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(Octobre  2004)

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بيان جمعية إفني

تعزية

 

l’aménagement linguistique

Par: Larbi Moumouch

A l’heure où la langue amazighe connaît un nouvelle essor et qu’il est nécessaire et urgent de l’aménager pour qu’elle puisse affronter les nouveaux défis, nous avons estimé qu’il est utile et intéressant, surtout pour les non initiés, de présenter les principes théoriques de l’aménagement linguistique à travers quelques expériences réussies dans ce domaine. D’où cette idée de faire profiter le lecteur de ces notes de lecture à partir d’un ouvrage collectif sur la norme linguistique. Nous les avons organisées sous forme de trois articles.

 

1—LA NORME LINGUISTIQUE

Qu’est-ce qu’une norme?

Le Dictionnaire de linguistique de Ducrot définit la norme comme étant «un système d’instructions définissant ce qui doit être choisi parmi les usages d’une langue donnée si l’on veut se conformer à un idéal esthétique ou socioculturel…» (p. 342), ce qui implique qu’il existe des usages prohibés. Selon ce dictionnaire, la grammaire normative distingue des niveaux de langues (cultivée, populaire…) parmi lesquelles elle définit une comme langue de prestige à imiter, à adopter, qui sera la «bonne langue», le «bon usage». Il importe de remarquer qu’il entre dans cette détermination pas seulement des raisons proprement linguistiques, mais des raisons socioculturelles.

Langue normalisée:

Ainsi la langue choisie sera dite «normalisée» quand «les usages de la langue ont été relativement stabilisés par les institutions sociales: en France, le français a été normalisé par l’effet de l’enseignement et l’influence des mass média» ( p. 342 )

Langue standard:

On parle de langue standard «quand dans un pays donné, au-delà des variations locales ou sociales, elle s’impose au point d’être employée couramment, comme le meilleur moyen de communication, par des gens susceptibles d’utiliser d’autres formes ou dialectes».

C’est en général une langue écrite, normalisée et soumise à des institutions qui la régentent, diffusée par l’école, par la radio, et utilisée dans des relations officielles. La langue standard tend à supprimer les écarts (prononciation, lexique, syntaxe…) en imposant une forme unique entre toutes les formes dialectales.

Après la définition  de ces concepts fondamentaux, nous présenterons les différentes étapes du processus de normalisation linguistique, à travers le modèle chèque.

La situation historique du tchèque:

L’étude de l’évolution du tchèque standard est intéressante parce qu’elle peut inspirer les pays qui sont confrontés aux questions de la langue nationale et qu’elle favorise aussi l’intégration de la linguistique dans la vie culturelle d’une nation.

Le tchèque standard  est une forme linguistique récente. En effet, si elle n’a été stabilisée qu’en 1880,  cette langue ne remonte qu’aux  XIV et XVI siècles. Après la défaite du peuple tchèque dans la guerre de 30 ans, entre 1618 et 1648, l’activité intellectuelle et littéraire a été rompue. L’interdiction des œuvres classiques et protestantes a précipité le déclin de la culture nationale et l’élimination de la langue tchèque de la sphère publique. D’autant plus qu’elle subit la concurrence et l’influence des langues européennes comme l’espagnol, le français, l’allemand.

Une ère nouvelle s’annonce avec au XVIII siècle l’éveil national, le changement des conditions sociopolitiques et s’accompagne d’une prise de conscience identitaire et d’un sentiment nationaliste très forts. Ainsi les tchèques, pour reconstituer leur état indépendant en 1916, ont d’abord tenté de redresser leur langue presque oubliée, la langue étant socle, un unificateur et un symbole identitaire.

Ce sentiment fort les a poussés à retrouver la langue d’origine, épurée de toute influence étrangère, ce qui signifie faire la chasse aux emprunts imposés auparavant par les langues dominantes. Ce purisme excessif a d’ailleurs été critiqué par Roman Jakobson, qui souligne que «la linguistique historique nous enseigne au contraire qu’une grande langue de civilisation subit toujours une certaine forme d’hybridation; elle se développe au contact d’autre langues de civilisation, enrichissant ainsi ses ressources expressives.» (Le purisme tchèque d’aujourd’hui,1932 )

Pourtant c’est pour résoudre les problèmes de codification que les tchèques sont retournés aux sources de la langue tchèque et ont pratiqué le purisme à grande échelle.

