| |
De la politique de la
langue a la constitutionnalisation de tamazight
(2ème partie)
Par: Hassan Banhakeia (Université
d'Oujda)
V.- LE TAMAZIGHT EST UNE QUESTION INELUCTABLEMENT
DEMOCRATIQUE
Comment, en effet, la constitutionnalisation du tamazight va-t-elle démocratiser
les régimes et les rendre plus justes? Si nous approchons l’enseignement, les
mass média et les institutions, la légalisation du propre qui permet de vivre en
harmonie avec soi et l’Histoire, est absente –pour ne pas dire effacée. La
démocratie, on le sait bien, dérive de l’authenticité, et ce trait n’est présent
et palpable que dans l’amazighité. Un processus démocratique sous-tend donc une
réconciliation identitaire du Maghreb avec sa langue. Peut-il le tamazight
assurer le passage à une société moderne et démocratique? Ainsi, gérer
positivement le pluralisme linguistique est un des traits essentiels de toute
démocratie (sur ce point tant de démocraties (sociales, politiques, économiques)
ne satisfont pas les ambitions d’un groupe ethnique. Bien que la langue soit
inséparable de la pensée; elle en est l’expression ou le moyen d’existence.
Derrière toute langue, il n’y a pas qu’un système d’idées et de contenus (pour
ne pas dire «idéologie»), mais des traces de l’histoire.
C’est pourquoi, il est nécessaire de changer les politiques linguistiques du
Maghreb (qui sont, au fond, une seule régie par la haine du propre) pour les
concilier avec la démocratie. En tant qu’ensemble d’idées, de projets,
d’objectifs et de visions, la politique, elle seule, peut réorganiser ce chaos
pour en faire une situation saine. Et l’IRCAM et le HCA, ces institutions
politiques censées défendre les droits et les intérêts de l’amazighité au
Maghreb, ne peuvent rien faire car elles n’ont pas de politique (idées, projets,
objectifs, visions) et ne s’investissent d’aucun réel rôle politique.
1. Question de résistance démocratique…
Cette communication aurait pu prendre un autre titre, plus convenable : « Le
Tamazight au Maghreb ou le Maghreb face à la Démocratie à venir » ou un
troisième titre plus vague : « Les langues du Maghreb et l’avenir politique»
pour dire que le tamazight est un héritage minorisé, doté d’un capital
symbolique « poco recomendable ». Une question serait inévitable et
omniprésente : Comment s’est déroulée l’arabisation de l’Afrique du nord ? Cette
question dérange car elle conduit à opposer la fiction au réel, les « futuhat »
aux guerres d’extermination. En gardant les souvenances de ces guerres
pacifiques, les Etats du Maghreb procèdent, pour incongru que cela paraisse, par
la contrainte afin d’imposer l’arabe. Ici, notre intérêt partiel pour des
aspects politiques est telle que nous ne voulons pas nous aventurer dans une
tâche complexe. En fait, notre désarroi devant l’héritage politique du Maghreb,
fait à partir de tant de moments de confusion, explique notre aversion à ce
genre de questions. Et des concepts comme la politique d’assimilation (17) et la
politique de non-intervention (18) d’une part, et la langue nationale et la
langue officielle de l’autre, vont être débattus et revus dans cette
communication, essayant d’y apporter une explication autant idéologique
qu’objective.
Une conception démocratique de la langue est nécessaire à poser dans la
politique maghrébine, si politique il y a, visant à instaurer la cohésion
sociale. La démocratie linguistique se trouve comme un concept détesté, rejeté
dans l’oubli et l’effacement. Elle est le Mal. Qu’est-il du consensus
linguistique si démocratie est à venir selon les promesses et les projets
nourris par ces nouveaux Etats ? Et une impression surgit au fin fond de nous :
Que dire de ceux qui prétendent mélanger le « légal » et le légitime, serait
comme faire de l’artificiel un élément naturel ? Face à ces arabistes qui
réfléchissent « par rumeur » en criant : nous sommes arabes, nous avons l’arabe
langue officielle et nationale, que faire d’autre chose ? Le mouvement amazigh,
timide et assumant une infériorité tant intériorisée, n’utilise pas les rumeurs
à sa cause, et s’accroche à la rationalité et à la scientificité de ses droits
et à leur solide légitimité. Peut-être attend-il aussi la pitié, tant espérée,
des autres.
Par ailleurs, cet article arrive à un moment où tant de remous sonnent à propos
du statut à venir pour le tamazight qui va entrer dans la Constitution « à
venir » (celle qui instaurerait enfin la démocratie pluraliste) : le tamazight
serait-il langue officielle et / ou langue nationale ? Quelle définition faut-il
apporter à chacune des langues qui existent dans l’environnement maghrébin ? De
quelle nature sont les discours qui traitent de la réalité plurilinguistique ?
Qu’est-il des législations linguistiques ? Toutes ces questions sont illégitimes
dans le fond : l’amazighe est la langue originelle, et toutes les autres langues
ne sont qu’étrangères, donc secondaires. Plus précisément, à cause de la langue
étrangère (s’amalgamant avec l’Occupation qui l’impose par la force), l’Afrique
du nord n’a jamais pensé à son être, elle a toujours vécu dans l’aliénation et
dans l’acculturation, tendant à se trouver une place dans le corps de
l’Occupation. Chez les modérés, l’on forge alors le concept de « démocratie
pluraliste » réitéré dans les textes fondateurs des Institutions des pays, un
pluralisme confondant. Avoir une société équitablement plurilingue n’est pas de
l’utopique, mais une réalité d’un Etat essentiellement démocratique, et même sur
le plan économique cela n’est pas aussi coûteux que ça. Quand il est question du
tamazight, il n’est plus question de pluralité, ni de démocratie, il est plutôt
objet d’autre chose de haï, effacé…. Là, la pluralité signifie division,
dissidence et « siba ».
En définitive, en tant que totalité première et unique, la question amazighe est
une lutte pour la démocratie, une lutte pour l’authenticité, et enfin une
réconciliation avec soi, avec le propre.
2. Question des droits linguistiques…
Sans une forte conscience identitaire, il est inconcevable de poser le problème
de la langue dans son rapport à la lutte démocratique. Les droits linguistiques
et la modernisation (démocratisation) de l’Etat vont de pair. Par exemple, au
Mexique, ce sont bien la « Ley General de Derechos Linguisticos de los Pueblos
Indios » en 2003 ou les Programmes de normalisation linguistique en Espagne
1982-1986 qui puissent mettre ces deux nations sur la voie de la démocratie. Ce
pas courageux des Mexicains peut expliquer amplement l’évolution
socio-économique du pays…
La première revendication du réseau associatif dans tout le Maghreb est la
défense et la promotion de l’amazighe. Est-ce juste la langue ? Le Printemps
berbère (1980) est cité avant tout comme une confrontation linguistique au sein
des institutions algériennes. S’ensuit la grève du cartable durant 8 mois qui
est une déclaration ouverte de conflit linguistique (aménagement linguistique).
D’avril à septembre 2001, le mouvement kabyle résiste à la « hogra »
(humiliation) totalitaire des arabistes au pouvoir, et la dimension linguistique
est aussi là … Tous ces événements quêtent une possible démocratie pluraliste.
