|
|
Rôle des langues maternelles dans le développement humain Par: Hassan LAAGUIR (Marrakech) La réussite de toute action de développement se base sur une communication efficiente qui peut être assurée avec le maximum de chances de succès par les langues maternelles et locales. Celles-ci facilitent la communication entre l’acteur de développement et la population cible, véhiculent les connaissances et les savoir-faire locaux, incitent la créativité et l’innovation, favorisent la participation effective des populations, encouragent l’implication de la femme -première détentrice des langues maternelles- et consolident ainsi la démocratie participative. De ce fait, nous affirmons que le rôle des langues maternelles dans le développement responsable est irremplaçable. Il est certain qu’on ne peut pas développer les sociétés par la seule démocratisation du marché linguistique, mais ne pas donner la place méritée aux langues maternelles bloque le processus de développement. La démocratie intimement liée au développement se fonde sur la liberté d’expression, le respect des droits collectifs et individuels et la promotion de la diversité. Au Maroc -où coexistent trois langues maternelles à savoir le tamazighet (langue autochtone) le darija et le hassani- la liberté de s’exprimer dans les langues maternelles a été toujours (et continue d’être) violée par l’interdiction de leur utilisation dans l’école, l’administration, les médias, les tribunaux, etc. et par l’obligation d’utiliser l’arabe classique, langue officielle par la Constitution, et le français, officiel dans la réalité. L’emploi dévalorisant de ces langues dans les médias officiels et leur exclusion de l’école constituent les causes directes du déficit permanent du système d’enseignement et de la stagnation sociale au Maroc. Cependant, malgré leur interdiction et marginalisation systématiques, les langues maternelles sont toujours suscitées et utilisées par les marocains pour combler les vides laissés par «les langues officielles» en matière de communication, information, éducation, etc. Tous les 21 février, le monde célèbre la Journée Internationale de la langue maternelle, lancée depuis 1999 par l’UNESCO afin de sensibiliser l’opinion publique à cette question. A cette occasion, nous affirmons que la résolution de la question des langues maternelles au Maroc est un moteur majeur de développement humain et le recours à ces langues dans tous les domaines (éducation, information et communication, administrations, etc.), est une des conditions indispensables pour la réussite du processus de développement endogène et durable de ce pays. Elles pourraient jouer un rôle déterminent dans la réalisation des objectifs de l’éducation pour tous, la lutte contre l’ignorance, le renforcement des capacités et des compétences des communautés à la base, l’inclusion sociale, la lutte contre la pauvreté, etc. L’efficacité de l’utilisation des langues maternelles dans la réalisation des objectifs de développement humain démontrée dans divers pays est la raison pour laquelle l’État marocain doit investir dans la promotion de ses langues sans aucune discrimination; car dans leurs états actuels –résultats d’un long siècle de marginalisation et d’interdiction- celles-ci ne peuvent pas faire face aux défis de la mondialisation ni jouer pleinement leur rôle dans le processus de développement qui ne saurait être réussi en n’utilisant que les langues étrangères à la société marocaine. En effet, pour corriger cette situation critique, la valorisation et la promotion des langues maternelles/nationales -porteuses des richesses culturelles, savoirs faire locaux, valeurs humaines, patrimoines, etc.- sont nécessaires pour un bon développement et à la garantie de la dignité à tous. Pour ce faire, la première action à mener est de convaincre les décideurs et les différents acteurs à l’importance des langues maternelles. Chose qui paraît un peu difficile face à l’idéologie d’uniformisation régnante. Continuons le combat!! (Marrakech, le 21 février 2008) |
|