisateurs! (cf. l’éditorial de l’économiste du 27 avril). C’est donc un châtiment divin.

Soyons réalistes et revenons sur les lieux des morts, des blessés, des enfants orphelins. Après le choc, les survivants commencent à secourir les blessés, femmes et enfants. Les populations de villages entiers anéantis et isolés implorent Dieu de leur venir en aide. Le makhzen très loin du lieu du sinistre est entre le sommeil profond et le coma. Pourvu qu’il ne se réveille pas trop tard. Heureusement Al Hoceima a beaucoup de frères et sœurs à Nador, à Melilla, dans tout le Maroc et dans toute l’Europe. La mobilisation des imazighen fut exceptionnelle et sans précédent. L’axe Melilla - Nador - Al Hoceima a fonctionné à merveille. Avec l’aide des amis Européens on aurait même pu s’offrir le luxe de refuser l’aide makhzénienne, histoire de laisser le makhzen terminer sa longue sieste infinie. De toute façon, toutes les aides sont les bien venues, même quand elles arrivent après la sieste.

Les professionnels de la santé ont fait un travail remarquable. La coordination entre les services était nulle. Des secouristes étrangers sont repartis chez eux sans qu’on leur eut donné l’occasion de faire leur travail. Pour quelles raisons? Seul le makhzen le sait! Mais peut-être a-t-on voulu cacher au monde la marginalisation du Rif, l’absence d’infrastructure, d’urbanisation ou l’état des routes.

L’avenir nous le dira peut-être. Huit jours après la catastrophe, pensons à l’avenir et faisons le bilan.

La société civile était à la hauteur, la solidarité des marocains a bien marché. Il faut consolider cet acquis, l’union des imazighen fera la force de tamazight, notre culture, nos racines sur lesquelles nous bâtirons notre avenir avec nos propres mains. Nous connaissons mieux notre terre que nos aïeux qui l’ont payée de leurs vies. le Rif doit avoir place dans un Maroc pluriel, tolérant et regardant vers l’avenir. Moins d’arabisme, moins d’islamisme et moins de makhzénisme et beaucoup plus d’initiatives locales pour rendre heureux les braves rifains.

A bon entendeur, salut.

 

 

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