Simultanément, au Maroc, en 1980, on vote au Parlement la création d’un
« Institut d’Etudes Berbères ». Cette loi ne sera jamais réalisée. Et en 1982,
une première lutte pour la langue amazighe, et en conséquence il y a arrestation
et incarcération d’universitaires et de cadres marocains. Ali S. Azayku, le
coupable, est incarcéré pendant une année. La demande était le statut de langue
pour le tamazight. Le cinq août 1991, à propos de l’état de la langue et de la
culture amazighes, nous lisons dans le premier point : « Les textes portant
création et organisation de l’Institut National d’études et de recherches
consacrés à la langue et à la culture amazighes sont restés lettre morte, les
instances législative et exécutive n’ayant pas fait leur devoir en vue de
traduire ces textes dans la réalité. » (19) Voilà, l’IRCAM et le HCA
seraient-ils des réponses satisfaisantes ? Dans la partie des perspectives de
l’action culturelle amazighe, il est dit : « il devient crucial de procéder à la
promotion et au développement de la langue et la culture amazighes. (…) Cette
mission est une contribution à l’élaboration d’une politique linguistique et
culturelle démocratique fondée sur la reconnaissance et le respect des droits
linguistiques et culturelles légitimes de l’ensemble des composantes du peuple
marocain. Cette politique d’ouverture peut-être considérée comme une prémisse
dans la perspective de l’édification de la culture nationale démocratique. »
(20) Cette revendication se veut une perspective démocratique, comment la
réaliser ? En 1994, lors des manifestations du 1er mai, la demande de
l’enseignement du tamazight est affichée sur les pancartes, cela mène à
l’incarcération et à la persécution de plusieurs militants à Goulmima. Une telle
répression dit beaucoup…
Le « Manifeste amazigh », paru en mars 2000, essaye d’élargir les revendications
et les perspectives démocratiques, mais dans un ton où s’entremêlent le
désespoir et la révolte : « Indépendant est maintenant notre pays. Passent
quelques années à peine de l’Ere de la Liberté. Déjà, les Imazighen perçoivent,
avec étonnement et amertume, les premiers signes d’une marginalisation dont ils
savent qu’ils seront les principales victimes. » (21) La marginalisation du
tamazight s’explique par l’acte politique, et c’est par cet acte que sa
résurrection est possible. Aussi, pouvons-nous dire que la démocratie est un
acte politique, et c’est précisément par la politique que les langues se
démocratisent… Une reconnaissance implicite ou imparfaite au Maghreb amazigh par
les officiels peut être lue comme l’expression d’une mauvaise foi, il est
d’opter pour une reconnaissance « explicite et claire ».
Nous citons, parmi les autres revendications, la deuxième : « Le temps est venu
pour que notre langue nationale originelle, le berbère, soit reconnue langue
officielle de par la loi suprême du pays. Singulière situation que celle de la
tamazighte : en son berceau même elle n’a pas de statut de langage ! Ses
contempteurs ont beau jeu de ce fait pour faire mourir de dépit le berbérophone
en lui signifiant à tout bout de champ, avec ironie et arrogance, que la seule
langue ayant droit à l’existence dans ce pays est l’arabe ; c’est la
Constitution qui en a ainsi décidé ! « Opprimé donc je suis, et au nom de la loi
des lois ! », voilà le ressentiment que ne cesse de ruminer tout Amazigh dont
l’esprit n’est pas accaparé par les soucis de la vie au quotidien. L’un des
penseurs de la Philosophie des Lumières n’a-t-il pas écrit qu’il « il n’y a pas
de plus cruelle tyrannie que celle que l’on exerce à l’ombre des lois et avec
les couleurs de la justice » ? » (22) Le tamazight qui est dit « langue
nationale originelle », opte pour avoir le statut de langue « officielle » bien
que la loi lui prépare la marge et l’effacement par des textes d’application,
comme « almithaq alwatani litarbiya wattakwin ».
C’est, par voie de conséquence, aux institutions de changer radicalement pour
que s’établisse alors un mouvement démocratique qui récupérerait l’amazighité...
VI. QUELLE LANGUE A AMENAGER POUR LE MAGHREB ?
La langue nord-africaine ne s’effrite pas totalement devant les politiques
d’assimilation phénicienne, byzantine, latine, germanique, arabe, européenne…
elle peut survivre toujours aux coups de l’effacement. Cet effacement est à
définir comme une sorte de censure du Pouvoir. Pour ces régimes, il fallait
mettre l’amazighité dans la case des « interdits » et non pas dans celle des
« effacés ». Cette mise à l’écart est importante à analyser : les effets de
l’effacement sont lents au moment de réaliser ces contre-projets humains dans la
mesure où l’amazighité, bien qu’elle n’entre pas dans le système de la légalité
et de l’illégalité, préserve l’essence du peuple qui échappe au système. Pour
nous, le problème est de comprendre la logique d’un tel effacement, voire de le
déconstruire. Peut-elle servir de politique qui anéantit définitivement le
propre ?
Cette logique « négativiste » apparaît dans les statistiques et la composition
des cartes linguistiques. Dire que l’urbanisation signifie une déperdition
automatique du tamazight, esquisser la carte linguistique (héritée des colons,
et jamais tracée objectivement) où des taches marquant les montagnes montrent la
présence du tamazight, et des cités sans cette présence ! font très mal à
l’aménagement qui se veut juste et objectif. Où sont les sciences sociales dans
tout cela ? L’aménagement linguistique est, en plus d’être une action sur la
langue, est une reconstruction objective d’une réalité existante. En définitive,
le Maghreb ne peut se passer de sa langue-culture : l’amazighité. Qu’on pourrait
identifier comme pluralité. Une totalité qui ne peut être compartimentée ni
refondée, ni délimitée par des frontières. Qu’est-ce qu’une frontière
linguistique si elle est placée au sein d’une même société (ethnie) ? Ne faut-il
pas la nommer autrement : rupture, absence. Il n’y a pas de frontière
linguistique « proprement dite », ce sont bien les coups « de répression » qui
déterminent le flux et le reflux linguistiques des nations.
Ce raisonnement recherche également des preuves « historiques ». Le Maghreb
amazigh, selon ses historiens officiels, n’a pas de langue. Si elle existait,
elle serait toujours la langue du Couchant pour les Arabes. N’y aura-t-il pas
une autre langue opposée, celle du Lever ? Cette langue n’est pas l’arabe, mais
l’arabisation. A l’Est l’arabe et à l’ouest l’arabisation. Au Maroc,
l’arabisation de l’enseignement secondaire est achevée en 1983, et c’est à
partir de 1967, que l’arabisation totale de l’enseignement primaire s’est
réalisée. Et qu’est-ce que l’arabisation ? L’arabisation est un pari difficile ;
les promoteurs le savaient aussi. Par conséquent, ils s’empressent d’inscrire
leurs enfants dans les écoles occidentales. L’arabisation ne peut pas être un
exercice rationnel au Maghreb, mais un achèvement de quelque chose qui a
commencé au VIIIe siècle (futuhat exterminatrices), et dont le tarissement ne
s’achève. L’arabisation et l’analphabétisation se confondent au Maghreb, tout
comme arabisation et politique linguistique se confondent aussi. L’arabisation
au Maghreb n’est pas une politique linguistique, mais plutôt une mission
antiamazighe. De même, l’arabisme, qui naît de manière plus forte au Maroc au
début du siècle XX, signifie alors des décennies de retard pour les pays de
l’Afrique du nord. Ce qui est absurde chez les arabistes qui luttent contre
toute forme de colonisation, c’est qu’ils oublient qu’eux aussi usent d’une
idéologie colonialiste parachutée de l’Orient lointain et étranger.
L’arabisation est un projet d’extermination (pas d’assimilation) : arabiser le
non arabophone, arabophonisation ! Il se confond avec l’asservissement du
tamazight par l’arabe. Cet emplacement pose problème, il met en question la
vision développée par la politique linguistique (dite ouverture) dont l’objectif
final demeure l’asservissement ou la préparation d’une fin. Et les moyens
employés sont, bien sûr, régis par la technique du quiproquo et de la confusion.
Ajoutons que l’’arabisation est à voir comme un processus totalitaire :
programmé et confondant : il ne substitue pas le français, mais assimile les
amazighophones. Cependant, elle est un projet clair et précis : éradiquer le
Maghreb de son amazighité pour un « Maghreb à venir totalement arabe ». Pire
encore, cette politique s’avère sacralisation. On peut sacraliser un mot parce
qu’il nous paraît beau, on sacralise alors notre goût. On peut également
sacraliser une idée parce qu’elle se manifeste judicieuse, on sacralise alors
cette profondeur ou cette vision. On prétend sacraliser les deux, alors ce
serait de la confusion ou de l’hypocrisie.
