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Arabisation,
mondialisation et langue amazighe. Par:
Mohammed Serhoual, Université de Tétouan - Maroc. «La
langue est le principal signe d'une nationalité». Michelet. Nous sommes tous
concernés par la mondialisation. Tout le monde est impliqué et chacun doit
prendre ses responsabilités face à un phénomène global qui prend et
prendra encore de l'ampleur. N'étant ni philosophe, ni économiste de
formation, la mondialisation pourrait également
concerner le linguiste. La
langue est le réceptacle d'une culture; c'est la mémoire collective qui
emmagasine l'histoire d'une communauté linguistique. La langue reflète la
vision qu'un peuple a de l'univers, et par la même, elle est également le
reflet de sa pensée. Une interaction réciproque s'instaure entre la langue
et la communauté linguistique (Cf. J.-B. Marcellesi et B. Gardin 1974: 20 -
32). Pour illustrer cette idée, nous allons donner quelques exemples: aman «eau,
en tamazight», ce mot existe seulement au masculin pluriel, il est
invariable; en français il est au féminin et il connaît l'alternance
singulier / pluriel; en arabe, il est au masculin (maa'un), il a un pluriel (miyaahun).
Même constatation au niveau d'expressions idiomatiques figées comme: zi
zzman n waman «litt. depuis le temps, l'époque des eaux, depuis longtemps».
L'équivalent français de l'expression rifaine est: depuis la nuit des temps.
Pour ce qui est de tamazight, nous sommes en présence d'une vision
cosmogonique liée à l'existence de l'homme, elle est en rapport avec
l'existence de l'eau. Cette expression nous rappelle le verset coranique: Nous avons fait de l'eau toute création vivante».
L'arc-en-ciel est exprimé en tamazight par la lexie complexe tassrit n wnzar «litt. la
mariée ou la fiancée de la pluie», c'est une autre vision du monde. L'arabe
dispose du mot qawsu quzaà «litt. l'arc - de - Satan (la dénomination
remonte à l'époque anté-islamique). Le nombre des
langues du monde dépasse de loin celui des Etats politiques; il n'y a pas
d'isomorphisme entre la carte politique et la répartition des langues à l'échelle
mondiale. Mackey (1976: 109) donne le chiffre de 3000 langues environ pour 200
pays. Ces langues se répartissent en langues dites savantes et langues dites
populaires. Tamazight, étant à la base de la culture maghrébine, fait
partie de la seconde catégorie. Notre but, à travers cette communication,
est de s'interroger sur l'avenir de cette langue et de sensibiliser, l'honnête
homme à l'existence de cette langue séculaire menacée d'extinction à cause
de la politique d'arabisation menée au lendemain de l'indépendance dans les
pays du Maghreb; bien que la langue arabe soit, elle aussi victime de la
mondialisation. Tamazight joue sa dernière chance existentielle à cause de
la mondialisation. Nous assistons à un phénomène de glottophagie hiérarchisée.
I.La mondialisation: essai de définition
générale
La mondialisation
est un phénomène tentaculaire, il est vécu au quotidien à l'échelle planétaire.
L'origine de la mondialisation remonte à l'époque des Temps modernes qui a
mis fin à la féodalité médiévale en Europe. La mondialisation a vu le
jour à l'aube de la Renaissance
européenne. Elle s'est traduite, dans sa première phase sous forme d'européanisation
(mondialisation européenne) dès le 18ème siècle. Elle n'a cessé de
progresser tout s'affermissant avec plus de force au 19ème et 20ème siècles.
La mondialisation a changé de pôle d'attraction suite à l'éclatement du
1er conflit mondial; d'européenne, elle devenue américaine; il s'agit d'une
américanisation idéologique du monde. Elle se manifeste sur tous les plans:
économique, politique, militaire, médiatique, et sur le plan culturel et
linguistique. Seul ce dernier nous intéresse. Néanmoins, nous allons faire
des incursions dans les autres domaines pour signaler quelques indications
sommaires mais éclairantes ayant trait à la mondialisation. La mondialisation
économique se traduit par une expansion horizontale et ascension verticale
des entreprises et des multinationales. Le mot de liberté y occupe une place
centrale: on parle de libéralisation des marchés mondiaux et de la
suppression des frontières douanières entre Etats, de liberté de la finance
et du commerce. Par conséquent, un fossé se creuse entre les pays du nord et
les pays du sud. C'est la liberté du renard dans le poulailler ou le pot de
terre et le pot de fer. Cet état de choses entraîne l'endettement des pays
pauvres évalué à 1465 milliards de dollars (Cf. Berrada 1998: 154). Une
poignée de personnes, au nombre de 200 environ accapare 43% de la richesse
mondiale, contre 2,3 milliards d'êtres qui vivent avec le minimum vital, pour
ne pas dire au seuil de la pauvreté. Le décalage se creuse entre pays nantis
et pays démunis. L'endettement des pays du Tiers-monde est en progression géométrique;
ce qui entraîne des crises économiques et soulèvements populaires. Le plan militaire
et stratégique: à l'hégémonie économique des E.U. s'ajoute la puissance
mondiale sur le plan technologique; ainsi les E.U. ont la suprématie sur le
plan logistique et au niveau de l'armement sophistiqué. Nous nous contentons
de deux cas de figure (i) l'intervention militaire des E.U. au Koweit, en
Afghanistan, (ii) les E. U. assurent la médiation partiale entre Israéliens
et Palestiniens tout en usant de deux poids deux mesure. Les Palestiniens, en
légitime défense, sont taxés de terroristes et sont massacrés au vu et au
su du monde entier par les Israéliens qui jouissent du soutien inconditionnel
de la puissance mondiale numéro un
Sur le plan
politique, on assiste à l'hégémonie d'un seul camp, suite à la chute du
bloc socialiste en 1989 et à la disparition de l'antagonisme
capitalisme-socialisme et de la guerre froide. Cette suprématie est
exclusivement américaine. Moyens de
communications et média: l'information est accaparée par la puissance
mondiale numéro un. En cas de conflit, les images télévisées diffusées
sont contrôlées par le Pentagone (Ministère de la Défense américaine).
