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Le mouvement culturel amazigh entre mythe et réalité. Par: Oulghazi Hsaine. Pour ne pas oublier de le dire, le congrès mondial amazigh, (Agraw Amadal Amazigh) est déterminé à poursuivre à juste titre le combat pacifique pour la restauration des droits identitaire, linguistique, historique et culturel du peuple amazigh. En effet, à Tafira ‘Iles Canaries’, du 27 au 31 /08/1997 eu lieu une assemblée générale à laquelle ont assisté plusieurs personnes entre délégués d’association, universitaires, artistes et plusieurs invités des pays de Tamazgha, d’Europe, d’Amérique du nord et une forte délégation canarienne. Les invités qui n’ont pas pu assister à ce congrès ont envoyé des lettres de remerciement et de soutien aux congressistes. L’assemblée générale a mis en place des commissions pour traiter le bilan et la perspective de cette rencontre: l’enseignement, la langue, la culture, l’identité, l’histoire, la civilisation etc. Ces commissions ont réfléchi sur un certain nombre de points très importants, elles ont élaboré des propositions sous forme d’un rapport qui relate notamment les questions suivantes: -Enseigner et promouvoir la langue tamazight. -Sauvegarder et développer la culture amazighe. -Renforcer l’identité. -Développer la personnalité sociale. -Favoriser la communication entre tous Imazighen. -Introduire d’urgence les cours de civilisation et d’histoire Amazighes dans le programme scolaire. -Prôner un enseignement généralisé et obligatoire de la langue tamazight, de la maternelle au supérieur et de l’île de Siwa aux îles Canaries (Tamazgha). -Former une académie amazighe pour la recherche et le développement de la langue. -Standardiser tamazight et encourager son écriture et sa diffusion. -Créer des espaces culturels ouverts sur les arts, la littérature et la musique. -Sauvegarder le patrimoine culturel amazigh (Architecture, art, musique danse, costume etc.) -Créer une commission pour standardiser Tifinagh. -Créer une Radio amazighe à l’échelon mondial. -Créer une carte d’identité amazighe. -Développer des relations avec d’autres peuples et cultures. -Soutenir les revendications du peuple amazigh. -Créer une instance permanente chargée des relations internationales et des droits de l’homme. -Promouvoir la production et la distribution des moyens de communication au profit de la cause amazighe. -Préserver les sites archéologiques, l’aspect architectural et l’équilibre écologique. -Protéger par les moyens juridiques l’utilisation anarchique des noms, des procédés et des inventions des imazighen. Les enregistrer, notamment, en tant que propriété intellectuelle ou industrielle de notre peuple. -Encourager la recherche archéologique qui pourrait aider et éclairer le peuple amazigh sur son histoire. -Exiger la liberté de créer les associations culturelles légales notamment en Libye. -Exiger la liberté d’expression, d’édition et de presse. Dans le cadre du droit international, le CMA apporte systématiquement son soutien à la lutte pacifique et légitime amazighe et proclame la journée du 20 avril: journée du printemps amazigh (Tafsut n’Imazighen). Désormais, Imazighen commémorent légalement cette date marquant un événement très important dans leur histoire. Mais imazighen ne sont pas toujours libres sur leur terre! Les militants de Tizi ouzou ont manifesté le 11 mars 1980. Les banderoles proclamaient: «Culture berbère: culture populaire ». « Halte à la pression culturelle ». « Abas la répression »! Les slogans en Kabyle étaient: « Tamazight tamaslayt nnegh», Tamazight est notre langue. « n nerrez wula an neknw », nous briserons mais nous ne plierons pas. « aaya di lbatel ! , nous en avons marre de l’injustice. Le 07 avril 1980, sur les voies de communication qui étaient soigneusement filtrées, de véritables barrages ont été installés. Tous les jeunes porteurs de pièce d’identité de Tizi Ouzou sont intimidés, stoppés ou même refoulés et plusieurs interpellations ont été observées. Le 20 avril 1980 qui coïncide au printemps amazigh, plusieurs compagnies d’agents de forces