Ce dernier s’est implanté par l’entremise du système éducatif (auteurs de manuels de grammaire et d’orthographe) et par les publications culturelles. Le but de cette renaissance linguistique est de fournir un véhicule de création littéraire, un outil d’expression scientifique, philosophique et juridique, c’est-à-dire un outil pour exprimer la vie intellectuelle. C’est pour cela qu’il faut accroître les ressources de la langue, du point de vue terminologique, grammatical et stylistique.

L’apport des linguistes:

Il importe de noter ici que la spécificité du cas tchèque est la participation étroite des linguistes à la promotion, à la description et à la codification de la langue littéraire. Leur apport est axé sur la promotion et l’élaboration de la nouvelle langue littéraire et l’enrichissement et la codification de la langue.

La création dans les années 20 de L’École de Prague a beaucoup contribué à l’évolution de la langue littéraire en adoptant la méthode structuraliste dans la description scientifique et objective de la langue. Mais c’est le Cercle linguistique de Prague qui a marqué le plus l’évolution de la langue tchèque, avec la publication de leur ouvrage le tchèque standard et la culture de la langue en 1932. les principes théoriques de ce cercle, qui regroupe les linguistes B. Havrànek, R. Jakobson, V.Mathesius, J. Mukàrovsky, M Weingart, ont influencé le travail de codification de la langue car ont tenu compte du principe que la norme de la langue standard doit être basée sur l’usage en vigueur chez les bons auteurs contemporains (des 50 dernières années), comme ils ont marqué l’enseignement de la langue maternelle et l’élaboration de des nouvelles éditions des manuels officiels de grammaire et d’orthographe.

Les principes du cercle de Prague:

a-la description scientifique et objective de la langue: qui consiste à analyser le système linguistique et la situation sociale dans laquelle la langue est employée, loi de tout purisme qui puise ses racines dans un nationalisme romantique.

b-La codification de la langue doit reposer, non sur une notion romantique de pureté de la langue basée surtout sur la continuité historique et l’élimination des emprunts, mais sur l’observation  réaliste de l’usage qu’en font les meilleurs auteurs.  

Il s’ensuit que la langue littéraire s’oppose au parler populaire et à ses dialectes régionaux. Cette différence est surtout fonctionnelle puisque les fonctions et les usages sociaux de la langue littéraire sont plus importants et plus étendus. Quels sont donc les caractéristiques structurales qui permettent à la langue littéraire de remplir ses rôles? et quel est le rôle du linguiste en ce qui concerne les moyens de cultiver ces caractéristiques?

Les caractéristiques de la langue:

Les linguistes du cercle de Prague ont développé deux caractéristiques:

1-La stabilité flexible :

 Le rôle culturel et éducatif de la langue littéraire repose sur une structure stable, du point de vue des règles grammaticales et orthographiques. La langue littéraire doit servir de référence à la variation dialectale et aux variations individuelles du langage populaire. Cette stabilité est obtenue par la codification de la langue standard. Elle doit être non pas rigide mais assez flexible pour assimiler les changements engendrés par la vie moderne.

La codification suppose deux étapes :

a- l’élaboration d’une norme codifiée appliquée au moyen des manuels officiels de grammaire et d’orthographe ainsi que des dictionnaires normatifs. Elle doit relever d’un organisme de codification du type académique de la langue ou organisme gouvernemental ou de la responsabilité du ministère de l’éducation nationale

b- la mise sur pied d’un organisme d’application de la norme au moyen d’un mécanisme de contrôle des habitudes linguistiques et littéraires. Cette mise en application peut être assurée par le système d’éducation.

Pour être flexible, la norme doit prévoir l’intégration des instruments nécessaires à sa modification et à son enrichissement, dont il faut créer les mécanismes capables d’enrichir le vocabulaire et d’ajouter des procédées syntaxiques et stylistiques.