Lors de la guerre du Golfe, on donne l'illusion qu'on s'apitoie sur le sort de
l'oiseau blanc dont le plumage est maculé de taches d'huile pétrolière et
on occulte les déformations corporelles causées par l'uranium aux civils
irakiens. Le niveau culturel
et linguistique: l'anglais possède également la part du lion dans ce domaine
névralgique. Une ruée pour l'apprentissage de l'anglais se fait en Chine (50
millions Chinois apprennent l'anglais) et partout dans la monde. Les Etats
européens, bien qu'unis sur le plans économique et monétaire tiennent à la
diversité linguistique qu'ils considèrent comme enrichissante. Le lexique
anglais envahit des domaines comme la technologie, l'informatique et
l’Internet. On assiste à une mondialisation du vocabulaire. La mondialisation
se situe à plusieurs niveaux qui convergent tous vers l'hégémonie. Il y a
interaction des niveaux économique, politique et culturel, mais il y a également
une hiérarchie et une priorité accordée à l'un des niveaux privilégiés.
Le niveau linguistique est la clé de voûte, étant donné qu'il est le plus
lent et le plus profond au niveau des valeurs sur le marché symbolique; il
est irréversible, une fois l'homogénéisation linguistique est réalisée.
La langue est omniprésente et sur tous les plans. De manière générale,
H. Janhani (1998: 168) signale trois tendances au sein du monde arabe à l'égard
de la mondialisation: la première choisit le camp occidental
(occidentalisation) et rejette de la pluralité culturelle; la seconde
prône pour un attachement aux valeurs ancestrales (courant passéiste), la
troisième tendance, éclectique, est réconciliante, elle est pour une fusion
entre la mondialisation et le patrimoine culturel. Dans des pays
occidentaux avancés techniquement, des manifestations anti-mondialisation
sont menées; ces mouvements contestataires débouchent sur des affrontements
violents opposant société civile et autorités; ils aboutissent à la répression;
il s'agit du maintien de la différence pour la dominance. Il y a lieu de
rappeler que la mondialisation ne doit pas être confondue avec la culture de
l'Universel telle qu'elle a été réclamée par L.-S. Senghor invitant
l'humanité à un dialogue des civilisations et au métissage des cultures, en
se fondant sur une dialectique du local et de l'universel. Les deux dimensions
doivent cohabiter et coexister en harmonie. L'Islam n'a jamais
renié les langues locales, tout en poursuivant ses conquêtes religieuses.
Des pays asiatiques, tels que l'Iran, Afghanistan, Indonésie, ont été
islamisés sans perdre leur langue(s) autochtone(s). Notre intervention
concerne la mise en rapport langue amazighe, arabisation et mondialisation. La
langue, même minorée, est le véhicule d'un ensemble de valeurs symboliques.
Nous allons donc essayer de voir quelle place est accordée à une langue
minorée comme tamazight.
II.
Situation de tamazight: Une première
remarque concerne les ethnonymes berbère et Chlouh et son dérivé tachelhit.
L.-J. Calvet (1974: 57) affirme dans son ouvrage Linguistique et colonialisme
que certains ethnonymes comme Nigeria, Niger, Cameroun et Soudan sont des dénominations péjoratives données
par le colonisateur. Concernant l'ethnonyme berbère, Vicychl (1989: 85-86)
affirme qu'«il serait plus correct d'appeler les Berbères par leur propre
nom, à savoir Amazigh, au pluriel Imazighen, c'est-à-dire les hommes libres
ou les nobles, car le nom de Barbari s'appliquait dans l'Antiquité
aux peuples qui ne parlaient ni le grec, ni le latin (latin Barbarus, pl.