de l’ordre ont donné assaut et ont violemment pénétré dans les chambres de la cité universitaire, elles ont porté plusieurs atteintes à la liberté des manifestations culturelles et la presse officielle n’a donné aucune information. Pour vivre en avril 2001 «le printemps noir». Est-elle encore la loi de Hammourabi? Les Touaregs eux aussi, de l’indifférence du colonialisme français à l’extrême marginalisme en période de l’indépendance, vivent des moments difficiles. Malheureusement, au Maroc, en décembre 2003 les étudiants de l’université Imteghren à Errachidia, ont été indûment agressés par leurs collègues arabophones acariâtres, étudiants du même établissement universitaire. La souffrance de leurs blessures n’est pas encore oubliée; le 21 avril 2004 les forces de l’ordre ont violenté la liberté publique à l’université Ibn Zohr d’Agadir, en réprimant le mouvement culturel amazigh qui a organisé deux journées culturelles pour commémorer ‘’Tafsut n’Imazighen’’ du 20 avril. Cette répression intolérante vise en particulier à rompre l’unité du peuple amazigh à travers l’étendu de son territoire, Tamazgha. Plusieurs associations culturelles ont dénoncé cette intervention farouche et déclarent leur soutien inconditionnel aux militants séquestrés ou arbitrairement interrogés par les forces de l’ordre. Le devoir de respecter le droit à la liberté pour nos étudiants qui, par leurs esprits nationaliste, s’adhérent aux rangs du mouvement culturel amazigh et luttent pour notre identité nationale s’impose aussitôt à travers toutes les universités du pays. Si vraiment le discours officiel commence à affecter un sentiment noble. Mais «bien dire ne dispense pas toujours de bien faire » dit-on. S’agit-il donc des victimes d’un combat intellectuel, culturel ou simplement d’un combat injuste? Par qui et Quand le droit des libertés publiques sera respecté? Si le doit des libertés publiques stimule l’égalité de toutes les personnes devant la loi et leurs droits à une égale protection de la loi; à cet égard la loi doit interdire toute discrimination et garantir à toutes les personnes une protection égale et efficace contre toute discrimination, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique etc. Dans ce cadre, le peuple amazigh a le droit pour commémorer fièrement et légalement le Jour de l’an amazigh «Asggas amazigh» comme il a le droit de fêter le printemps amazigh «Tafsut n’Imazighen». Si les forces de l’ordre ont, simultanément, le droit et le devoir de maintenir l’ordre et la sécurité publique, en revanche, elles doivent respecter la loi et surtout doivent cesser d’opprimer et agresser les personnes qui luttent légitimement pour le droit culturel, identitaire et linguistique. Si le droit marocain en liberté publique précise que dans les états où il existe des minorités ethniques, religieuse ou linguistique, les personnes appartenant à ces minorités ne peuvent être privées du droit d’avoir, en commun avec les autres membres de leur groupe, leur propre vie culturelle, de professer, de pratiquer leur propre religion et d’employer leur propre langue; il faut dire aussi que le peuple amazigh n’est pas une minorité, il constitue la majorité du peuple. La langue Tamazight constitue la langue de tous les marocains et encore la langue des imazighen dans les pays de Tamazgha et la diaspora. Au contraire des arabes, Imazighen pratiquent à l’unanimité la religion musulmane, et tous les arabes ne sont pas des musulmans et tous les musulmans ne sont non plus des arabes. Si Imazighen parlent tamazight, ils parlent aussi bien l’arabe, le français, l’anglais, l’espagnol etc. Et ceux qui qualifient une langue comme ‘‘sacrée’’ transgressent purement et simplement les préceptes du coran. Il est incontestable que le sacré coran a reconnu toutes les langues: voir le verset qui précise que toutes les langues sont identiques; pour échapper à l’erreur, je ne peux pas le traduire, il faut donc un traducteur habilité. En effet, ni la loi, ni le coran n’ont jamais interdit aux peuples de revendiquer leurs droits linguistique, identitaire et culturel. Est-il