2- L’intellectualisation de la langue:

Elle concerne l’adaptation de la langue littéraire et permet de s’exprimer de façon exacte, rigoureuse et abstraite. Cette tendance se reflète dans la structure lexicale de la langue par l’évolution des terminologies spécialisées et dans sa structure grammaticale par la formation de mécanismes syntaxiques permettant de construire des phrases complexes et logiquement structurées. Ainsi l’intellectualisation permet et assure le développement d’une nécessaire diversité de variétés et de styles fonctionnelles, littéraires ou scientifiques. Bref, elle représente une tendance vers une expression plus systématique et explicite, correspondant à un contenu plus varié, plus complexe, plus abstrait et plus perfectionné.

La culture de la langue et le rôle des linguistes:

a-Les moyens de cultiver la langues:

Pour les linguistes du Cercle de Prague, la base de la culture de la langue réside dans la connaissance scientifique de la norme réelle de la langue littéraire. La norme réelle se trouve dans la pratique littéraire et intellectuelle de la génération actuelle et de celle qui l’a immédiatement précédée. La norme fictive réside dans les idées romantiques des puristes.

Il est important de distinguer les notions suivantes.

* L’usage: il indique seulement l’emploi habituel d’une langue sans égard au fait que ce soit correct ou incorrect, propre ou impropre.

* La norme: elle implique, en plus, un élément de conformité à des règles établies. La norme de langue standard est l’ensemble des règles ayant une existence objective et provenant de la compréhension mutuelle d’une collectivité, et qui sont perçues et  acceptées comme obligatoire dans l’usage collectif des locuteurs d’une langue donnée.

* La codification: c’est l’enregistrement et la régularisation de la norme dans les manuels, les grammaires, les dictionnaires etc.… par une autorité reconnue. En même temps elle aide à unifier et à stabiliser la norme qui bien des fois est soumise à des oscillations.  Elle ne doit pourtant pas la freiner jusqu’au point d’empêcher le développement souple dont une langue standard a besoin. Une codification peut refléter bien ou mal la norme existante. Alors que la norme subit des changements continuels, la codification, elle, ne les subit qu’à des intervalles plus grands et avec un certain retard. Il est donc nécessaire de différencier ces deux termes.

b-Le rôle des linguistes                                                                                                                                                                  

 Ils participent à la codification de la langue tant en matière d’orthographe que de grammaire. Pour la correction grammaticale, Karel Mausenblas affirme qu’il y a «deux critères principaux pour sa détermination. Le premier, c’est la bonne formation d’un élément linguistique, c’est le degré auquel sa formation et son usage coïncident avec les règles qui régissent la langue. Le deuxième, c’est la justification fonctionnelle (efficacité)» (de la culture de la langue, in le tchèque pour les tchèques, Prague, 1960)

Le travail linguistique doit contribuer à la différenciation fonctionnelle et à l’enrichissement stylistique de la langue littéraire. Cette contribution peut prendre la forme de collaboration à la création de ressources terminologiques et stylistiques pour les divers modes d’ex pression littéraire, journalistique, technique, administratif et autres. Elle peut aussi avoir la forme d’une critique réaliste de l’emploi de la langue littéraire dans les divers contextes où elle est utilisée. Il s’agit de vérifier si elle remplit ses rôles avec efficacité.

La contribution des linguistes tchèques à l’évolution de la langue standard est intéressant aux points de vue théorique et pratique: les linguistes pragois ont pris part au processus officiel de le codification de la langue standard et à mettre en application leurs idées principales, mais aussi à la direction de l’Institut de la langue tchèque de l’académie des sciences de Tchécoslovaquie, qui s’est chargé des questions de codification de la langue tchèque standard, de la publication de manuels pertinents pour l’usage des écoles et du grand public et de la publication des revues littéraires.

Références utiles :

1.Hausenblas, Karl (1960), De la culture de la langue, in le tchèque pour les tchèques, Prague, Orbis.

2. Havranek, Bahuslav (1942), De la stratification fonctionnelle de la langue, in Revue de philosophie moderne, n 28.

3. Havranek et M. Weingart (1947), Le tchèque standard et la culture de la langue.

4. Mathesius (1948), Le tchèque et la linguistique générale, Prague.

2 -THÈSES GÉNÉRALES DU CERCLE LINGUISTIQUE DE PRAGUE

PRINCIPES POUR LA CULTURE DE LA LANGUE

La culture de la langue signifie le développement conscient de la langue, assuré par les travaux linguistiques théoriques, l’enseignement de la langue à l’école et par la pratique littéraire. les travaux linguistiques théoriques aident la langue standard à remplir ses fonctions, en contribuant à la stabilité de la langue standard, à sa capacité de différenciation fonctionnelle et à son enrichissement stylistique.