Barbari). Aussi des peuples qui possédaient une haute civilisation, comme les
Egyptiens, les Babyloniens, les Perses étaient des Barabari aux yeux des
Romains parce qu'ils ne parlaient pas le latin». Quant à l'ethnonyme chleuh d'origine arabe, comme Soudan,
signifie «bandit, coupeur de routes qui déshabille les passants» (Cf. Ibn
Manطur
1994: 200, t. 2). Cette remarque se justifie par l'emploi de l'adjectif en
langue arabe: toute agression taxée de sauvage
ou de criminelle - comme le massacre des Palestiniens par les Sionistes - est
immanquablement suivie de l'adjectif barbari , terme donc bi-sémique; il
signifie sauvage; il est forcément lié à une ethnie. Une seconde
remarque concerne la dichotomie langue / dialecte. D'un point de vue
strictement linguistique, la langue et le dialecte sont des moyens de
communication, la différence réside au niveau de son statut politique et de
sa valeur sociale. Tamazight est une langue et non dialecte puisqu'elle ne
provient pas d'une autre langue-mère; ayant ses propres lois internes, elle
jouit d'autonomie; elle est vivante; elle a un ancrage historique;
exclusivement orale, elle n'est pas une langue scripturaire. L'arabe classique
a une profondeur historique, elle est autonome et écrite mais elle n'est pas
parlée au quotidien, par la masse. L'arabe dialectal a une histoire, elle est
parlée par la masse, dans la vie courante, elle n'est pas autonome, c'est un
meelting-pot tamazight - arabe classique, elle n'est pas écrite (Cf. Boukous
1974). Essayons tout d'abord de définir la langue amazighe dans l'espace et
dans le temps. Cadre géolinguistique
de la langue amazighe: La langue amazighe
couvre un domaine immense; elle se répartit en 3 grandes familles: Zenata,
Senhaja et Masmouda. C'est la langue de l'identité maghrébine en général.
L'aire amazighe s'étend tout au long de la rive Ouest de la Méditerranée méridionale
et englobe une dizaine de
pays: le Maroc, l'Algérie, la Tunisie, la Libye et l'oasis de Siwa (Egypte-ouest),
et d'autres pays comme la Mauritanie, le Mali, le Niger et le Burkina - Faso
(soit une superficie de plusieurs milliers de kilomètres carrés). Les Iles
Canaries en faisaient partie, la toponymie fait foi; les Guanaches ont des
revendications identitaires. A l'immensité de l'aire amazighe correspond une
unité profonde de la langue malgré la diversité des parlers. Basset (1929:
23) fait une estimation formulée en terme de «poussière de parlers» allant
de 4000 à 5000 (1959: 4) et de 300 dialectes (Ibid. p. 23). Il y a lieu de
signaler la présence de trois variétés régionales (ou géolectes): tarifit
au nord, tamazight au centre (Moyen et Haut-Atlas) et tassoussit, au sud du
pays, comprenant la partie méridionale du Haut-Atlas, tout l'Anti-Atlas
jusqu'à l'Océan Atlantique. L.
Galand (1988: 207) nous dit que «Avant l'arrivée des Arabes en Afrique du
Nord, le berbère occupait le domaine d'un seul tenant». Le nombre de
locuteurs amazighophones varie d'un pays à l'autre. Les données du
recensement de la population ne sont jamais explicites. Néanmoins, on peut
donner quelques indications approximatives: Selon A. Boukous (1999: 62), «l'arabe
dialectal est parlé par 70 à 80%, l'amazighe par 45 à 55% , l'arabe
standard par 10 à 20 %, le français 10 à 20 %»; ces chiffres donnés à
titre indicatif, soit une évaluation quantitative variant entre 13,5 et 16,5
millions de locuteurs amazighiphones pour le Maroc. L'Algérie vient après le Maroc quant au nombre de
locuteurs. La Kabylie représente, à elle seule, les deux-tiers des
amazighophones (6 à 7 millions). Autres variétés: la Chaouia des Aurès (1
million), le Mzab (Ghardaïa), Ouargla et le touareg. Cette variété est
attestée dans plusieurs Etats dont le nombre dlocuteurs atteint un million.
On connaît par ailleurs la politique de décimination à laquelle sont soumis
les Touaregs. Les locuteurs
amazighophones en d'autres pays (Libye, Mali, Nigeria et
Haute-volta se comptent par dizaines de milliers; Tunisie: 1% ; Iles Canaries
: 0 % (Cf. Chaker 1990 : 238-9).