Depuis quelques années, les politiques algériens et marocains commencent à
définir le tamazight comme langue « nationale ». Est-ce une tactique pour éviter
la confrontation entre langues privilégiées politiquement et langues réduites à
néant politiquement. Rappelons : tant qu’il y ait contact entre langues dans une
même aire, il y aura toujours un conflit qui pourrait définir les poids de
mesure ; le tamazight est national, il l’a toujours été : il ne fonde pas
l’histoire officielle de ce pays. Ce n’est pas la différence qui unit le
tamazight à la langue exogène (arabe, français, espagnol), mais l’opposition. De
ce rapport naît l’exclusion de la langue identique, et l’inclusion systématique
de la langue étrangère. Rappelons que la minoration du tamazight n’est pas une
chose naturelle, mais une décision politique incarnée par des interdictions et
des effacements. En Afrique du nord, et je crois pas que c’est l’une des zones
du monde, où la langue autochtone n’a pas de statut, elle forme un danger pour
l’unité du pays. Le tamazight est vu par les nationalistes maghrébins comme une
menace à l’avenir des institutions. Par ailleurs, l’arabe n’exclut pas le
français, et vice versa. Mais ensemble ils excluent le tamazight. L’aménagement
maghrébin est une « purification » plurilingue. L’aménagement linguistique au
Maghreb se construit à partir de la haine de soi. Le Moi amazigh, en
conséquence, est devenu infinitésimalement petit. Pourquoi ? Vu leur statut de
langue étrangère et leur partage d’intérêts, ils concourent incessamment à
éradiquer l’héritage amazigh sur tous les plans.
Enfin, si au Maghreb, la richesse linguistique est présente, c’est pour affirmer
la richesse de cette culture, de cette tranche de l’humanité. Cette situation
plurilinguistique est non seulement à lire comme un fait positif, mais à
instituer (aménager) pour la préserver. Le plurilinguisme unit un Etat sur la
base de la différence, de la fraternité, de l’égalité et surtout de la
démocratie, autour d’un héritage unique : l’amazighité. Aménager la langue ou
les langues d’un pays, c’est réconcilier l’homme avec son Milieu. Ainsi, gérer
le plurilinguistique au sein d’un Etat, c’est affirmer sa richesse humaine,
intellectuelle et culturelle, et la déterminer positivement dans le réel.
VII. L’ARABE CLASSIQUE, LANGUE DES INSTITUTIONS, ET LE TAMAZIGHT, LANGUE DE L’HISTOIRE
Très schématiquement, gouverner au Maroc se base sur l’avènement d’une dynastie
et la fin d’une autre. Cette succession de dynasties va forger la personnalité
politique de l’Etat dans la détermination des moyens d’assurer le pouvoir. L’Etat
devient une sorte de recherche d’équilibre entre la famille qui est le noyau
(incarnant la gouvernance) et le Peuple vu comme la périphérie (source
d’enrichissement). Des alliances assurent la cohésion politique. L’Etat se
gouverne alors en se souciant essentiellement de la continuation. Il crée ses
propres lois, leur greffant des lois divines. Pourtant, cet Etat fonctionne
selon un ensemble de rationalités (étatiques). Et par conséquent les structures
institutionnelles fondent une logique qui renforcerait une méthode précise qui
ferait couronner l’idéologie de l’Etat. Tamazight, ou l’amazighité,
entrerait-elle dans une telle logique de systématiser l’univers ?
Ainsi, il est de dire que l’arabe n’a pas d’importance plus de ce que les
institutions lui octroient ; au Maghreb cette langue étrangère en a jusqu’au
point de pouvoir se déformer au contact quotidien du tamazight, créant ainsi
l’arabe « dialectal ». Qui n’a pas souffert de la coercition en classe ? Y
a-t-il quelqu’un sur qui on n’a pas exercé de la coercition car il a prononcé
des mots amazighs dans l’enceinte de l’école ? L’école marocaine, depuis 1957,
tend à une homogénéisation linguistique impossible, en se basant essentiellement
sur la proscription de l’usage de la langue maternelle.
En Afrique du nord, bien qu’il ne s’investisse d’aucune fonction
institutionnelle, le tamazight est à nommer « langue propre », à l’instar de la
Catalogne où on parle de « lengua propia », et c’est bien ce titre qui
singularise le peuple maghrébin. Quelle serait la particularité du peuple
maghrébin si ce n’est pas sa langue originelle ? Le tamazight serait
l’identification historique. Langue de l’histoire. Les Phéniciens édifient des
centres-points de commerce. Les Imazighen gardent leur patrimoin linguistique,
et l’enrichissent par des emprunts. Les Romains pouvaient frayer des routes
partout ; ils construisaient des chaussées dallées pour conquérir tant de
régions, et par conséquent agrandir davantage l’Empire. Ce réseau routier était
aussi un réseau pour la langue latine. Là, au sein de ce grand royaume, les
Imazighen conservèrent le tamazight comme instrument véhiculaire. De même, à
l’instar de la monnaie romaine qui est nécessaire sur les terres de la
Méditerranée… l’administration romaine rendit le latin indispensable pour les
peuples barbares (où les Imazighen étaient une partie importante). Avoir une
situation (ou un travail) meilleure, il faut que le nord-africain maîtrise le
latin : cette situation pérenne avec les autres peuples qui arrivent. En
général, cela est valable pour toutes les invasions et conquêtes. C’est le
linguistique qui sauvegarde plus de traces, plus que les ruines… Tout système
envahissant de ce point du monde, qui se montre absent physiquement et présent
métaphysiquement, renforce cet Etat (qui ne compte pas sur le « ici » et non
plus sur la population), dans sa détermination à s’élaguer et à se réfugier dans
l’aliénation. C’est ainsi que la langue « des autres » devient institutionnel,
et tamazight réduite à sa place « historique »…
En conséquence, défendre le tamazight s’avère un acte révolutionnaire.
Précisément, propre de l’anarchique. Maintenant, devant un Etat sous-jacobin, se
revendiquer de l’amazighité relève de l’opposition à l’unité de la nation. Les
intellectuels du Makhzen, définis comme des défenseurs institutionnels, sont des
intellectuels médiatiques qui ne se lassent pas de formuler des contradictions,
des « réflexions calculantes ». Car leur destinataire n’a jamais été ce peuple
« méprisé, misérable et analphabète », qu’on déteste intellectuellement… Ils
vivent dans une autre réalité, expliquent un autre univers, fixent des illusions
et voient des fictions. Ils n’interprètent jamais correctement, mais peuvent
traduire tout. Leur aporie est de ne pouvoir voir l’amazighité (qui étant là) de
leur être. Ils concluent leur discours par : le tamazight, langue nationale !!!
Pas officielle !!! Leur philosophie, précisément l’équation, est : une langue =
une nation, doit demeurer insoluble. Plus que ça, c’est une aporie générale dans
la pensée maghrébine.
Ainsi, penser à la promotion de l’amazighe au rang de langue officielle des
appareils de l’Etat induira des métamorphoses, tantôt au niveau de
l’organisation tantôt au niveau de la légitimité historique. Devant un tel
réaménagement, il est naturel d’arriver à une animosité entre le puissant (la
majorité) de l’Histoire et le fort (la minorité) de l’histoire. Ainsi, c’est
quelque chose de réellement possible, mais de politiquement révolutionnaire.
Curieusement, cette réconciliation est possible si l’Etat (et ses appareils)
demeurent neutres. Elle peut aussi être plus fructueuse si l’Etat avance une
autocritique –c’est-à-dire une réelle prédisposition à changer les choses.
