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  2006

(Janvier  2006)

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conférence de Barcelone sur les nations sans état en méditerranée
Nations: le droit à un état pour chaque peuple
Intervention de Ferhat Mehenni à la conférence de Barcelone le 24/11/05

Azul felawen. Fellanegh d-tin n nnif, d-iveddi n yisegh i wakken di tazwara n wawal, a-d nemmeslay zdatwen, d ger leg’nas, s teqvaylit, xas s tizzumelt. D tacveht.
Monsieur le Président, chers amis.
Le peuple kabyle vous salue depuis ses montagnes et ses vallées, ses villes et ses villages, ses épreuves et ses réussites, sa terre et celles de ses exils, comme il vous informe qu’il place beaucoup d’espoirs dans cette conférence historique sur les nations sans état à laquelle nous convie cette prestigieuse ville catalane de Barcelone. Que celle-ci trouve ici l’expression de notre reconnaissance, de notre admiration et de notre fraternité. Pour des problèmes de temps et de spéculations intellectuelles, nous n’aborderons pas dans cette communication la question des définitions pour montrer le distinguo qu’il y aurait à faire entre peuple et nation, tant ces deux notions sont aujourd’hui, selon les langues et les pays, allègrement interchangeables.
Nous sommes tous ici en butte à des pouvoirs qui ne veulent pas nous reconnaître. L’un des combles de l’absurde est d’être amenés à essayer de prouver notre existence à celui qui a décidé de nous nier. Le combat est perdu d’avance puisque nous sommes déjà coupables d’inexistence. Aussi, pour ce qui nous concerne en tant que Kabyles, soyons sérieux et remettons les choses en place, sereinement. La Kabylie dont les enfants, aujourd’hui, sont le tiers des Algériens, est une nation qui a perdu sa souveraineté en 1857 face à l’armée colonialiste française. La supériorité technologique militaire en eut raison à ce jour, suite à sa révolte de 1871. Les petits enfants des insurgés d’alors, voulant récupérer leur liberté au début du XXe siècle, s’étaient massivement investis dans le Mouvement de libération nationale au profit de l’Afrique du Nord jusqu’en 1962. Au lendemain de l’indépendance de l’Algérie, les responsables politiques de notre région (KRIM Belkacem notamment) comprirent très vite que la Kabylie était en train de perdre, face à l’armée «nationale», stationnée pendant la guerre derrière les frontières algéro-tunisiennes et algéro-marocaines, ce qu’elle venait d’arracher de haute lutte, au prix de centaines de milliers de morts et plus de sept ans de guerre, à l’armée française: sa liberté. Une insurrection militaire conduite par le FFS de Hocine AIT AHMED dès 1963 se termina par un désastre en 1965. Depuis cette dramatique aventure, le peuple kabyle hésitait à s’affirmer devant un pouvoir sanguinaire et obtus. Nos élites se tournèrent alors vers le combat identitaire, linguistique et culturel pour résister contre la politique d’arabisation mise en œuvre pour nous dépersonnaliser. Le MCB (Mouvement Culturel Berbère) venant de naître finit par déteindre près de dix ans plus tard sur toute l’Afrique du Nord berbérophone. Malgré le sabotage économique de la Kabylie organisé par le pouvoir algérien, malgré la pression fiscale exercée sur elle pour écumer tout excédent financier dégagé par notre région, malgré la répression permanente contre les militants kabyles dits «berbéristes», malgré le déni identitaire et linguistique dont nous étions victimes, nous avions continué à taire nos réelles profondes aspirations. Ce n’est que lorsque ce «pouvoir assassin», tira sur nos enfants au printemps 2001 que nous décidâmes de rompre définitivement avec la démarche et l’idéologie du MCB qui ont inspiré les partis politiques de la région, le FFS et le RCD. La revendication d’autonomie régionale pour la Kabylie fusa. Elle est, depuis quatre ans maintenant, portée par notre mouvement, le MAK. Nous pouvons aujourd’hui affirmer sans risque de nous tromper que le peuple kabyle est désormais en marche pour de nouveau maîtriser son destin et récupérer sa souveraineté sur son territoire.
