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Des notes sur «Un prénom amazigh pour l'éternité» Par: H.Banhakeia (Université d'Oujda) Une publication sur l'onomastique amazighe,
portant le titre de «Un prénom amazigh pour l'éternité», combien nécessaire,
vient de voir le jour dans un Maghreb allergique au présent «phénixien» de
l'amazighité. L'auteur est Farid Choukri, un jeune chercheur, psychiatre de
formation. Le texte est d'une importance capitale en
ces temps d'interdiction systématisée, voire systématique, des prénoms
amazighs au Maroc, répondant aux lubies d'un haut responsable de l'état
sibylle, peu soucieux de l'histoire du Maroc... Le texte, qui retrace le
statut de l'héritage amazigh, condamne cet état d'illégal ou d'illégitime
accolé à l'amazigh: «Les prénoms à résonance amazighe ont été écartés
de la liste “utile” établie par le ministère de l'intérieur à la fin
des années nonante» (p.28). Officiellement, l'amazigh est censé être étranger,
plus étranger que Aabir, Suzanne ou Shimon. L'on comprend après la lecture de cet essai
que le prénom, cette première trace socioculturelle indélébile, est à
comparer justement à la peau. L'auteur montre avec finesse que le prénom est
à définir comme la fenêtre sur l'être collectif. Par ailleurs, la préface
de A.Bezzazi (Université d'Oujda) dé-construit sémiotiquement la même logique: le nom est tout. Pour citer l'auteur, nous lisons: «Cela ce
n'est ni de la politique, ni de l'idéologie, ni une quête de pouvoir. C'est
l'amour» (p. 7). Il a raison: analyser le prénom, c'est un acte d'amour de
l'humanité. Et il n'a pas raison: le prénom est tout (amour, politique, idéologie,
quête, sagesse, etc..) à l'instar du prénom-femme Elsa pour le poète
Aragon. L'amour de Choukri pour sa culture est grandissime; il va au-delà de
l'engagement simpliste. Il se définit comme exploration de l'être collectif
dans ses premières manifestations. Le texte marie, avec finesse, le théorique
(sous forme d'essai ou de réflexion) à la pratique (énoncée en liste-répertoire
détaillé). Voilà une pierre philosophale, ce texte longtemps recherché
pour transmuer ces Farid, ces Hassan, ces Ahmed, ces Fatima, ces Selwa, ces
Souad… en Izem, Afar , Ilmass, Tlaytmass, Nunja, Taziri… Au commencement, c'était le prénom. C'est
pourquoi Farid Choukri retisse un itinéraire important: chercher la première
trace symbolique de notre être, en partant du présent interdit au passé
(noble par ses différences permises) en passant par l'évolution des signes
amazighs qui s'enchaînent dans un labyrinthe historique. Et l'auteur: «Les
Imazighen ont eu une sorte d'amnésie rétrograde de leurs vrais prénoms.»
(p.12). Que dire alors de la projection incarnée par ton écrit? Certes, l'Histoire connaît parfaitement: Un
être prénommé ou nommé, bien qu'il soit brûlé, renaît magiquement ou
alchimiquement de ses cendres comme le phénix. Aux lecteurs, nous tous, de le remercier
pour une telle œuvre qui, dans un style tantôt scientifique tantôt engagé,
affirme: «L'identité est le propre, le soi et la différence.» (p.20).
Principe ou définition qu'il défend parfaitement dans le texte.
(H. Banhakeia)
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