VIII.- ET LE TAMAZIGHT DANS LA CONSTITUTION
L’on entend souvent les gens dire : « Si on constitutionnalise le tamazight, on
sera faibles et divisés ! Comme langue nationale, peut-être. Mais, jamais comme
langue officielle. C’est impossible ! » Ce n’est là qu’une résistance commune
aux personnes qui détestent le réalisme et s’obnubilent de thèses arrivistes.
L’on sait bien, et eux le savent aussi, que constitutionnaliser le tamazight
n’est pas un acte de réforme, mais de révolution.
La Constitution confectionne les modes de l’action politique qui sont permis et
tolérés. Elle consiste plus à limiter qu’à définir. Elle met en place un
ensemble de lois que le Pouvoir doit utiliser afin de gouverner. Elle révèle
notamment l’ordre politique existant, étant capable de réglementer le réel dans
toutes ses manifestations. Peut-il alors le politique ignorer le réel ?
L’absence du propre sur la scène politique sera une des explications de la
vacuité des projets « politiques » et un écart à tout ce qui est réellement.
Cette absence jette le trouble dans l’esprit réaliste et « démocratique » qu’il
faut forger au Maghreb.
Faut-il vraiment insérer la langue comme un élément fondateur d’une
Constitution ? Notons que la Constitution américaine, écrite en anglais, ne fait
point référence à la langue officielle. Par contre, la Constitution française y
insiste par la loi n°92-554 du juin 1992, dans l’article (2) placé sous le titre
premier « De la souveraineté » : « La langue de la République est le français. »
Ainsi, langue est essentiellement souveraineté. A la même année, l’Union
Européenne adopte la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.
Ce texte consacre « le droit imprescriptible de pratiquer une langue régionale
dans la vie privée et publique. » La France, pays plurilingue, ne va pas la
ratifier, bien qu’elle la signe en 1999. Une telle position du pays jacobin
s’explique par des motifs purement idéologiques.
Imaginons la constitutionnalisation du tamazight au Maghreb et les différents
changements positifs qui vont s’amener comme conséquence immédiate. Il y aurait,
à titre d’illustration, une révolution politique, menant ce corps à la
réconciliation avec le propre, et à se définir par rapport aux corps exogènes
(francophonie et arabophonie). Cependant, cela ne refléterait pas immédiatement
un changement de parcours des institutions et de la société. Ce ne serait qu’un
commencement, une base « théorique » sur laquelle il faut greffer des lois et
des exécutions.
La constitutionnalisation du tamazight n’est qu’une question à poser
uniformément à toute la société maghrébine. Elle doit s’imposer à tout le monde.
Cette officialisation est, en plus de son importance, un critère de
détermination des systèmes politiques. Elle apportera du nouveau, mais surtout
du réel. A la crise, elle peut offrir des solutions. A l’imprécision et au vague
va se substituer la clarté profonde. Les institutions sont donc à refaire :
« L’inflexibilité des lois, qui les empêche de se plier aux événements, peut, en
certains cas, les rendre pernicieuses et causer par elles la perte de l’Etat
dans sa crise. L’ordre et la lenteur des formes demandent un espace de temps que
les circonstances refusent quelquefois. Il peut se présenter mille cas auxquels
le législateur n’a point pourvu et c’est une prévoyance très nécessaire de
sentir qu’on ne peut tout prévoir. » (23) Le souci constant chez les
gouvernements de l’UMA de décomplexer le politique passe inéluctablement par la
« réalisation » de la Constitution et non pas par sa « dé-réalisation ». Ainsi,
il est nécessaire de ne pas laisser dormir les lois sur le tamazight qui s’en va
à retracer d’autres voies, peut-être d’extinction volontaire, peut-être de
révolte continue.
1) Le cas des voisins ibériques :
Rappelons que le peuple « d’«Ibères» (…) s’applique à un peuple africain de type
berbère infiltré jusqu’aux Pyrénées le long du Levant espagnol » (24) Cette
vérité historique dérange et les Espagnols qui définissent le Maghreb en tant
que partie du monde arabe, et les Maghrébins qui ne se réfèrent qu’à la conquête
islamique de l’Ibérie qu’on ne relie point à cet héritage commun.
Précisons que pour bien expliquer les destins du Maghreb, il est utile de se
référer à la Constitution « espagnole » dans sa diversité « démocratique »,
celle qui a fini par reconnaître sa propre diversité ou son propre divers. Dans
l’article (3), le castillan est défini comme la langue officielle de l’Etat.
Tous les citoyens ont le devoir de la connaître et le droit de l’utiliser. Les
autres langues espagnoles sont aussi officielles dans les communautés autonomes
respectives en accord avec leurs « statuts ». La richesse des modalités
linguistiques de l’Espagne est un patrimoine culturel qui sera objet d’un
respect spécial et de protection.
Que disent, à leur tour, les Statuts des communautés espagnoles ? Dans l’article
(6) des “Estatutos Autonomicos” du Pays Basque, le « basque » est dit « langue
propre » du peuple basque, co-officiel avec le castillan. Les institutions
basques utilisent communément les deux langues. L’article prohibe la
discrimination linguistique. De même, l’Académie royale de la langue basque –Euslkaltzaindia-
est l’institution consultative officielle en ce qui concerne l’euskera. Une
telle institution, sur un plan formel, ressemblerait faussement à l’IRCAM et au
HCA.
L’article (3) des constitutions catalane et baléare qualifie le catalan de « llengua
pròpia », ensuite de co-officiel » avec l’espagnol, enfin d’obligatoire : le
gouvernement autonome a l’obligation d’assurer « l’usage normal » du catalan et
de l’espagnol et de créer les conditions qui puissent permettre de réussir
l’égalité pleine au niveau des droits et des devoirs des citoyens de la
Catalogne. Les deux constitutions sont claires : « personne ne peut être
discriminé à cause de la langue ». Notons, toutefois, que la minorité
linguistique d’« Aran » de la Catalogne sera « objecte d’ensenyament i d’especial
respecte i protecció » (article 3) Cette situation de l’aranais est similaire à
celle du « tamazight » au Maroc.
Suivant la même vision démocratique, l’article (5) de la Constitution galicienne
nomme le galicien comme « lingua propia », ensuite « officiel » à l’instar de
l’espagnol, et les pouvoirs politiques de la Galicie peuvent garantir l’usage
normal des deux langues et garantiront les conditions pour faciliter sa
connaissance, enfin personne ne peut être « discriminé » à cause de la langue.
Par contre, dans les statuts autonomiques des Iles Canaries et de l’Andalousie,
le lecteur ne découvre rien à propos de la langue. Plus nettement, les Estatutos
autonomicos des Iles Canaries ne font pas référence à l’héritage linguistique,
mais plutot à l’“identité singulière”, au “peuple canario” et à “la defensa de
la identidad y de los valores e intereses del pueblo canario”. Tant de concepts
difficiles à définir.
Enfin, ces textes fondateurs voient clair: l’homme (ou le citoyen) ne se mesure
pas espace, mais langue (qui s’avère le véritable espace).
2) Le cas de l’Afrique amazighe :
- La Constitution malienne (25) efface l’héritage amazigh, parle vaguement de
langues nationales sans les déterminer.
- La Constitution burkinabé est composée le 27 janvier 1997. Le préambule
reconnaît « une société pluraliste de progrès ». L’article (1) interdit la
discrimination basée sur la langue. Puis, l’article (13) interdit également la
formation politique « tribaliste ». Ainsi, l’amazighité passe sous le volet « de
société pluraliste », sans avoir de ses droits.
- Dans le préambule de la Constitution nigérienne, le texte reconnaît
l’ « attachement au principe de la démocratie pluraliste ». Dans l’article (1),
le sceau de l’Etat est orné avec le motif « une lance en pal chargée de deux
épées touareg »… L’article (3) parle des communautés qui « jouissent de la
liberté d’utiliser leurs langues en respectant celles des autres. Ces langues
ont, en toute égalité, le statut de langues nationales. La loi fixe les
modalités de leur promotion et de leur développement. » Seulement le français
est reconnu seul comme langue officielle.