Les amazighophones, souvent analphabètes, mènent la vie dure et sont livrés
à eux-mêmes; ils sont confinés dans le monde rural; privés d'une
infrastructure de première nécessité (eau, électricité, routes.), ils
affluent également vers les grandes métropoles: Tanger, Tétouan, Oujda,
Casa, Fès, Meknès, Marrekech, Alger, Oran, Constantine. La situation de
tamazight n'est plus ce qu'elle fut. La carte de l'amzighphonie, telle une
peau de chagrin, s'est rétrécie au fil du temps. Cernée par l'arabe,
tamazight se présente sous forme d'archipels dont les liens subsistent en
profondeur: les structures syntaxiques et lexicales sont homogènes de manière
générale; même si le lexique présente un fonds commun et une diversité
due au relief géographique, au mode de vie et à la culture. Historique: Si
l'existence des Imazighen est arrêtée à 33 siècles par M. Chafiq (1989),
Vicychl (1989: 85 - 86), quant à lui, démontre, arguments archéologiques à
l'appui que leur Histoire étend sur cinquante siècles; il conclut que«l'histoire
des Imazighen ou Berbères commence au seuil même de l'histoire égyptienne,
vers 3000 avant J.-C., et non tardivement avec les Grecs et les Romains ou
encore avec les Arabes». Donc à l'immensité de l'étendue géographique
s'ajoute la profondeur historique qui sont le propre de tamazight. Langue séculaire
mais exclusivement orale, elle a subi des sévices étant donné qu'elle n'a
jamais eu d'existence autonome. Compte tenu de ces données, nous allons nous
interroger sur son avenir. Mais avant d'en venir à la mondialisation
proprement dite, essayons de voir ce qu'il en a de la langue amazighe en
contact avec l'arabisation. Ce
concept referme l'idée d'expansion linguistique et d'hégémonie qu'on trouve
dans le mot mondialisation. Une mise au point sémantique est possible pour un
rapprochement entre les deux concepts. Si le terme mondialisation est sémantiquement
analysable en sèmes, unités minimales de signification, comme chaise: siège
+ pour s'asseoir + pieds + dossier, L'arabisation et la
mondialisation sont dotés de sèmes communs comme hégémonie et substitution
d'une langue à une autre; donc l'arabisation est, par anachronisme, un autre
aspect de la mondialisation bien que cette dernière soit elle aussi, victime
de la mondialisation,
malgré la différence de statut. III.Arabisation
et mondialisation: une même convergence glottophagique: Rappelons que
tamazight n'a jamais eu une existence autonome depuis l'Antiquité: une présence
de substrats linguistiques tels que le latin, le punique, l'arabe, le français
et l'espagnol se manifeste sur le plan lexical. L'isolement et le manque de
contact, la disparité des reliefs, la diversité des cultures locales, et des
régimes politiques mis en place des différents Etats, convergent vers une
accentuation des écarts sur le plan linguistique. Arabisation: Il y a
lieu de distinguer islamisation et arabisation, deux concepts différents mais
intimement liés ( Cf. G.تCamps
1997: 49). L'islamisation est un concept religieux qui relève du sacré et
qui ne condamne pas la diversité linguistique; tandis que l'idéologie panarabe est négatrice
de la pluralité linguistique et culturelle, en tous cas dans les pays du
Maghreb, devenu Maghreb arabe. Selon
G.-H. Bousquet, le processus de l'arabisation peut être appréhendé de deux
façons possibles: (i) par le rétrécissement de l'aire amazighophone, (ii)
par l'exode des Imazighen vers les centres urbains; assimilés, ils adoptent
l'arabe marocain comme moyen de communication. L'arabisation est un
processus qui s'étend sur des siècles; elle est causée par les
tribus arabes Banu Hilal et Maâqil «berbères arabisés ». Ils se sont
adonnés au pillage du pays mis à feu et sang. IbnKhaldoun cité par Bousquet
(1974: 59) parle de ces tribus «semblables à une armée de sauterelles, ils
détruisaient tout sur leur passage». M. Chafik (1989: 86-100) distingue 4 étapes
d'arabisation: les deux premières, liées à l'islamisation, se caractérisent
par la lenteur et la spontanéité, l'appel à la prière et le sermon du
vendredi étaient prononcés en tamazight. Le monarque almoravide Youssef Ibn
Tachfine (1061-1107) ne savait aucun mot de l'arabe, était intégralement
amazighophone. (le règne des Almoravides a duré de la fin du IXème
jusqu'au début XIIème siècle). La
2ème étape de l'arabisation a eu lieu sous l'instigation
directe du roi Almohade, Abd-el-Moumen (1130-1163) qui a fait appel à des
tribus arabes qui ont sillonné le Maroc en long et en large; des tribus
amazighes marocaines ont été arabisées. L'arabe fut utilisée comme
langue officielle pour la correspondance administrative (Cf. Chafik: 1991:
64). L'arabisation a commencé a atteindre les centres urbains sous le règne
des Mérinides (XIIIème -XVème siècle.)
avec l'implantation d'écoles. Des monarques marocains alaouites tels que
Mohammed ben Abdallah (1757-1790) et Hassan 1er (1873-1994) maîtrisaient
tamazight et s'adressaient aux tribus non arabisées dans leur langue
d'origine, il y a un peu plus d'un siècle.
La 3ème étape d'arabisation (1912-1955) est liée la résistance armée
contre l'occupant: elle provient
du contact des combattants amazighs avec les citadins, et du brassage des
ethnies. Encore faut-il ajouter l'obédience idéologique panarabe importée
d'Orient qui a fait tache d'huile au sein de la société maghrébine, et la
promulgation, en1930, du Dahir berbère décrété par le Protectorat français
qui a contribué à stigmatiser la scission entre les ethnies; le
Mouvement National (citadin) a saisi l'occasion pour jeter l'anathème
sur ce dahir machiavélique et a attisé le feu afin d'embraser l'ardeur des
citoyens et les inciter à rejeter la référence amazighe; seule la référence
arabe est considérée comme légitime. L'amazighité,
selon la vision panarabe, est une menace pour l'unité nationale. Cette
exclusion va être concrétisée par l'implantation d'écoles privées pour
l'apprentissage de la langue arabe dans les milieux urbains, l'enseignement de
la langue arabe s'en trouve renforcée. Cette politique a eu pour conséquences
le reniement des origines amazighes chez certaines familles et l'affiliation
à une généalogie arabe factice faisant référence à l'arabité, à
l'invention d'arbres généalogiques d'obédience arabe crées de toutes pièces.