1- Le développement de la langue standard nécessite une compréhension théorique de sa norme réelle. Cette compréhension doit s’appuyer sur la pratique littéraire: voir les éléments qui sont passés dans la langue standard, ceux éliminés, ceux flottant entre langue littéraire et langue populaire, d’autres archaïques. Dans la langue poétique, les éléments automatisées serviront de fondement à la norme, distingués des éléments actualisés (distorsions de la norme), de l’utilisation structurale des langues fonctionnelles et locales, des dialectes. Tous ces éléments distingués peuvent finir avec le temps par passer dans la norme de la langue standard. Pour y arriver, il faut mener un travail systématique et planifié sous forme de manuels pratique et de monographies portant sur des aspects linguistiques clés.

2- La stabilisation da la langue standard ne se produit pas sans les interventions théoriques normatives dans le domaine de l’orthographe, de la structure grammaticale (phonologie, morphologie, syntaxe) et de la structure et du contenu lexicaux. Ces interventions sont soumises aux  principes suivants:

* favoriser la stabilité da la langue standard,

* permettre une stabilisation fondée sur:

- le but (point de vue fonctionnel)

- le goût du temps (point de vue esthétique)

- L’état réel de la langue standard contemporaine (point de vue synchronique)

*ne pas approfondir artificiellement les différences dans la structure grammaticale propre au discours familier et à la langue des livres,

* ne pas éliminer les doublets grammaticaux et lexicaux (synonymie grammaticale et lexicale) pour deux raisons: d’abord la stabilité de la L.S. ne doit pas entraîner l’élimination de la diversité fonctionnelle et stylistique; puis, elle ne doit pas la priver des moyens de différenciation stylistique.

2-1- La codification de l’orthographe suppose:

a- un système orthographique à tendance phonologique et non phonétique, sans pour autan négliger l’utilisation morphologique différentielle de la phonologie. Ce système doit être étudié soigneusement ainsi que tout changement proposé, du point de vue de sa validité théorique et de son utilité pratique.

b- son application détaillée au mot, elle doit être claire, simple et cohérente.

Sur la base de la structure phonologique du mot, et le besoin de différenciation morphologique et les raisons historiques sont à éviter.

2-2- La stabilisation de la prononciation standard relève de l’orthophonie, c’est-à-dire la prononciation intellectuelle et non dialectale ou populaire. Elle doit tenir compte de l’aspect esthétique ( l’euphonie) pour orienter vers une lecture et une diction meilleures, qui seront investies et véhiculées à travers la radio, le théâtre et la poésie.

2-3- la stabilisation de la structure grammaticale par la compréhension de la norme réelle et par sa codification. Celle-ci doit tenir compte de l’évolution de la langue (les doublets…), tout en réduisant l’écart entre la langue littéraire et la langue parlée.  Elle touche la phonologie, la morphologie (description synchronique et analyse de la situation réelle en vue de montrer sa structure actuelle et réduire les archaïsmes) et la syntaxe (maintien des doublets syntaxiques, création des mécanismes syntaxiques spéciaux par lesquels la langue littéraire diffère du discours familier

2-4- la stabilisation du vocabulaire porte sur l’aspect formel et sémantique. Elle consiste à créer des terminologies spécifiques, tenir compte de la différenciation fonctionnelle, évaluer les néologismes en fonction de leur conformité formelle et sémantique avec le fonds lexical, de leur valeur fonctionnelle et des besoins de la communauté. Signalons que la collecte du lexique en usage est primordial, avant de passer à la création néologique, qui exige le respect de la structure et des schèmes lexicaux et la précision et l’univocité dans certains domaines, scientifique et juridique notamment. De même qu’une nuanciation de certains termes proches.