Au fait, il s’agit d’une constitution laïque, développant « la séparation de l’Etat
et de la religion » (article 4). Enfin, l’article (9) interdit la création de
« parti à caractère ethnique ».
Enfin, ces trois textes de lois reconnaissent ceci : c’est de la terre que
découle la Constitution. Autrement dit, les rites et l’histoire y sont
explicités sous le « tribal ».
3) Le cas du Maghreb Amazigh
A quoi se rattache l’acte de constitutionnaliser en Afrique du nord ? Au
tribal ? A la terre ? A l’histoire ? A l’homme ? Ou bien à la philosophie d’Uqba,
celle de fonder l’invisible ? En général, la constitutionnalisation veut dire :
- réviser (sinon refaire) le texte existant ;
- insérer des éléments nouveaux (peut-être vieux, mais oubliés / effacés
politiquement) ;
- renforcer davantage la construction d’un Etat de droit.
Cette constitutionnalisation de l’élément fondateur « amazighité » peut assurer
la voie vers l’Histoire et rapprocher enfin le Citoyen des Lois.
Quitte à répéter une évidence, il faut bien noter que le tamazight, unique
langue autochtone du Maghreb, s’oppose aux autres langues arrivées avec les
colonisateurs et les « forasteros ». Cette opposition créera des classifications
« artificielles » et de nouvelles définitions postulées par l’idéologique et les
initiatives du pouvoir. Durant tant d’étapes historiques, la confrontation
symbolique (dérivant du propre et de l’impropre) est à son apogée : le propre
est vidé, et l’étranger (ou l’impropre) apparaît prédominant. En conséquence, la
langue propre n’est pas reconnue par les textes fondateurs et juridiques des
pays dits de l’Union du Maghreb Arabe. La Constitution des maghrébins ne se
bâtit pas autour de l’idée du respect du propre. Comment peut-on expliquer ce
statut extraconstitutionnel ? Comment la constitutionaliser ? Et que dire de la
Constitution qui s’inspire totalement de l’étranger ? Constitutionaliser n’est
pas la bonne option, mais oui l’interrogation suivante : comment amazighiser la
constitution ? Peut-elle la Constitution exister outre la réalité palpable ?
Quels sont les rapports existant entre le légiféré et le réel ?
De nos jours, la Constitution est la Dulcinée des Maghrébins ! Elle est là
(imagée, défendue, chérie, et le politique repart tel Don Quichotte à sa
recherche), elle s’avère à la fin une Illusion car le politique a toujours
manqué de réalisme. L’on entend par-ci par-là, il faut un débat national sur le
cas de la constitutionnalisation du tamazight comme dans les célèbres jugements
du juge Sancho Panza sur son île. Citons : « quand tout le peuple statue sur
tout le peuple, il ne considère que lui-même ; et s’il se forme alors un
rapport, c’est de l’objet entier sous un point de vue à l’objet entier sous un
autre point de vue, sans aucune division du tout. Alors la matière sur laquelle
on statue est générale comme la volonté qui statue. C’est cet acte que j’appelle
une loi. » (26) Les citoyens décident la loi à laquelle ils doivent obéir :
peut-on décider sur sa langue ? Sur celle de ses aïeux ? Quel est l’objectif
ultime d’une loi ? Insérer adéquatement les citoyens dans leur milieu ? En
outre, s’il y a constitutionnalisation de l’amazighité, il faut surtout des lois
qui la mettent en application et la protégent dans les administrations et les
institutions. Autrement dit, à l’officialisation il faut lui adjoindre un
ensemble de lois linguistiques pratiques, claires et positives.
La Constitution fonde les institutions selon les contenus et les idéaux
développés. Ces constitutions étudiées, de tout le Maghreb, ont un inconscient
« de tabous », incarné par l’histoire où le tamazight est tout. La Constitution
du Maghreb amazigh, dans l’abstrait, se base sur trois agents : l’Amazighité,
l’Islam et l’Arabité. Seulement, l’histoire se passe régulièrement, appelés les
auteurs à définir le bon, le méchant et le garant de l’équilibre. L’Amazigh est
le méchant, l’Arabe le bon, et l’Islam l’équilibrant (pour ne pas dire
l’équilibriste). Précisément, cette équation fonde la sacralisation de la
langue. Elle naît d’une vision romantique où la nostalgie tient une grande
place, mais l’historique mis en marge. Précisons que l’Islam peut être une
identité, une culture, mais chargées de significations « envahissantes ». Il est
l’œuvre divine. A l’homme de construire des langues et de fonder des cultures…
La communauté islamique, étant la meilleure dénomination de la communauté
maghrébine, est-elle assez unie pour qu’elle le soit par la langue « exogène » ?
L’on peut expliquer : l’arabo-musulman doit céder la place à l’amazigho-musulman
(englobant déjà l’arabe), mais pas le vice-versa. Rappelons qu’il n’y a pas
d’homogénéité entre Arabes et Imazighen dans leur vision du monde… L’identité
arabo-musulmane s’avère une chimère. Elle ne peut exister en tant que
redondance : arabo-arabe ; en tant qu’oxymore : arabo-amazigh ; en tant
qu’euphémisme : n’en parlons pas ! L’identité, dans sa réalité, n’a pas besoin
de tri, ni de hiérarchie. Elle est une totalité.
- A l’instar de son régime politique, la Constitution libyenne est vague.
A partir des textes fondamentaux de cet Etat qui se veut Jamahiriya et de
doctrine socialisme islamique, il est d’observer :
*L’Islam est la religion d’Etat, le Coran est la constitution de la Jamahiriya ;
*L’Arabe est la langue officielle ;
*L’Etat interdit la discrimination basée sur la race, le sexe, la religion,
l’handicap, la langue ou la situation sociale.
- En Tunisie, prétendument connue comme le pays des Phéniciens et des Arabes, la
Constitution (27) se dit membre légitime de la « famille arabe ». Logiquement,
la langue est l’arabe. De même, la formation politique ne peut se fonder sur
« une langue » autre que l’arabe.
Dans ce pays nord-africaine, l’on ne parle même pas de droits des minorités (et
les Imazighen sont vus comme une… un peu partout !)
-Le préambule de la Constitution algérienne reconnaît l’amazighité aux côtés de
l’arabité. Mais l’article dit clairement que seul l’arabe est la langue
nationale et officielle. L’article (42) interdit toute formation de politique
fondée sur le linguistique. De même, l’article (178) avance que l’arabe et
l’islam sont dits des valeurs constitutionnelles intangibles, mais ce n’est pas
le cas de l’amazighité.
Cette Constitution insère dans son texte le terme « amazighité », mais sans lui
donner au niveau linguistique aucune part ni droit. Seul l’arabe est
« officiel », « national » et intangible ! En outre, l’amazighité ne peut pas
avoir un « fonctionnement politique » en tant que parti ou organisation
politique.
Finalement, le gouvernement algérien entend trancher sur la question de
l’amazighité. Le Président de la République, après des consultations avec le
mouvement amazigh, opte pour la voie parlementaire pour inscrire le tamazight
dans la première loi du pays. Les deux chambres du Parlement seront convoquées
en session extraordinaire pour adopter l’amendement.
- Actuellement, dans la Constitution marocaine, (28) le tamazight en tant
qu’héritage linguistique des marocains est effacé. Le préambule est clairement
pour la négation du tamazight et de l’amazighité. Que faire pour réconcilier les
marocains avec leur être ?
Toutefois, dans le cas du Maroc, la politique en matière des langues est
précise, elle dérive pleinement de la Constitution (l’ensemble des textes écrits
entre 1962 et 1994 investit l’arabe comme langue officielle du royaume). Ainsi,
toutes les institutions ne fonctionnent normalement qu’avec le moyen de l’arabe
classique et du français, et cela depuis 1912.
