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Le combat amazigh au niveau des Nations Unies Par : Anarouz SAADANI
Au cours de sa 77ème session qui s’est déroulée au siège du Haut Commissariat aux Droits de l’Homme à Genève, le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) a examiné le cas des Etats parties dont le cas du Maroc. Le Congrès Mondial Amazigh et d’autres organismes n’ont pas raté cette occasion pour faire entendre la voix amazighe auprès des instances internationales. Les membres du Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale ont écouté les représentants des ONG ayant présenté un rapport alternatif à celui de l’Etat. Au cours de la réunion avec les experts du CERD, les représentants du Congrès Mondial Amazigh, l’Association Tamazgha de Paris et le réseau Azetta du Maroc ont présenté des synthèses de leurs rapports alternatifs qui dénoncent la politique anti-amazighe et les pratiques administratives, judiciaires et policières injustes, discriminatoires et répressives. Les experts du Comité CERD ont fait preuve d’écoute et de curiosité intellectuelle. Ils sont avides de comprendre avec profondeur la réalité amazighe au Maroc et ailleurs. Ils ont engagé un débat intéressant avec les ONG présentes sur les différents aspects de la question amazighe. La délégation Marocaine, présidée par l’ambassadeur du Maroc à l’ONU a présenté, lors d’une séance plénière, le rapport officiel de l’Etat marocain. Cette délégation est composée de représentants des ministères de l’Intérieur, de l’Education, de la Justice, du Travail, de la Solidarité et de la famille. Dans son allocution, M. Hilal, l’ambassadeur du Maroc, a abordé les questions relatives aux droits et libertés fondamentales, à l’éducation et à la formation aux droits humains… La problématique amazighe a occupé une place importante dans son discours. Il a insisté sur le rôle de l’Ircam, l’enseignement de la langue amazighe, la TV amazighe et la l’interdiction des prénoms Amazighs. Et pour cause. Cette question est la préoccupation centrale du comité CERD. La réaction des experts des Nations Unies est sans appel. Ils ont pointé les discriminations et des atteintes aux droits et aux libertés des Amazighs. La problématique amazighe a été examinée sur tous les niveaux (Constitution, institutions, lois,…). Leurs observations ont porté également sur les traitements discriminatoires dans les domaines économique, social, culturel et linguistique. La délégation marocaine a été épinglée, l’absence de statistiques et d’indicateurs sociodémographiques et économiques concernant les populations amazighes. Les experts l’ont compris, l’ambigüité sur laquelle mise l’Etat marocain a pour but d’empêcher une bonne compréhension de la réalité amazighe et l’évaluation des discriminations exercées à l’encontre des amazighs. Les recommandations du Comité des Nations Unies sont à la hauteur des attentes des ONG de défense des droits des amazighs. Le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) a rendu publiques ses conclusions le 27 août 2010. L’absence de reconnaissance officielle de la langue et culture amazighes demeure sa préoccupation majeure. Il affirme être «préoccupé par le fait que la langue amazighe n’est pas toujours reconnue comme langue officielle par la Constitution de l’Etat partie». Il a également critiqué l’absence de statistiques et de données relatives à «la composition ethnique» de la société marocaine et les indicateurs socio-économiques pour savoir s’il y a discrimination ou non. Dans leur rapport, les membres du Comité CERD exhortent l’Etat marocain à «envisager l’inscription dans sa Constitution, de la langue amazighe comme langue officielle» et d’«assurer l’alphabétisation des Amazighs dans leur langue» et d’«intensifier ses efforts de promotion de la langue et la culture amazighes, notamment par son enseignement, et de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les amazighs ne soient victimes d’aucune forme de discrimination raciale, notamment dans l’accès à l’emploi et aux services de santé». Le comité est scandalisé par l’interdiction des prénoms amazighs. Il s’interroge sur la signification et la portée de la notion de «prénom à caractère marocain» prévue par l’article 21 de la loi n° 37-99 de 2002 relative à l’état-civil et dont «l’application par les officiers de l’état-civil continue d’empêcher l’enregistrement de certains prénoms, en particuliers amazighs». Ayant compris que la marginalisation frappe de plein fouet les régions amazighes, le comité recommande à l’Etat marocain de «mettre un accent particulier sur le développement des régions habitées par les Amazighs». La légitimité des revendications amazighes est donc entérinée par les observations et les conclusions de cette instance prestigieuse des Nations Unies, la bonne volonté de l’Etat marocain est mise à l’épreuve. Lorsque l’enseignement de l’amazigh ne figure plus dans les programmes préconisés par le MEN, l’intégration de la langue tamazight dans les secteurs de la vie publique est presque abandonnée, tout laisse présager que l’Etat marocain fait la sourde oreille au Mouvement amazigh et aux instances internationales et n’a pas l’intention de tenir ses promesses dérisoires.
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