Chers amis! Si la Kabylie et nos nations respectives sont dans la situation d’incapacité à accéder à leur pleine souveraineté, c’est parce que, partout dans le monde, les textes de lois énoncent les droits et devoirs des citoyens, ceux des états mais taisent étrangement ceux des peuples. Même la Charte des Nations Unies qui consacre le «droit des peuples à disposer d’eux-mêmes» s’arrête à la frontière de chaque état existant. Nulle «ingérence étrangère» n’avait le droit de s’exercer sur un état qui, à l’intérieur de ses frontières, opprime un ou plusieurs de «ses» peuples, dès lors que lui-même n’est pas pour l’ONU un état colonial, c’est-à-dire l’émanation d’une puissance étrangère. Le problème qui nous intéresse aujourd’hui, celui des nations sans état, ne se pose pas aux pays où il n’existe qu’un seul peuple mais à ceux qui en comptent plusieurs dont ceux qui bordent la Méditerranée. En effet, même l’Europe continue toujours d’être secouée par des conflits aux Balkans et par les dénis opposés à l’existence de peuples distincts à l’intérieur de ses états membres, comme la France, l’Espagne ou l’Italie.
Chers amis. Si, sur la rive Nord de la Méditerranée, l’Europe en construction se voile toujours la face devant ses propres nations dont on empêche l’accession à un statut d’état souverain par ceux érigés vers la fin du Moyen âge, il n’en demeure pas moins que sur son flanc Sud la situation est autrement plus dramatique. Colonisée par les puissances européennes au 19e siècle, la rive Sud s’est vue imposer des frontières qui n’avaient tenu compte que des intérêts des colonisateurs. Si en Europe c’étaient les peuples qui, au forceps, avaient créé des états, en Afrique du Nord c’est à chaque état nouvellement créé par la colonisation qu’il avait fallu, artificiellement, adapter une nation. La décolonisation à partir des années cinquante s’est avérée n’être qu’une simple reconduction des états coloniaux. Elle a été renforcée par la consécration de «l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation» comme principe immuable du droit international. Les peuples que ces frontières ont piégés malgré eux à l’intérieur de chaque pays ont été sommés par cette nouvelle norme de se taire ou de se battre pour la conquête du pouvoir, souvent ethnique. En Afrique du Nord, par exemple, tous les peuples berbères (Chleuh, Rifain et amazigh au Maroc; Kabyle, Chaoui, Touareg, Mozabite en Algérie; Djerbi en Tunisie et Zwari et Nefoussi en Libye) se sont retrouvés minorisés et contraints de subir le dictat des politiques d’arabisation qui, à terme, veulent leur mort.
Pourtant c’était en Algérie que s’était tenue, en juillet 1976, une réunion d’un certain nombre de pays du Tiers-monde pour proclamer «la Déclaration Universelle des Droits des Peuples» soutenant le principe, pour chaque peuple, de recouvrer sa souveraineté, y compris par les armes! Il s’agissait alors pour Alger de soutenir le «peuple du Sahara Occidental» contre le Maroc et le palestinien contre Israël. Il occultait superbement les peuples amazighs existants sur son propre territoire. Aujourd’hui, aucun des peuples berbères énumérés ci-dessus n’a acquis ses droits à sa reconnaissance et à ses propres institutions. Les états nord africains qu’on peut aisément qualifier de racistes au vu de leurs politiques anti-amazighes ont été jusqu’à fonder contre leurs peuples berbères «l’Union du Maghreb Arabe». Il n’en demeure pas moins que depuis le nouveau millénaire ces peuples commencent à s’éveiller à leurs droits légitimes comme l’atteste depuis 2001 l’existence d’une revendication d’un état régional autonome sur le modèle catalan, en Kabylie, puis au Rif et bientôt dans les Aurès (au Sud Est algérien).
Nous constatons malheureusement que la rive Sud de la Méditerranée n’est pas au même niveau de revendication que sa sœur du Nord où les nations opprimées, ici présentes, postulent toutes légitimement à leur indépendance. Sur la côte nord africaine, les vicissitudes de l’Histoire font que le statut de large autonomie pour nos nations sera largement suffisant pour des décennies. Pour passer de l’autonomie à l’autodétermination, à l’ordre du jour du débat de ce soir, nous devrions d’abord accéder à cette autonomie qui, déjà, s’avère laborieuse et difficile à arracher dans des pays où le personnel politique au pouvoir est aussi incompétent qu’arriéré. Nous avons donc besoin de votre soutien, nous avons besoin que vous nous preniez la main comme vous venez de le faire en nous honorant de cette participation à cette première rencontre des NSE. Notre solidarité avec vos revendications démocratiques est totale. La solidarité internationale entre nations opprimées est une nécessité et un devoir. Le peuple kabyle qui suit avec attention vos déclarations et vos actions vous accompagne de tous ses vœux de réussite.