- Enfin, la Constitution mauritanienne (29) reconnaît le plurilinguisme, et
identifie l’amazighe comme une des langues propres du pays. Les autres langues
sont l’arabe, la hassaniya (langue maternelle des Maures non reconnue), le
pulaar, le soninké, le wolof et le bambara, et le français. Dans la même logique
d’ « altération », la Constitution ne reconnaît que les trois langues
négro-africaines et les deux langues étrangères (l’arabe et le français). Plus
précisément, le français, langue officielle jusqu’en 1991, est relayé par
l’arabe…
Diverses observations et conclusions sont à énumérer comme suit :
a) Tout d’abord, que fait-on de l’équation : terre et constitution ?
b) Il me semble que cet appel à continuer à effacer l’amazighité dans la
Constitution est lié non seulement à la quête du pouvoir politique, mais aussi à
sa nature. Que faire de la citoyenneté amazighophe ? De l’être amazigh qui fonde
l’Afrique du Nord, de la Libye jusqu’en Maurétanie ?
c) Ensuite, l’amazighité est le non-écrit de la Constitution ; elle se confond
avec la blancheur des pages. Comment peut-on alors parler de constitution ? Pour
schématiser, et non pas y répondre, cette non-présence du propre dans le texte
fondateur comporte quatre fonctions :
* elle propose un pouvoir qui est homogène et qui doit le rester ;
* elle conçoit un commencement de l’Histoire, tout ce qui précède est de la
non-Histoire ;
* elle permet de systématiser les sociétés à partir d’institutions faites plus
d’interdictions que de droits citadins ;
* elle assure la continuité du pouvoir « exogène ».
d) Le droit maghrébin ne se hisse pas comme organisation du palpable, mais se
hisse plutôt sur des prétextes et des préjugés que la Constitution tente
vainement d’expliquer. Par le légal on renforce alors le dominant. Et par
l’illégal on redouble, évidemment, d’épaisseur d’effacement l’effacé (absent).
Il s’agit alors d’un droit présenté comme un outil effectif de constitution des
pouvoirs « arabistes »…
e) Aussi, est-il recommandable de s’interroger sur les liens que la Constitution
a noués avec les institutions. Tout cela fait en sorte que politiciens,
technocrates, législateurs et gouvernants appliquent à la lettre la
Constitution, et ne tolèrent point que l’on parle ni de l’effacé, ni de
l’oublié.
f) Le support institutionnel est réellement déterminé par les statuts
idéologique, politique, institutionnel, socioéconomique et sociohistorique de la
langue. Une révision totale de ces statuts pourrait assurer une vraie
constitutionnalisation du tamazight. Et une telle réalisation peut passer par
les étapes suivantes :
- Relecture des Constitutions existantes ;
- Autocritique politique et partisane ;
- Récriture d’une Constitution « réaliste ».
g) Enfin, si on cite, dans l’avenir, le tamazight en tant que langue
« nationale », les maux vont se démultiplier pour l’amazighité. Car cette
dénomination est en soi une reconnaissance de la fin « irréversible » du propre.
Que l’on cite pour citer, ce corps serait enclin à la dégradation, et l’exemple
de l’enseignement du tamazight à l’école marocaine en est une bonne
illustration : le tamazight était meilleur sans cette entrée « humiliante » en
tant qu’objet « folklorique » à faire consumer…
IX.- QUELLE POLITIQUE LINGUISTIQUE OFFICIELLE ?
Sur l’amazighité les pouvoirs politiques du Maghreb sont unanimes : ils ne
reconnaissent pas le propre. Tout ce qui fait en politique est loin du propre,
en est totalement étranger. L’organisation des partis politiques signifie le
respect de la Constitution qui tend à enterrer l’amazighité. Suivant la même
logique, les institutions et les appareils de l’Etat annulent cette « partie
effacée », tout en se dotant de techniques d’effacement inspirées du fondement
politique. La constante de l’Etat est donc, et de manière contradictoire, de
rechercher avec insistance la reconnaissance davantage auprès de ceux qu’il ne
reconnaît pas…
C’est pourquoi l’arabiste se dérobe devant une question : « Pourquoi le
tamazight ne peut-il pas être que langue officielle ? » Comment interpréter de
tels propos ? Est-ce le prétexte de l’hétérogénéité qui s’élève derrière ce
refus de l’identitaire au sein d’une Constitution ? Est-elle alors possible
l’homogénéité au Maghreb ? Cette absence de l’amazighité dans la Constitution
est un signe indéniable de la non-démocratie. Par une telle
constitutionnalisation, la souveraineté s’ouvrira, devenant plus large, au
Peuple. Si la Constitution est l’art de gouverner le pays, en plus d’être une
vision (philosophie) du pouvoir adéquat à résoudre les problèmes et à faire
avancer le pays, la politique linguistique est avant tout un ensemble de mesures
politiques qui forgent l’avenir d’une société. Au Maghreb, la seule politique
appliquée est celle de l’assimilation servie dans un enchaînement « politique »
où l’égalité, l’octroi des droits linguistiques, le respect des traditions,
l’écriture de l’histoire et la révision des mythes fondateurs sont à poser.
Justement, au Maroc, le rapport au tamazight va de l’assimilation (uniquement) à
l’assimilation complexe et à la non-intervention qui se trouvent amalgamées ?
Une politique mixte (officielle / officieuse, explicite / implicite,
intentionnelle / aléatoire, décrétée / sans décret, interventionniste / non
interventionniste) est mise en application.
La langue n’existe qu’en tant qu’action sur le milieu, ceci est essentiel pour
comprendre les objectifs de l’aménagement. L’aménagement s’appuie sur des
motivations idéologiques (implicites) en s’explicitant par une méthode
prometteuse. Au Maghreb, le tamazight n’est pas une langue sans statut, mais
sans institutions pour la réaliser. Peut-on planifier le tamazight au sein d’un
Etat régi par l’arabisation ? Peut-on aménager le tamazight dans les
institutions arabisées ? Peut-on normaliser le tamazight dans une Nation où
règne l’arabisme ? Peut-on avoir une perestroïka linguistique ? Les propositions
de graphitisation, de standardisation et de modernisation (fondant la langue
littéraire) pour l’amazighe sont insuffisantes pour fonder cet héritage
linguistique. Un chercheur catalan aura cette vision critique : « La créacio de
l’Amazic Comu és, doncs, un element del canvi democratic a l’altra banda de la
Mediterrania. Es tracta d’un objectiu que és, a més, imprescindible per a la
normalitzacio de la llengua amaziga. Sense un Amazic Comu que funcioni com a
llengua de relacio interdialectal i com a instrument de creacio i de transmissio
cultural, aquestes funcions seran cobertes per altres llengues, principalment
l’arab o el francès, i la subordinacio social de la llengua amaziga no faria més
que accelerar-se. » (30) Cette « litteracie », vue selon Brian Street comme
étant la capacité pour l’acquisition des techniques du langage écrit dans la
société, (31) peut assurer la reconstruction de l’amazighe littéraire, mais que
dire de son introduction dans les institutions qui forgent l’histoire. Si cette
politique linguistique tend à instaurer la tradition scripturale, et comme nous
le savons tous : l’écriture est à lire comme les paroles de dieu (selon les
Pharaons) ; l’on se rend compte que l’équation tamazight / arabe se résout
totalement en arabe, dans une équation métaphysique insoluble.
De cet amazigh, il est plus important de créer des idées (qu’on ne doit que
recueillir de la pensée). Parallèlement, le tamazight doit opter non pas à être
tout simplement une langue d’enseignement, mais surtout d’amazighiser l’école
maghrébine.
En dernier lieu, pour les Imazighen émigrés, que fait-on ? On les arabise
là-bas, et ainsi rien n’échappe à l’arabisation. L’usage public de cet héritage
est interdit ; le généraliser devrait-il être la politique correcte ?