2-5- la diffusion de la norme et sa compréhension par d’autres personnes : la théorie linguistique peut assurer le rôle de critique, en comparant la langue de certains travaux à la norme établie de façon théorique et en signalant, parmi les différences, les différences dialectales, les archaïsmes et les barbarismes, les néologismes, les erreurs de théorisation.

3- La théorie linguistique peut aussi contribuer à la différenciation fonctionnelle et à l’enrichissement stylistique de la langue standard. Pour ce, la langue standard a besoin de moyens d’expression riches et fonctionnellement différenciés, surtout le lexique et la syntaxe, et de l’exploitation efficace de ses moyens.

Cet aménagement linguistique  implique des changements considérables dans la langue et suscite par conséquent des réactions parfois passionnées, certaines hésitations et peurs, rigidité et inertie. Car intellectualiser la langue signifie créer des termes techniques, sémantiquement abstraits qui sembleraient étrangers aux locuteurs ordinaires.

Le pendant sociopolitique

Répondant à une prise de conscience identitaire, à un désir d’autonomie, à une volonté de modernisation, la langue, affirme Joshua A. Fishman, est un symbole de la nationalité, du peuple, de ses souffrances, de sa destinée, de sa grandeur, de ses triomphes (…). C’est pourquoi, planifier le langage, c’est planifier la vie du peuple; cultiver le langage, le préserver, l’améliorer, c’est également cultiver, protéger et améliorer le peuple. Ce qui revient à dire que la normalisation et la standardisation ont une motivation politique et exigent aussi la mise en place des conditions politiques et sociales favorables répondant aux nouvelles aspirations de la communauté en question.

Si la norme s’implante avec le plus de succès dans les publications entièrement sous la coupe des normalisateurs ou planificateurs-linguistes, elle a besoin de l’école pour être diffusée et implantée. Mais, selon Fishman toujours, il y a d’autres systèmes sociaux ou de valeurs plus puissants: le parti, l’économie, l’armée, l’église…

 

3 -LA NORMALISATION LINGUISTIQUE OFFICIELLE: EXEMPLE DU QUÉBEC

Le Québec dispose d’une intéressante tradition en matière de normalisation dont on peut s’inspirer pour contribuer à l’aménagement de la langue amazighe. Cet article en exposera les principes, les structures de travail, les valeurs psychosociales à prendre en considération et quelques aspects linguistiques inévitables

Organismes:

- Bureau de normalisation du Québec (BNQ)

- Association française de normalisation (AFNOR)

Domaines d’intervention:

La normalisation des terminologies et de la langue générale par l’Office de la langue française (comprend commissions sectorielles et commission centrale), auquel la législation lui confie, par le biais de la charte de la langue française, le mandat de normaliser les terminologies et d’établir une norme québécoise relative à l’usage du français dans les communications officielles et institutionnelles.

La normalisation toponymique: noms de lieux, des génériques toponymes (rue, place,…); elle relève du travail de la commission de toponymie, en concertation avec la commission de terminologie. L’OLF intervient en cas de litige.

La normalisation linguistique officielle:

En 1973 l’OLF  y a consacré  un colloque international de terminologie, dont les objectifs sont:

a- améliorer la qualité du français, langue de travail, en collaboration avec les spécialistes de différents domaines d’activités,

b- répondre aux besoins exprimés par les usagers, dont il faut tenir compte pour diffuser et faire accepter les actes de normalisation,

c- atteindre toutes les couches de la population.

Normalisation, recommandation et harmonisation:

a- la normalisation:

elle est officielle et relève d’un organisme d’état

a- elle ne touche qu’une langue, le français

b- elle intervient sur les langues de spécialité plus que sur la langue générale, et sur la composante lexicale

c- elle se fonde sur les principes de la bi-univocité du terme et, ne cautionne pas la synonymie en terminologie

b- la recommandation:

d- elle est officielle mais pas coercitive: les termes recommandés ne sont pas obligatoires

e- elle accorde place à la synonymie et porte sur les éléments linguistiques non spécialisés comme sur la terminologie

f- les termes recommandés à un moment peuvent devenir normalisés

c-L’harmonisation:

Elle utilise les mêmes méthodes de travail que la normalisation: l’étude des dossiers terminologiques  est confiée à des comités de spécialistes des domaines traités. Leurs travaux reçoivent l’aval du normalisateur. Elle se pratique dans les entreprises privées ou parapubliques. Son but est d’uniformiser la terminologie en usage dans l’entreprise et la mettre à la disposition des usagers sous forme de lexique. Elle peut regrouper les pouvoirs publics, les entreprises et d’autres organismes ou associations.