Ainsi l'on voit certains amazighs se réclamer de chorfas d'ascendance sacrée.
Nous voyons donc qu'il s'agit de l'intrication de deux dimensions
amalgamées: la dimension religieuse est exploitée au profit de l'idéologie
panarabe. Les fonctions de la langue arabe sont limitées à la liturgie et à
la littérature. Le slogan du panarabisme est hissé par les ténors du parti
de l'Istiqlal au détriment de la majorité écrasant du peuple. la 4ème et dernière
phase d'arabisation se caractérise par une accélération progressive dont
les objectifs sont clairs, précis et bien défini au lendemain de l'indépendance.
Quatre principes président à cette nouvelle politique linguistique:
unification, arabisation, généralisation et
marocanisation (Cf. M. Chafik 1989: 94-95 et A. Boukous 1999: 65).
Cette politique linguistique est menée dans un but idéologique d'arabiser
les apprenants de la plèbe; tandis que les fils de l'élite ont accès aux écoles
étrangères. M. Boudhan (1995:
9-26) voit dans la politique d'arabisation «un subterfuge pour préserver les
privilèges de classe». A. Boukous (1999: 133) parle du paradoxe de
l'arabisation pour la masse d'un côté et d'accès aux écoles européennes
et / étrangères (M.U.C.F., école espagnole, école américaine) privées et
payantes réservées aux fils des notables. L'auteur (1999: 103 et 133)
affirme que «le recours à l'enseignement étranger, notamment français,
apparaît ainsi comme une des conditions de la sélection sociale». Donc,
l'arabisation n'est qu'un leurre, c'est un choix linguistique qui a des
soubassements idéologiques. Nous assistons à une arabisation pour une classe
moyenne ou même pauvre et à un enseignement des langues étrangères pour l'élite
pour une meilleure ascension sociale; alors que la plupart des Imazighen
(montagnards ou campagnards) stagnent dans l'analphabétisme et tout ce qui
s'en suit. On constate alors une certaine lenteur du processus d'arabisation
durant douze siècles révolus, face à une vitesse de croisière entamée
dans la seconde moitié du 20ème siècle . Il découle de cet état de choses
que les deux langues ont coexisté ensemble. Mais cette coexistence millénaire
n'est pas la même qu'auparavant. Au début, tamazight était une langue intégrante.
Mais depuis l'indépendance et à cause de la scolarisation et l'expansion des
mass-média (radio et télévision surtout), la langue amazighe est devenue
intégrée et soumises aux aléas de l'Histoire; elle prend du recul par
rapport à l'arabe dialectal qui fait tache d'huile. Tamazight et l'arabe
entretiennent une relation double et complexe: l'appartenance génétique à
la famille chamito-sémétique et la coexistence millénaire.
IV.
Langue amazighe et mondialisation: Le monde rural - et
surtout la montagne restée à l'abri de l'arabisation - est un fief pour la
préservation de la langue, par opposition aux plaines, lieux de passage,
elles sont propices à l'arabisation. L'implantation des écoles étant
insuffisante, et lorsqu'elles existent le système scolaire demeure précaire.
Sous-équipée et dans un état délabré, l'école est mal fréquentée par
les enfants des paysans. Les
moyens de transport et les moyens de communication ont relativisé les notions
de temps et d'espace. On assiste à une urbanisation des campagnes, à un
nouveau mode de vie pastorale. Le berger, au lieu de jouer de sa flûte, écoute
la radio ou regarde les images présentées par son téléviseur portatif. Les paysannes ne pétrissent
plus leur pain et ne font plus de galettes eux-mêmes, de leurs propres mains,
la camionnette de la ville assure la distribution du pain de boulangerie. La
tradition de la ssefاa
ou ssfaاeأ
(en langue amazighe) «droit de préemption» (Cf. Serhoual 2001: 574, vol. I)
était observée pour empêcher l'intrusion d'un élément étranger au sein
du clan. Cette pratique est en voie de disparition à cause du morcellement
des terrains destinés à la vente sous forme de lots; il s'ensuit une
formation de bidonvilles. Le substrat
culturel survit à travers le folklore: bijoux, poterie, artisanat, tissage:
mais les Imazighen ne sont que des figurants, des spectateurs passifs et non
pas des acteurs. Le folklore fait l'objet d'une exploitation sur le plan
touristique: motifs décoratifs, tapisseries, rythmes musicaux, chants,
danses, la peinture et les couleurs vives des paysages maghrébins,
architecture spécifique tant vantés dans les dépliants touristiques. Le patrimoine
culturel dans son ensemble constitue une source d'inspiration pour les
artistes, chanteurs et écrivains. Ils se déclarent qu'ils sont redevables à
la culture du terroir, Belkhayat pour la chanson marocaine en langue arabe et
Choukri, écrivain marocain dont les ouvres en langue arabe sont traduites en
plusieurs langues; cet écrivain reconnaît que son style et ses images sont