EN CONCLUSION…
Si l’officialisation du tamazight s’impose avec urgence, c’est tout simplement
il s’agit d’une injustice que nous avons traînée depuis des siècles. Les
Imazighen ne sont pas une minorité, mais plutôt un peuple « sans constitution »,
sans pouvoir ni support institutionnel. Avec une politique linguicide, le
Maghreb est sur la voie de la dénaturation, de sa perte ethnolytique. (32) Sans
une bonne politique linguistique, la cohésion sociale est difficile à réaliser.
De même, si l’on standardise l’amazighe dans le sens juste de l’insérer dans une
normalisation, et sans lui octroyer des champs et des usages sociaux plus
vastes, ce serait réifier l’amazighe. Seulement, l’amazighité n’est pas au fait
un problème politique, mais de conscience.
Si la normalisation est possible en Algérie et au Maroc, l’aménagement, je
crois, est de l’impossible. Les politiciens (doublés de linguistes) maghrébins
tergiversent entre l’unité (réductrice) et l’union. Face à la promotion
« chauvine » de l’arabe, le tamazight prédomine toujours dans les pays du
Maghreb (dans un sens ou dans un autre, surtout sur le plan symbolique). « Le
plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne
transforme sa force en droit, et l’obéissance en devoir. » (33) Ainsi, les
intellectuels maghrébins, en plus d’avoir peur d’énoncer le terme « amazigh » ou
« amazighité », développent des thèses « orientales » pour parler du monde
« occidental », celui du Maghreb ! Peut-on d’un grenadier cueillir des figues ?
Le désordre est-il possible ? Le chaos peut-il être fabriqué par une main
agissante et munie de volonté destructrice ? Peut-il le tamazight être tout ? Il
est tout d’abord la langue propre de l’Afrique du nord. S’il n’a pas disparu,
c’est bien grâce à la volonté de Dieu. Le Destin a voulu qu’il soit éternel.
D’où la sacralité de cette langue, de cette culture, de cet héritage et de ce
peuple ! Le tamazight n’est pas à prendre comme l’ « à venir » de la société
maghrébine, mais comme son avenir. Le support institutionnel s’avère nécessaire
à le fonder, à lui donner d’autres fonctions. Face à cette tendance à effacer le
propre et à protéger (et promouvoir) l’exogène qui est légitimée (légiférée
également) par la Constitution, seule une autre Constitution pourrait inverser
le courant.
Enfin, en ces moments, où il est illogique de fonder l’amazighité par
référendum, où il est possible de la récupérer par volonté présidentielle
(Algérie) et volonté royale (Maroc), il est davantage facile de composer la
Constitution du Maghreb arabe, focalisée sur l’interdiction de l’amazighité, il
appert urgent de composer, en plus de l’insertion de la langue propre dans le
Livre Fondateur, une « Défense et Illustration de l’Amazighe » comme garantie de
l’officialisation.
NOTES
(1) Publié pour la première fois et partiellement dans Tawiza n°90, octobre
2004, cet article paraît ici dans sa version définitive.
(2) J.-J. ROUSSEAU, Du contrat social, Editions sociales, « Les classiques du
peuple », Paris, 1977, p.103)
(3) Ignace DALLE, Maroc 1961-1999, l’espérance brisée, Maisonneuve et Larose &
Tarik Editions, Paris, 2001, p.46.
De l’enseignement au Maroc, nous avons les données suivantes : « On passe de 6
000 écoliers en 1925 à 8 000 en 1930, à 22 000 en 1938, à 35 000 en 1945, à
110 000 en 1950 et à 206 000 en 1955. En 1953, on estime à 8% le pourcentage des
écoliers par rapport à la population en âge d’être scolarisée. »
(4) Ignace DALLE, Maroc 1961-1999, l’espérance brisée, Maisonneuve et Larose &
Tarik Editions, Paris, 2001, p.55.
(5) Jean-Pierre COT et Jean-Pierre MOUNIER, Pour une sociologie politique,
Seuil, 1974. « Almond et Verba entendent cerner les composantes de la culture
politique démocratique. Ils définissent la cutlure comme l’orientation
psychologique à l’égard d’objets sociaux, c’est-à-dire l’intériorisation, par
chacun, du système politique dans la psychologie propre. » (p.38)
(6) cf. Ignace DALLE, Maroc 1961-1999, l’espérance brisée, Maisonneuve et Larose
& Tarik Editions, Paris, 2001., p.53.
(7) cf. Ibn Khaldun in Abdeslam Cheddadi, Education et culture au Maroc,
Editions Le Fennec, Casablanca, 2003, p.89
L’arabe dialectal est le résultat du dualisme amazigh / arabe, avec une victoire
pour la langue autochtone : « L’idiome berbère l’emporta sur l’arabe, qui se mua
en une autre langue mixte, où le berbère est dominant. »
(8) « Bulletin Officiel n° 3286 du Mercredi 22 Octobre 1975
Décret n° 2-75-663 du 11 chaoual 1395 (17 octobre 1975) fixant la vocation des
établissements universitaires ainsi que la liste des diplômes dont ils assurent
la préparation et la délivrance.
Le Premier Ministre,
Vu le dahir portant loi n°1-75-102 du 13 safar 1395 (25 février 1975) relatif à
l’organisation des universités, notamment son article 21 ;
Vu le décret n°2-75-662 du 11 chaoual 1395 (17 août 1975) portant création
d’établissements universitaires et de cités universitaires ;
Après examen par le conseil des ministres,
Décrète : Article 12 : L’Institut d’études et de recherches pour l’arabisation
est chargé d’entreprendre, de promouvoir et d’orienter les travaux nécessaires à
l’arabisation. A cet effet, il doit oeuvrer pour faire de la langue arabe un
instrument de travail et de recherche couvrant tous les domaines, et
particulièrement les domaines scientifique et technique. »
(9) Les textes de sociolinguistique parlent, en général, de différents concepts
pour signifier cette gestion des langues : planification linguistique,
aménagement linguistique, glottopolitique, normalisation politique, politique
linguistique
(10) Selon Kremnits (1981, p.66), « le concept de conflit linguistique serait
applicable chaque fois que deux groupes linguistiquement différenciés cohabitent
dans une même organisation étatique, dès que l’une des deux a sur l’autre un
avantage, en droit ou en fait. »
(11) On entend par Maghreb amazigh : la Maurétanie, le Maroc, l’Algérie, la
Tunisie et la Libye. C’est un Maghreb « étant, existant, réel et historiquement
démontrable », à l’encontre de ce Maghreb arabe qui n’existe nulle part que dans
l’imaginaire et la fantasmagorie des arabistes. S’il faut parler d’un Maghreb
arabe, ce sera bien sûr la région est de la péninsule arabique. Maghreb juif
existe aussi, concept utilisé par Jacques Derrida.
Par ailleurs, qu’est-il de nos jours du nom « du commencement » : Occident
islamique ?
(12) C’est bien Mohamed El Fassi, ministre de l’Education nationale en 1957, le
premier politique marocain à « arabiser » l’enseignement primaire, et à
rétracter quelques mois après. En octobre 1959, Abdelkrim Benjelloun dénombre
les principes de l’enseignement au Maroc : unification, arabisation,
généralisation et marocanisation. Après l’enseignement, c’est au tour de
l’administration à être « arabisée » par le ministre M. Boucetta en novembre
1960.
(13) l’Institut Royal pour la Culture Amazighe fondé en 2001, comme résultat de
la montée en puissance du mouvement amazigh, notamment avec la composition du
« Manifeste amazigh » (01/03/2000)
(14) Haut Commissariat à l’Amazighité fondé le 07/06/1995, comme conséquence de
la grève des cartables en 1994)
(15) Par purification linguistique, on n’entend pas une purification physique,
mais plutôt symbolique. Autrement dit, on n’extermine pas la famille
« Ameqran », mais on tue sa « langue » qui énonce d’autres signes / sons que
« Ameqran »… A la fin, ce nom tombe en désuétude ou devient sans signification
dans son propre environnement.
