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Le dictateur en disgrâce Par: Anarouz SAADANI - Khénifra
Mercredi 04 mars 2009, la Cour Pénale Internationale a émis un mandat d’arrêt contre le président soudanais Omar El-bachir pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Le crime de génocide ne figure pas dans ce mandat d’arrêt; la CPI a estimé que le dictateur soudanais n’a pas agi «dans l’intention spécifique de détruire les groupes ethniques (darfour, zaghawa et massalit) visées par sa machine de destruction massive». Omar El-bachir qui a fait une carrière militaire aux influences islamistes est à la tête du Soudan depuis le 30 juin 1989 lorsqu’il a renversé le gouvernement de Sadiq Al-mahdi à la faveur d’un coup d’Etat appuyé par le parti islamiste de Hassan Tourabi. Depuis deux décennies, le dictateur sème la terreur et transforme le Soudan en un espace de carnage où triomphe la mort pour se conformer aux dogmes de la nation arabe. Ce sont ses exploits génocidaires pour islamiser et arabiser le Soudan qui le couvrent aujourd’hui de gloire dans certains milieux arabique et islamique et lui valent un mandat d’arrêt de la Cour Pénale Internationale. La solidarité arabo-musulmane n’a pas tardé à se manifester. Les pays arabes et certains pays musulmans qui tournent dans leur l’orbite ont immédiatement apporté leur soutien au dictateur calomnié. Même les oulémas qui prétendent être les directeurs de conscience de leur Oumma n’ont pas manqué au devoir de venir en aide à la barbarie de leur «frère» et même la chaîne arabiste Al-jazira qui prétend être le porte-parole des déshérités de la planète n’a pas manqué à l’appel de la dictature. Je ne serai pas étonné si des organismes de soutien au dictateur soudanais se créent au Maroc. Le mandat d’arrêt de la CPI a permis de mettre à nu la mentalité arabo-musulmane qui naturalise sa monstruosité et légitime ses crimes lorsqu’ils sont commis pour étendre son espace d’influence. Le drame du Darfour qui choque la conscience de l’humanité toute entière est passé sous silence. Ni l’Union des Oulémas des Musulmans présidé par Al-qaradaoui ni Al-jazira ni aucun organe pro ou non gouvernemental n’ont été scandalisés par les atrocités perpétrées par les Forces Populaires du Soudan et les milices progouvernementales (janjawid) au Darfour. Ces bandes criminelles ont été déployées pour combattre ceux que le régime salafiste soudanais considère comme des «infidèles» méritant les châtiments du dictateur avant ceux d’Allah. Les arabes ont vu dans ce mandat d’arrêt une conspiration venue de l’extérieur et vise la chute du dictateur et de la foi musulmane. Ils ne cessent de faire couler des rivières d’encre et de remplir les airs de leurs cris de lamentation. C’est – je reprends une expression de Hassan Benhakia – le victimisme d’un ego au pluriel. Leurs «foutouhat» n’admettent aucun reproche car leurs actes criminels sont inspirés par la volonté divine. Je considère que ce qui se passe aujourd’hui au Darfour est la reproduction, d’une certaine manière, d’une époque lointaine vécue par Imazighns au Nord de l’Afrique avant d’accepter la soumission et d’intérioriser le mépris d’eux-mêmes et cet esclavage culturel. Sauf que le drame des Imazighns était vécu à un moment où la Cour Pénale Internationale, les Organismes Internationaux, les Droits de l’Homme, les médias n’existaient pas. Aucun document d’archive, aucune trace n’a été laissé en héritage, exceptées les séquelles que Imazighns portent encore dans leurs corps et leurs cœurs. Leurs ancêtres ont emportés avec eux leurs souffrances et leurs cris de détresse se sont évanouis dans quelques détours de l’histoire. Je pense aux chevauchées de Ouqba, de Moussa et autres «héros» des «foutouhat», je pense à la barbarie des Omayades et aux atrocités qu’ils ont infligées aux Imazighns dans l’impunité totale et au nom d’une foi ingrate. Je pense aux représailles et aux assauts donnés par les chefs de guerre arabes pour éteindre dans le sang de toute tentative de renier leurs dogmes abusifs. Je pense à ces femmes berbères kidnappées et vendues à Damas et à Bagdad. S’il y a une histoire inondée de sang, c’est bien c’est celle du despotisme et de la tyrannie des arabes. L’humanité toute entière ne sortira des ténèbres de sa barbarie que lorsque tous les crimes de son histoire seront jugés quelque en soient les motifs pour lesquels ils ont été commis. |
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