donc admissible de priver Imazighen de leurs droits? Détenir arbitrairement, séquestrer, torturer ou interroger un militant pour ses idées identitaires, culturelles, linguistiques ou pour avoir défendu sa dignité est-il pardonnable? N’est-il pas inique de frustrer les peuples de leurs droits légitimes? Eh bien, pour accomplir le devoir religieux, loin de tout fanatisme qui cherche à écarter Tamazight ou d’autres langues, les arabes devraient fidèlement traduire le coran à toutes les langues du monde pour une large diffusion et doivent faire connaître ses principes à un vaste public. Aussi, le devoir national préconise pour tous les citoyens le respect mutuel et la prise en considération du multilinguisme et de la diversité culturelle. Car l’amour exclusif de soi ne rime à rien, Balzac disait: «L’égoïsme est un poison de l’amitié». Pour parer à toute fâcheuse éventualité il s’avère donc très utile de se doter d’un esprit large et tolérant, vider le discours politique de toute haine, prêcher l’égalité des hommes et des nations et surtout rectifier l’image de notre amazighité auprès du peuple. Le double langage de la classe politique permet de relever des confusions volontaires d’où la nécessité absolue d’un dialogue rationnel qui vise à louer l’intérêt général de toutes les couches sociales du pays. Décidément, le peuple marocain n’a pas besoin du bavardage vide, il demande la reconnaissance constitutionnelle immédiate de tamazight en tant que langue nationale et officielle au Maroc. Le peule marocain exprime son regret à l’égard de la position de l’abdication de l’État marocain de sa propre amazighité. Le peuple marocain qui a mené vaillamment des combats acharnés pour la liberté du pays, qui défend pour toujours son intégrité territoriale et qui vaque ses occupations au service d’un développement global et durable, adjure les hauts responsables à inaugurer le fait historique d’une importance capitale, déjà très en retard: la constitutionnalisation de Tamazight, et ce, pour éclaircir le chemin vers un devenir meilleur. Dans le cadre de la souveraineté nationale, il faudrait proscrire les objections omises à l’égard de notre langue enracinée dans l’histoire depuis plusieurs millénaires. En dépit de la distance qui sépare la théorie politique de la réalité, le mouvement culturel amazigh continue à revendiquer la reconnaissance juridique de Tamazight. Plusieurs chercheurs se préoccupent de la situation sociolinguistique du Maroc, cette situation est caractérisée par un multilinguisme marqué par plusieurs questions dont la réponse déterminera le profil du paysage linguistique marocain. Si on constate clairement que depuis l’indépendance du Maroc, la gestion politique s’intéresse exclusivement au problème de l’arabisation, il faudrait aussitôt une approche politique cohérente et explicite qui s’intéressera prioritairement aux différents problèmes du multilinguisme. L’allégation des partis politiques qui ne cessent de mettre en cause la lutte du marché linguistique marocain (l’arabisme, l’islamisme, l’amazighité et la francophonie) n’est pas fondée sur des bases solides. Le mouvement culturel amazigh demande la reconnaissance constitutionnelle de Tamazight en tant que langue nationale officielle, au côté de l’arabe. L’islamisme n’est pas une langue, il concerne tous les marocains. Le français est une langue vivante, pour les obligations rigoureusement scientifiques et pour communiquer avec d’autres peuples et d’autres cultures, nous devons le maîtriser au même titre que l’anglais, l’espagnol, l’allemand etc. Le multilinguisme est une réalité universelle, les langues en général sont un bien public elles doivent être préservées et développées. Dans le cadre d’une gestion raisonnable des affaires générales, le devoir de reconnaître juridiquement les revendications (linguistique, identitaire et culturelle) du mouvement culturel amazigh s’impose. Les autorités politiques et administratives du pays doivent prendre les dispositions nécessaires pour concrétiser cette réalité.
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