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Le miroir de Melilla face au tremblement de terre Par: Azelmati Qeddur Le drame vécu par les habitants d’Al Hoceima et sa région s’est répercuté de façons diverses selon les appartenances culturelles et ethniques des populations, tel un miroir ne reflétant pas toujours l’image que l’on veut bien se donner. Durant ces jours difficiles pour toute une région sinistrée, il est une ville où l’image rendue du miroir s’est déformée; une ville quasiment scindée en deux parties distinctes selon justement ses appartenances ethniques et par ricochet ses points de vues, Melilla l’espagnole pour certains, l’amazighe pour d’autres. Réagissant rapidement et avec ses capacités, Melilla l’espagnole envoya d’urgence une équipe de pompiers sur les lieux du drame. Arrivés à Al Hoceima, ces pompiers n’ont pu être efficaces qu’après vingt quatre heures d’attente et d’inaction tant la désorganisation des autorités marocaines locales fut grande. Ils ont d’ailleurs failli repartir sans rien faire. Cette image de marque s’est transmise presque plus rapidement que les secours, malheureusement si vite, que Melilla l’espagnole s’entendait dire: «et ils veulent organiser le mondial 2010!». Le matin du drame, la télévision marocaine diffusait ses programmes habituels et routiniers, sans flash d’information particulier sur la catastrophe. Lorsque les premières images télévisées du drame nous sont parvenues, elles non plus, n’ont pas été en faveur du Maroc. Certes, les images télévisées véhiculent tout l’émotionnel d’une situation catastrophique, mais la désorganisation et la nonchalance des autorités marocaines locales attendant visiblement les ordres, sans aider ce malheureux outillé d’un simple marteau frappant une dalle de béton effondrée, ont fait le tour du monde et pas seulement de Melilla. La conclusion de l’œil observateur de Melilla est sans appel. Les autorités marocaines ont voulu cacher et taire au reste du monde extérieur l’état de si grande pauvreté et d’isolement dans lequel vivent depuis très longtemps ses populations rurales rifaines, à l’ère du troisième millénaire. En connaissance de cause, la lueur d’espoir est apparue avec Melilla l’amazighe. Tout de suite elle s’est organisée et mobilisée. Des convois entiers se sont relayés, chargés de produits de première nécessité, de nourritures et de couvertures. Les critiques comportementales de l’état marocain, elle connaît déjà. Elle le sait tellement bien, que les aides apportées n’ont pas été conduites sur le tarmac de l’aéroport d’Al Hoceima, mais amenées directement aux habitants des zones les plus reculées et abandonnées. Données de mains à mains pour être certains qu’elles arrivent à bon port. Sur place, il est observé des gamins arpentant le bord des routes faisant des signes, non pas de salut, mais de quoi manger, et d’autres plus édifiants, ici tout a été volé. Devant telle scène le nez picote, la rage intérieure gronde sournoisement et les larmes bordent les yeux sans qu’on le désire. Ces gestes vus par les ‘‘deux’’ Melilla qui ont fait le voyage poussent le raisonnement encore plus loin. L’efficacité de l’aide internationale arrivée si rapidement sur place, a forcé les autorités marocaines à se mobiliser bon gré mal gré mais après quarante huit précieuses heures ‘‘de perdues’’. La lenteur de la mobilisation des secours marocains au détriment des vies humaines a été vécue de concert dans les ‘‘deux’’ Melilla faisant ressurgir les vieux démons du passé de la colonisation et de la guerre du Rif encore présente dans chacun des esprits. Toute la psychologie, d’une population rifaine fragilisée et blessée dans sa chair, se révèle maintenant nécessaire pour faire face à l’avenir. Un avenir où, non seulement les ‘‘deux’’ Melilla, mais aussi le reste du monde observe et scrute attentivement, d’une part les moyens d’actions réels que devraient mettre en place les autorités marocaines afin d’éviter à ces drames d’incompétences et d’inactions initiales de se reproduire, d’autre part quelles mesures environnementales et architecturales devraient être décidées pour le bien être et la sécurité de toute une population tributaire des conditions naturelles connues de tous. Ce n’est seulement qu’après ces réalisations effectives où le miroir sera en mesure de refléter sa propre image.
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