nourris de sa langue et sa culture maternelle, tamazight du Rif; alors que le
chanteur marocain n'hésite pas à dire que certaines mélodies sont puisées
dans la musique amazighe. Mais le paradoxe est toujours là: on puise dans le
patrimoine au moment où on a tendance à le miner de l'intérieur. Mondialisation et
revendication identitaire: La langue est un réceptacle de l'identité d'une
communauté linguistique, c'est pourquoi, au lendemain de l'indépendance
(1956) et depuis la moitié des années soixante, la prise de conscience de
l'identité amazighe a commencé à se manifester. On assiste à l'éclosion
d'associations qui ont fait leurs preuves comme l'A.M.R.E.C. (Association
marocaine de recherche et échanges culturels); la plupart de ses membres
fondateurs sont des universitaires de formation; ils ont effectué des
recherches dans le domaine amazigh. Aussi, doit-on rappeler que ces
associations ne sont pas subventionnées
au même titre que les autres associations qui, en plus de subsides alloués
par l'Etat, jouissent d'une ample médiatisation. D'autre associations ont vu
le jour comme l'association intilaqa attaqaafiyya à Nador en 1978,
l'association nouvelle pour la culture et les arts devenue tamaynut (16
octobre 1978) et l'association de l'université d'été d'Agadir 1979. Ainsi
on assiste à une multiplication d'associations qui poussent comme des
champignons même dans les localités les plus éloignées et dans les
villages les plus reculés dans les quatre coins du pays pour faire pression.
L'éveil identitaire est à son comble. Ces différentes associations avaient
besoin d'une instance coordinatrice à l'échelle nationale; c'est pourquoi un
conseil de coordination a vu le jour en vue de superviser les différentes
actions associatives. L'émergence d'une
culture des droits de l'homme va inclure la revendication des droits
linguistiques. C'est en Algérie que le mouvement contestataire va prendre
une tournure notable avec l'événement du Printemps berbère à Tizi Ouzzou
en Kabylie (Algérie) lorsque Albert Memmi fut empêché de donner une conférence
sur la poésie amazighe. Le mouvement culturel amazigh (M.C.A) est une action
revendicative de l'identité, de la langue et de la culture amazighes. Il est
composé de militants qui défendent le patrimoine à titre personnel ou qui
militent dans un cadre associatif. Ce mouvement, a à son actif, non seulement
une expérience mais il a accumulé un savoir-faire sur les plans culturel et
scientifique. Une ère nouvelle s'annonce pour le mouvement associatif.
L'action est engagée pour moderniser la société et d'ouvrir de nouvelles
perspectives dans un Etat démocratique et pluriel afin de mettre fin à une
vision étriquée et réductrice de la culture marocaine. Il s'agit donc de
rectifier le tir afin d'intégrer la composante culturelle amazighe exclue de
la sphère des valeurs symboliques marocaines. Il s'agit d'un renouveau démocratique
qui met sur un pied d'égalité toutes les composantes de la culture
marocaine. La démocratie est un tout indivis. Un slogan revient à tous les
coups: pas de démocratie sans tamazight. Priorité accordée plutôt à la
dimension culturelle qu'au militantisme d'ordre politique. La langue amazighe
doit être réhabilitée; tous les Marocains, amazighophones ou non, sont
concernés par cette affaire. La Charte d'Agadir
(A.M.R.E.C. 2002: 8-16) pour la langue et la culture amazighes signée par un
bon nombre d'associations le 5 août 1991 est une référence de base pour
l'action amazighe: un slogan est mis en vedette: unité dans la diversité.
Dans cette charte, on lit les paragraphes suivants: Péambule, I. L'identité
culturelle du Maroc: l'unité dans la diversité; II. La culture tamazighte;
III. La langue tamazighte; IV. Etat de la langue et de la culture tamazightes;
V. Perspectives de la culture tamazighte. Elle est signée par six
associations. Le slogan unité dans la diversité est une riposte adressée à
ceux qui considèrent la revendication des droits linguistiques comme une
menace pour l'unité nationale; c'est aussi une incitation à une
reconnaissance de la spécificité linguistique et culturelle. Ces
associations ont réalisé un saut qualitatif en procédant à une espèce de
mise en demeure des instances parlementaires à la question amazighe (1996)
pour un statut officiel et juridique de tamazight. Des contacts sont établis,
à l'initiative de l'A.M.R.E.C.pour un échange de points de vue entre le
M.C.A. et les mouvances politiques et pour instaurer un dialogue au sujet de
la langue et la culture amazighes. Il est dit que tamazight doit être non
seulement enseignée, mais doit être également en usage dans les mass-média,
l'administration et dans la juridiction. Une lettre fut adressée au cabinet
royal au sujet de la révision de la constitution ( Pour la reconnaissance
.2002 : 16-18), elle est signée par 18 associations.
