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LES CONTRACTIONS EN TAMAZIGHT Par Hha Oudadess ( Rabat) Rappelons d'abord ce que nous avons signalé à plusieurs reprises. Parler d'incompréhension entre locuteurs de différents dialectes de (la langue) Tamazight est tout simplement un non sens. Cette question ne peut être soulevée que par ignorance ou par mauvaise intention, notre langue ne bénéficiant d'aucun soutien, aussi minime soit-il, qui lui permette de s'épanouir. Elle est restée, livrée à elle-même, durant des siècles; subissant des assauts ravageurs dont le plus désastreux et le plus planifié est celui de l'arabisation, depuis le protectorat, et qui est devenu agressif et meurtrier depuis l'indépendance. Revenons à notre sujet pour dire que, surtout en l'absence de tout enseignement de Tamazight, les contractions constituent, entre autres, un facteur d'incompréhension possible. Avant de donner des exemples qui montreront, nous l'espérons, aux lecteurs qu'un effort de leur part leur permettra de lever beaucoup d'ambiguïtés et de réaliser que la standardisation dont on parle n'est pas bien lointaine, nous tenons à signaler que les contractions existent dans d'autres langues (Anglais, Français, ...) et probablement dans toutes. Beaucoup de celles-ci sont intégrées aux normes académiques et sont donc enseignées, ce qui n'en fait plus des usages locaux. D'autres sont restées en dehors, mais sont quand même reconnues dans ce que l'on appelle l'argot. Signalons, juste en passant, les J'AI ( Je ai), AU ( à le ), DU (De le), ES (En les), CHةPAS (Je ne sais pas) pour le français et les I'M (I AM) et LIKE'EM (LIKE THEM) pour l'anglais. Aussi, avant de donner des exemples en Tamazight, nous voudrions attirer l'attention sur un phénomène intéressant chez les Aït Hdiddou. A la question de savoir s'ils font telle ou telle chose, ils répondent par DA ou UR DA ce qui n'est pas sans rappeler les DO et DO NOT de l'anglais. Dans les exemples qui suivent, nous donnons le mot contracté puis la forme qui, à notre avis, en est l'origine. 1.URESS: Ur ssinekh (Je ne sais pas). 2. AWISS: Ah wayd issen? (Ah, qui sait?). 3. AGGAN: Ayd igan (C'est ce qui est ). On trouve aussi AYGAN et ADIGAN qui ne sont que d'autres formes de contractions. Dans la même famille, il y a MAGGAN (Mayd igan? ) qui peut aussi se dire MAYGAN et MADIGAN. 4. MILAN: Mayd ilan? (Qui est-ce qui possède?). 5. WILAN: Unna ilan (Celui qui possède). 6. WASA: Wad ass ad (Ce jour-ci). 7. MAWER: Ma ur (N'est-il pas?). 8. MAWERIDD: Ma ur idd? (N'est-il pas que c'est?). 9. MMINU: Memmi winu (Mon fils à moi). 10. URIDD: Ur idd (Ce n'est pas ou ce n'est pas que). 11. AMMIDD: Amm idd (C'est comme si c'était).12. ASRA: assa ra (tout à l'heure); Assa pourrait être déjà une contraction de ASS AD ou ASS WAD. ASRA serait alors une contraction de ASS WAD RA c'est à dire «ce jour-ci» suivi de la marque RA du fùtur. Ainsi ASRA signifierait «Dans le futur mais aujourd'hui ». 13. ACETTE: Aceked (Viens ici); à rapprocher certainement de ACEK DA. Remarquer qu'on trouve aussi ASED. 14. IMEQQERANN: Imeqqeranen; pluriel de Ameqqeran (Grand). 16.ANNINI: Ad nini (Disons ou nous allons dire). 17. MARA, MAGHA: Mayd ra, Mayd gha? 18. FELLAS: Fella is ou Fella nnes (Sur lui ou sur elle). A noter aussi AFELLA NNES. Il nous semble qu'Il s'agit d'un sujet important qui a été à peine effleuré ici et qui nécessite un certain investissement afin d'être clarifié. En s'exerçant, chacun pourra s'approprier rationnellement un aspect de son propre parler et entrevoir des liens avec les autres. Une collaboration entre locuteurs de différents dialectes, de la langue Tamazight, peut révéler d'innombrables fausses difficultés et faux problèmes quant à l'unité de notre langue. C'est une des clés de passage d'un parler à un autre. Nous espérons avoir contribué, par cette cette étude de cas, à montrer que la langue tamazight standard existe bien et que le véritable problème c’est de la fixer et de la faire connaître par l’enseignement.
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