Les valeurs psychosociales:

Le Québec est un cas particulier, c’est l’état qui légifère pour protéger son territoire contre l’érosion linguistique provenant du contact avec d’autres langues et contre l’acculturation et l’aliénation culturelle et linguistique qui tend vers la folklorisation.

La normalisation doit tenir compte:

-des usagers

-du degré de spécialisation ou de rapprochement des termes avec les mots du langage courant.

-du degré d’ancrage  des termes dans l’usage (possibilité de résistance)

-de la capacité d’intégrer les emprunts

-de la tendance à accepter le calque, favorisé par les contacts linguistiques et la traduction.

Les motifs ayant poussé à opter pour:

a-la normalisation :

-modifier de façon massive des habitudes langagières ancrées dans l’usage,

-confirmer la qualité des termes dont la forme linguistique éveille des doutes chez les usagers,

-ordonner un ensemble de termes dans un domaines technique en vue de modifier certains usages de l’administration,

-uniformiser une terminologie en usage dans des opérations commerciales et en vue de l’aligner sur un usage international,

-établir des règles d’affichage toponymique

-éliminer la synonymie inutile dans les langues de spécialité.

b-la recommandation:

-ne pas heurter les habitudes langagières ,

-orienter l’usage jusqu’à ce qu’il se fixe,

-laisser coexister les synonymes jusqu’à ce que l’un s’impose,

-donner un certain poids à des lexiques thématiques: habillement…

les actes de normalisation et recommandation portent à la fois sur les termes et les définitions qui les accompagnent. Quant aux dossiers terminologiques, ils sont versés à la Banque de Terminologie du Québec.

Aspects linguistiques: traitement du calque et de l’emprunt

Définitions:

L’emprunt: le passage, d’une langue à une autre, d’une forme linguistique ou d’une  structure morphologique ou syntaxique; ou l’addition, à un tel signifiant dans une langue d’un signifié associé à une autre langue.

Le calque: est une variété d’emprunt obtenu par traduction littérale ou intériorisé par l’usager suite au contact avec une ou d’autres langues.

Certains calques et emprunts, inutiles, peuvent être remplacés par des mots et expressions propres à la langue en recourant à ses ressources. D’autres seront adaptés et acceptés pour enrichir les capacités stylistiques de la langue.

Néologie et néonymie:

La néologie est la création de nouvelles unités lexicales et sémantiques à partir des mots ou racines déjà existantes, en vue de dénoter ou nommer des réalités nouvelles (techniques, conceptuelles). La néonymie est une néologie lexicale spécialisée.

Le travail néologique est soumis à des conditions:

a- le traitement préalable qui comporte:

 -le repérage et la collecte:  former des réseaux de groupe de travail et  définir la méthode (descriptive): 1- relever, dans les publications récentes et spécialisées d’un secteur donné, tous les éléments perçus comme néonymiques 2- vérifier, dans des ouvrages lexicographiques généraux et spécialisés, de la présence ou de l’absence de ces unités linguistiques 3-celles non codifiées dans ces ouvrages sont considérées comme néonymiques et publiées sous forme de vocabulaire.

 - la création néonymique: elle se fait à la suite d’une demande, d’un besoin de la recherche terminologique et thématique. Elle est le fait de terminologues, de spécialistes des divers milieux: administration publique, entreprises, institutions d’enseignement. Mais la concertation s’étend aussi à la francophonie.

b- le choix des unités linguistiques auxquelles s’appliques l’intervention du normalisateur: les néonymes de création régionale, les synonymes, les néonymes incompatibles…

En somme, la normalisation linguistique au Québec se caractérise par quatre formes différentes et complémentaires: la normalisation par incitation, non officielle, la normalisation, la recommandation et l’harmonisation. Elle a été menée avec souplesse, doigté, modération, en respectant les valeurs socioculturelles, politiques et historiques du Québec, et en concertation avec tous les intervenants et avec la communauté francophone.

 

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