Une Lettre fut envoyée aux chefs de partis politiques pour une intégration
et une promotion de la langue et la culture amazighes dans le programme électoral
(A.M.R.E.C. 1997 : 49 - 50). En ce qui concerne
les activités culturelles, l'A.M.R.E.C. a organisé un colloque pour un
dialogue sur la diversité linguistique et culturelle, les actes de ce
colloque ont été consignés par écrit et publiés (Cf. A.M.R.E.C. 1998).
Parmi les activités des associations, on relève également la célébration
des festivités du jour de l'an amazigh, des objets antiques y sont exposés
et des traditions culinaires en voie de disparition sont restituées. On doit signaler
l'apparition de journaux amazighophones sans subsides de la part du gouvernement. Un télé-journal
éclair est diffusé dans les 3 versions dialectales: tarifit, tamazight et
tassoussit d'une durée très insuffisante, donc même vision séparatiste que
celle héritée de l'époque coloniale. Souvent la même information est
ressassée lorsqu'il s'agit d'une activité officielle. Contrairement à ce
qui se passe en Algérie, un seul journal télévisé diffusé dans une langue
commune et unifiée et s'adresse aux amazighophones quelle que soit leur variété
régionale; l'accent est mis sur les convergences plutôt que sur les
divergences. La revendication fondamentale est la reconnaissance de tamazight
par la constitution marocaine. Des militants de
l'association tilelli («liberté») sise à Goulmima, lors des manifestations
du 1er mai (1994) vont exhiber, pour la première fois, des banderoles écrites
en tifinagh. Ils seront arrêtés et incarcérés.
Un autre pas en avant va hisser la question amazighe à l'échelle
internationale au Congrès de Vienne des droits de l'homme 1993 et la création
du C.M.A. (le Congrès mondial amazigh). La question amazighe franchira les
frontières avec la tenue du 1er Congrès qui a eu lieu à Las Palmas, aux
Iles Canaries 27-31 août 1997 (A.M.R.E.C 1997: 137-140). Les Imazighen
deviennent de plus en plus conscients de la falsification de leur histoire
nationale (le slogan kabyle: corrigez l'histoire, l'Algérie n'est pas arabe).
L'historiographie du Maroc est donc à refaire à cause de la troncation de la
période anté-islamique des programmes scolaires, et de l’occultation des
personnages historiques: Abdelkrim Alkhattabi; Youssef Ibn Tachfine dont la mémoire
historique a été bafouée à Marrakech face au roi-poète Al Muاtamid
Ibn Abbad glorifié dans un cérémonial; Al Muاtamid
Ibn Abbad, menacé par les Espagnols durant la Reconquista, a demandé secours à Youssef Ibn Tachfine
qui est allé à la rescousse (Le Manifeste 2000: 18). Durant le Protectorat,
le premier cours d'histoire débutait par la formule inculquée aux écoliers
Marocains Nos ancêtres les Gaulois, tandis que le premier cours d'histoire
fait référence à la presqu'île d'Arabie et à des tribus arabes comme qaàtan
et اadnan.
Les deux ailes
culturelle et politique: Mais il s'est avéré que le militantisme «des
associations culturelles a atteint ses limites, elles n'arrivent pas à
canaliser le mécontentement des Berbères» (Manifeste., p. 13); c'est
pourquoi un Comité du manifeste amazigh fut créé (lajnat lbayaan
al'amazighi); un texte (bilingue) fut élaboré et baptisé Manifeste berbère
du 1er mars 2000, il est publié par l'association Assid, localisée à Meknès.
Ce manifeste est signé par 229 personnes; les signataires sont des
universitaires, des écrivains, des poètes, des artistes, des industriels et
des cadres. En Algérie,
l'action revendicative en Kabylie a connu le tournant qui a viré en tragédie;
celle-ci a été amplement suivie par les médias à l'échelle
internationale. La langue amazighe est finalement reconnue officiellement sur
le plan constitutionnel, par les autorités algériennes.