(16) Ici, l’on observe le comble de la contradiction : Depuis le 17 octobre
2001, la Délégation Générale à la Langue Française s’appelle la Délégation
Générale à la Langue Française et aux Langues de France : volonté de l’Etat
jacobin à enterrer le monolinguisme et à le remplacer par une conception
plurilingue de la France (où le berbère a une mission patrimoniale), et
qu’est-il du Maghreb francophonique (ment) satellite ?
(17) La politique d’assimilation est un projet qui tend à planifier
l’accélération de la minorisation d’un groupe linguistique. L’interdiction,
l’exclusion, la dévalorisation sociale, la marginalisation économique, la
répression… sont les moyens utilisés pour réussir cette politique.
(18) La politique de non-intervention est la suite de la politique
d’assimilation. Elle est un choix conscient qui sait que le groupe linguistique
touche à sa fin. Elle se présente sous forme de deux options :
- non intervenir (politiques linguistiques en Tunisie, Libye et Maurétanie) ;
- intervenir négativement afin d’assurer la fin (La Charte de l’enseignement et
de la formation au Maroc).
(19) « Charte d’Agadir », 05/08/1991.
(20) « Charte d’Agadir », 05/08/1991.
(21) « Le manifeste amazigh », 1er mars 2000.
(22) Le manifeste amazigh, 1er mars 2000.
(23) J.-J. Rousseau, Du contrat social, Editions sociales, « Les classiques du
peuple », Paris, 1977, p.190.
(24) Pierre Vilar, Histoire de l’Espagne, PUF, « Que sais-je ? », Paris, 1947,
p.8
(25) Constitution malienne :
Préambule : « démocratie pluraliste », « laïcité de l’Etat ».
Article 2 : « Toute discrimination fondée sur l’origine sociale, la couleur, la
langue, la race, le sexe, la religion et l’opinion politique est prohibée. »
Article 25 : « le français est la langue d’expression officielle. La loi fixe
les modalités de promotion et d’officialisation des langues nationales. »
(26) J.-J. Rousseau, Du contrat social, Editions sociales, « Les classiques du
peuple », Paris, 1977, p.94)
(27) Constitution tunisienne :
Préambule : « fidèle aux enseignements de l’Islam, à l’unité du Grand Maghreb, à
son appartenance à la famille arabe. »,
Article 1 : « sa religion est l’Islam, sa langue l’arabe »,
Article 2 : « constitue une partie du Grand Maghreb Arabe, à l’unité duquel elle
œuvre dans le cadre de l’intérêt commun. »
Article 4 : « la devise de la République est : Liberté, Ordre, Justice »
Article 8 : « Un parti politique ne peut s’appuyer fondamentalement dans ses
principes, objectifs, activité ou programmes, sur une religion, une langue, une
race, un sexe ou une région. »
(28) Constitution marocaine :
Préambule : « Etat musulman, dont la langue officielle est l’arabe, constitue
une partie du Grand Maghreb Arabe.
(29) Constitution mauritanienne
Préambule : « Confiant dans la Toute Puissance d’ALLAH, le peuple mauritanien
proclame sa volonté de garantir l’intégrité de son Territoire, son Indépendance
et son Unité Nationale et d’assumer sa libre évolution politique, économique et
sociale.
Fort de ses valeurs spirituelles et du rayonnement de sa civilisation, il
proclame en outre, solennellement, son attachement à l’Islam et aux principes de
la démocratie tels qu’ils ont été définis par la Déclaration Universelle des
Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 et par la Charte Africaine des Droits de
l’Homme et des Peuples du 28 Juin 1981 ainsi que dans les autres conventions
internationales auxquelles la Mauritanie a souscrit.
Conscient de la nécessité de resserrer les liens avec les peuples frères, le
peuple mauritanien, peuple musulman, arabe et africain, proclame qu’il oeuvrera
à la réalisation de l’Unité du Grand Maghreb de la Nation Arabe et de l’Afrique
et à la consolidation de la paix dans le monde. »
Article 1 : « La Mauritanie est une République Islamique, indivisible,
démocratique et sociale.
La République assure à tous les citoyens sans distinction d’origine, de race, de
sexe ou de condition sociale, l’égalité devant la loi.
Toute propagande particulariste de caractère racial ou ethnique est punie par la
loi. »
Article 5 : « L’IsIam est la religion du peuple et de l’Etat. »
Article 6 : « Les langues nationales sont l’Arabe, le Poular, le Soninké et le
Wolof ; la langue officielle est l’Arabe. »
(30) Carles Castellanos, Llengua, dialectes i estandarditzacio, Octaedro,
Barcelona, 2000, p.111.
(31) Brian Street, Cross-Cultural Approaches to Literacy, CUP, 1993.
(32) cf. Louis-Jean Calvet, Linguistique et colonialisme, Paris, Payot, 1974.
(33) J.-J. Rousseau, Du contrat social, Editions sociales, « Les classiques du
peuple », Paris, 1977, p.58.
BIBLIOGRAPHIE
*Albert BASTARDAS I BOADIA, Ecologia de les llengües. Medi, contactes i dinamica
sociolinguistica, Proa, Barcelona, 1996.
*Ahmed BOUKOUS, Dominance et Différence, Editions Le Fennec, Casablanca, 1999.
*Carles CASTELLANOS, Llengua, dialectes i estandarditzacio, Octaedro, Barcelona,
2000.
*Louis-Jean CALVET, Linguistique et colonialisme, Paris, Payot, 1974.
-- La guerre des langues et les politiques linguistiques, Payot, Paris, 1987.
-- Les politiques linguistiques, Paris, PUF, 1996.
-- Pour une écologie des langues du monde, Plon, Paris, 1999
*Abdesselam CHEDDADI, Education et Culture au Maroc: le difficile passage à la
modernité, Editions le Fennec, Casablanca, 2003.
*COLLECTIF, “Aalam atarbiya”, revue de l’éducation et de l’enseignement numéro
sur “Ta3rib ata3lim wa almuhitt, fi intiddar alqarar”, (Arabisation de
l’enseignement et de l’environnement, en attendant la décision) n° 4, automne
1996.
*Jean-Pierre COT et Jean-Pierre MOUNIER, Pour une sociologie politique, Seuil,
1974.
*Ignace DALLE, Maroc 1961-1999, l’espérance brisée, Maisonneuve et Larose &
Tarik Editions, Paris, 2001.
*Pompeu FABRA, La llengua catalana i la seva normalitzacio, (recueil de textes
de 1906-1926), Edicions 62, Barcelona, 1980.
*Joshua FISHMAN, Sociolinguistique, Labor et Nathan, Bruxelles-Paris, 1971.
*G. GRANDGUILLAUME, Arabisation et politique linguistique au Maroc, Maisonneuve
et Larose, Paris, 1983.
*Einar HAUGEN, The Ecology of Language, Stanford University Press, 1972.
*Abdelkebir KHATIBI, Penser le Maghreb, Smer, Casablanca, 1993.
*Georg KREMNITZ, “Du bilinguisme au conflit linguistique, cheminement de termes
et de concept”, in Langages, n°63, Paris, 1981.
*Peter MÜHLHAUSLER, Linguistic Ecology, Routledge, London and New York, 1996.
* Daniel NORDMAN, Profils du Maghreb, Frontières, figures et territoires (XVIIIe
-XX siècle), Publications de la faculté des lettres et des sciences humaines de
Rabat, 1996
*J.-J. ROUSSEAU, Du contrat social, (1762), Editions sociales, « Les classiques
du peuple », Paris, 1977.
*Brian STREET, Cross-Cultural Approaches to Literacy, CUP, 1993.
*Pierre VILAR, Histoire de l’Espagne, PUF, « Que sais-je ? », Paris, 1947.
|