Uttvun 87, 

Sayur  2004

(Juillet  2004)

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 Grand-mère courage

Par: Mohamed El bouazzaoui.

A sembratiri

 La nuit commençait à envelopper le hameau. La pluie   n’avait guère cessé de tomber. Grand-mère essayait tant bien que mal de rallumer un feu presque éteint. Elle voulait préparer le dîner et en même temps permettre a ses  petits enfants de se réchauffer les mains gercées. Le reste de la famille, le père, la maman, la tente, tous succombèrent lors du séisme. la maison était complètement transformée en ruine. Les deux enfants restaient  cloîtrés dans un petit coin, sous la tente faite de toutes pièces  par leur grand-mère. Ils n’arrivaient pas à réaliser ce qui était  arrivé cette nuit là, tellement leur bas âge ne le leur permettait nullement. Tout ce dont ils étaient sûrs  ce que leur demeure n’était pas habitable. Pour le reste, l’absence des parents, ils en trouvaient, dans leurs têtes, toutes les explications, hormis la mort. Grand-mère, traumatisée, ne parlait que rarement. Son regard méditatif, consterné, était jeté au lointain, rodant  tantôt autour de la maison, transformée en pierres, jonchées par terre et aussi  la cheminée de la cuisine, épargnée, figurant en sorte de reliquat, évoquant toute une vie, tout un parcourt, toute une chaleur familiale et sécurisante.

 Ses yeux étaient meurtris par des larmes chaudes et salées. Son unique fils était parti à jamais. Il avait du trimer des années pour construire une maison. La fatalité fut sans pitié.Tantôt grand mère, se consolait en se disant que le grand Dieu en avait voulu ainsi, elle espérait vivre très longtemps pour voir ses petits fils grandir, tantôt le pessimisme s’accaparait d’elle et pensait que peut être le tremblement récidiverait. Il n y avait pas de fossoyeurs au douar. A ses yeux, la terre était meurtrière! Cette terre qu’elle avait couvée contre les espagnols, qu’elle avait cultivée sans fatigue et qu’elle chantait jour et nuit. Or, son attachement à cette terre est indéfectible.

En témoignaient ses comportements quotidiens: elle continuait à entretenir ses lopins de terre, à penser à la moisson et à la cueillette des amandes. Intuitivement, elle préférait partir tôt à la forêt chercher du bois que de décimer un arbre dans les parages. Grand-mère est courageuse, sa sagesse n’a  jamais démérité. En apercevant un hélicoptère planer dans le ciel, sa mémoire était vivement secouée et pensa aux années de guerre, alors q’elle avait à peine 20 ans. Elle se rappela les moindres détails, notamment la mort de son mari, bombardé par un avion et déchiqueté en mille morceaux, se rappela aussi la vague de la famine qui avait occasionné des ravages. Elle se souvenait de tout, absolument de tout.

A proximité de sa maison, un journaliste l’interpella et lui demanda si elle ne songeait pas partir vivre ailleurs, avec une famille par exemple.Elle répondit après un long silence:

-Man d ac ghad aynigh?, nec ssa, nec ad kemregh da (que puis –je te dire? je suis d’ici, j y resterai).

  -Tu n’as pas peur d’un autre tremblement? lui demanda encore.

  -Nec war teggwdegh ca, nec oemmars war gîdegh, amazighen , rejdoud inu oemmars war daysen tudact (moi, je n’ai pas peur, moi j’ai jamais  eu peur, les amazighen, mes ancêtres ne ressentaient guère de peur).

 Rentrée chez elle, elle se mit à graver avec un couteau, sur des morceaux de bois, les prénoms des membres perdus. Elle les transcrivit en tifinagh, espérant par là, que ses petits fils reconnaîtront dans l’avenir les  tombeaux de leurs parents ,grâce à ces épitaphes.

 Des jours se succédèrent. Crescendo de misère et d’indifférence. Un matin, un responsable de l’autorité arriva au douar. Il se mit à distribuer quelques vivres dont certains étaient inconsommables. Grand-mère refusa de prendre la tente offerte par ce monsieur, qui exigeait être pris en photo. Grand-mère ne voulait pas de pitié, ne voulait pas être instrumentalisée à des fins électorales et médiatiques. Le responsable, tiré à quatre épingles, ne savait comment réagir. Il arbora un visage pourpre de colère, se sentit ridicule devant la décision de cette vieille femme. Dans les yeux de celle-ci un message bien clair: «on ne met pas du henné sur les poux! Avant la tente, il faut penser à la route, à l’eau potable, aux écoles, à l’électricité, à l’hôpital, à l’égalité», semblaient dire les rides de ce visage tatoué de misère et d’oubli .

Grand-mère rêva une nuit que les membres disparus de sa famille étaient logés dans une grande villa bien confortable. Un jardin luxurieux entourait leur demeure. Beaucoup de réverbères éclairaient généreusement les rues. Son fils lui tendait la main en lui disant: «viens chère mère, rejoins nous! Ici, c’est mieux, ici, c’est le paradis de Dieu». Elle comprit alors que parfois, la mort est une issue aux malheurs terrestres. Mais au fond d’elle, elle préféra vivre pour perpétuer la mémoire du Rif.

 

          

 

 

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