Alors que les associations marocaines préparent une marche sur Rabat
baptisée tawada «marche», néologisme du verbe ddu «marcher». Telles sont
les activités menées par les O.N.G. (organismes non gouvernementaux), au
sein de la société civile. Les autorités suprêmes
sont à l'écoute et n'ont de cesse pour tâter le pouls de la société: la
question a été soulevée dans de deux discours officiels: le premier
discours royal date du 20 août 1994 de Feu Hassan II; le second est prononcé
par S.M. Mohammed VI . Il s'est prononcé de manière claire et nette à ce
sujet et à plusieurs reprises pour lever l'ambiguïté à l'occasion d'un
Discours du trône du 31 juillet 2001. L'oevre réformatrice royale, de grande
envergure, est à situer dans le cadre de la modernisation du pouvoir et d'un
Etat démocratique, de droit. Ce projet fut concrétisé par la création de
l'Institut Royal pour la Culture Amazigh (I.R.C.A.), à Ajdir, Province de Khénifra,
au cour du Moyen-Atlas, le 17 Octobre 2001; la cérémonie fut marquée par
l'Apposition officielle du Sceau Royal au Dahir portant création de
l'Institut Royal de la Culture amazighe [texte publié dans Le Monde Amazigh
(bi-mensuel), du 18 octobre 2001, no 8]. Pour A. Khalifi (2001), la création
de l'I.R.C.A. met fin à une identité nationale unitaire et exclusive, c'est
l'annonce officielle d'une identité plurielle et tolérante. Le Maroc entame
une ère nouvelle et prône pour de nouvelles valeurs nationales fondées sur
le modernisme, la démocratie, le relativisme et le
pluralisme; c'est une coupure qui met fin à la folklorisation et la
péjoration de tamazight. Voyons
maintenant ce qu'il en est au niveau de la recherche académique, sachant que
les associations font appel à certains chercheurs et aux académiciens pour
qu'ils apportent leur contribution. Aménagement
linguistique: Il serait prématuré de parler d'aménagement linguistique pour
le moment sur le plan officiel, faute de mise en exécution des acquis décrétés
sur le plan officiel. Cependant, il y a tout un ensemble de travaux académiques
qui ont été enregistrés dans ce domaine aussi bien
en Algérie qu'au Maroc. L'aménagement linguistique est un ensemble de
mesures prises pour une intervention sur la langue, laquelle peut se traduire
par un traitement qui porte directement sur la langue; l'aménagement
linguistique se manifeste sous forme de décision prise par les instances
politiques. La première relève du plan linguistique; la seconde est de
l'ordre de l'extra-linguistique (juridique et institutionnel, cf. Achab 1996:
41-55 et Boukous 1999: 57). C'est un domaine qui fait appel à plusieurs
disciplines. Langue et culture
amazighes et recherche scientifique: La recherche englobe les différents
domaines: linguistique, littérature, histoire, anthropologie, etc. Des
approches scientifiques sont mises en ouvre pour l'analyse du corpus soumis à
l'étude. Des colloques scientifiques sont tenus. Des productions littéraires
englobant tous les genres: théâtre, poésie, roman, conte, nouvelle,
devinette deviennent de plus en abondantes. Des travaux de recherches
universitaires font appel à des théories et à des courants linguistiques
divers (structuralisme, fonctionnalisme, générativisme). Sur le plan
lexicographique, il y a une gamme de dictionnaires couvrant des variétés
linguistiques amzighes importantes (Cf. Serhoual 2001). On assiste également
à un travail de réhabilitation du lexique endogène au détriment d'un
emprunt massif, superflu et perturbateur qui mine le système morpho-lexical
de l'intérieur. On fait appel à la création lexicale pour les besoins de la
cause; cette néologie est dans le système; elle est offerte par la morpho-génèse
de la grammaire. Des méthodes
d'enseignement et des ouvrages de didactique amazighe sont mis à jour en
dehors de l'institution (Maroc et Algérie). La langue amazighe est enseignée
dans la plupart des grandes métropoles du monde, exception faite pour le
Maroc (pays numériquement le plus représentatif). Un pays comme la France a
reconnu tamazight comme seconde langue (Le Monde du 16 février 2002). L'accès
à Internet facilite le contact entre les chercheurs: la police amazighe est
mise à leur disposition en caractères diacritiques et en tifinagh (Tawiza,
mensuel, septembre 2002, no 53,2002 ). L'aménagement
linguistique vise la standardisation de la langue et le choix d'une graphie à
adopter (tifinagh, signe arabe ou latin). L'accent doit être mis sur les
convergences linguistiques à tous les niveaux (phonétique, morphologie,
lexique, emprunt et néologie). Le seul
moyen efficace pour faire face à la mondialisation est l'entrée en compétition
dans le domaine linguistique: toute langue doit se tailler une place au soleil
pour survivre. Il faut s'armer et faire appel aux moyens mis à la disposition
des hommes, utiliser les mêmes armes que celles employées par la
mondialisation: internet, les satellites et
la traduction automatique. * La langue amazighe
est en régression avant d'être phagocytée par l'arabisation ou par la
mondialisation. Il faut donc encourager la pluralité linguistique et
culturelle au même titre que la préservation de la faune et de la flore et
les sites considérés comme patrimoine universel par l'I.N.E.S.C.O. Il faut
une déontologie du respect réciproque des idiomes. Que l'on se rappelle l'idée
de Senghor qui compare le décès d'un vieillard appartenant à une société de
tradition orale à la mise en feu d'une bibliothèque; cette culture n'est pas
consignée par écrit. Que l'on se rappelle également Dumézil (cité par H.
Aourid 1991: 43) qui affirme que la disparition d'une langue orale emporte
avec elle une partie énorme du patrimoine culturel universel. Il en est des
cultures et des langues comme il en est de la flore et de la faune, et ce pour
un meilleur équilibre à la fois biologique, linguistique et culturel. Bibliographie
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2002 Dictionnaire tarifit-français & Essai de lexicologie amazighe,
2 volumes, XXX + 749 p. + 354 p., thèse de Doctorat d'Etat soutenue à la
F.L.S.H. de Tétouan, Université Abdelmalek Es-Saâdi, Dir. MM. Fernand
Bentolila & Miloud Taïfi (février 2002).
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