Le cas des peuples sans état (PSE) ou des nations sans état (NSE) n’est malheureusement pas le propre de la Méditerranée. Toute l’Afrique et toute l’Asie sont en proie à la même situation et si l’on n’y remédie pas rapidement, ces continents seront bientôt le théâtre d’horreurs comme celles qu’a déjà connues le Rwanda, l’ex Yougoslavie, le Libéria, le Congo, le Soudan, l’Irak, le Sri Lanka, l’Afghanistan… Les exemples de par le monde sont légion. C’est pourquoi, comme vous le savez chers amis, plutôt que de s’échiner à garder coûte que coûte une unité de façade ou une unité de dupes de chaque état où des peuples s’opposent ou sont en butte à leur émancipation, il serait plus sage pour l’humanité de s’orienter vers des modèles de gouvernance qui ne compromettent pas la paix et la démocratie dans les pays où existent plusieurs nations. Les systèmes de fédéralisme, ou à tout le moins, des autonomies régionales qui sont un moindre mal par rapport à leur situation actuelle, constituent la seule voie de salut pour permettre des évolutions heureuses et consenties par toutes les nations en proie à des problèmes de souveraineté. A ce titre, quoi qu’on puisse penser des Américains dans le Golfe, la nouvelle constitution irakienne qu’ils viennent d’inspirer, fondée sur le fédéralisme et la démocratie, est un exemple qu’il ne serait pas raisonnable pour nous de balayer d’un revers de la main. Nous avons nos amis Kurdes dans cette rencontre, ils nous diront mieux que quiconque les avantages qu’ils en tirent par rapport au régime de Saddam Hussein avec ses opérations «Anfal» de 1988 et 1989 à travers lesquelles il les exterminait. Ils nous diront aussi si en Turquie, ils seraient plus à l’aise avec un système fédéral à la place de ce qu’ils subissent depuis plus d’un siècle.
Chers amis! Si nous voulons changer le monde dans le sens du progrès pour toute l’humanité, nous sommes condamnés à nous remettre en cause dans nos manières de penser celle-ci, la planète et l’avenir des peuples. Il ne s’agit pour nous ni de dresser les nations les unes contre les autres, ni de faire abstraction de leurs différences, voire de leurs oppositions. Notre objectif est de rendre le monde plus humain, plus tolérant, plus libre, plus ouvert, plus démocratique et plus équitable. Il s’agit surtout de bâtir un monde plus accepté par tous sans pour autant que soit compromis le développement durable de nos pays respectifs. Ce sera là une réinvention de l’espérance et de l’idéalisme humains sur la base non pas de la répression de nos différences, non pas sur celle des dénis multiformes auxquels nous avons été confrontés tout le long de notre Histoire et qui continuent d’empoisonner notre quotidien, mais sur celle du respect mutuel entre les nations à partir d’abord de ce qu’elles sont. Il ne saurait y avoir, sur une parcelle de la planète Terre, de paix qui puisse être fondée sur une injustice, un contrat d’unité nationale inique assurant la domination d’un peuple sur un ou plusieurs autres. Nous pensons que l’un de nos défis majeurs d’aujourd’hui est de doter chaque nation, chaque peuple qui le souhaite, d’un état qui lui soit propre. C’est une manière de réaliser la mondialisation des valeurs et des peuples à la place de celle des marchandises à laquelle le capital souhaiterait nous soumettre et nous réduire. Pourquoi un état pour chaque peuple? Car l’état c’est comme un toit pour un être humain, un tuteur pour une plante, un avocat pour un justiciable. Un peuple ou une nation ne se réalise pleinement qu’au travers de ses propres institutions. L’état est l’incarnation d’un peuple en tant qu’être collectif. Il en est sa consécration. Un peuple sans état est un esclave.
Chers amis, La meilleure façon de conclure nos travaux serait de considérer ce colloque sur les nations sans état en Méditerranée comme le premier du genre qui en appelle d’autres dont la périodicité est à définir. Nous manquerions, par ailleurs, de générosité à la limiter aux seuls peuples méditerranéens, tout comme il serait injuste que ses frais soient supportés par la seule digne et généreuse Catalogne. L’ONU est à mettre à contribution à travers la mise sur pied d’une organisation internationale des «nations sans état» qui sera, nous en sommes sûrs, d’une aide précieuse pour le monde et d’une grande efficacité dans la résolution des conflits mettant aux prises des peuples contre des états, indispensable donc pour le maintien de la paix à travers la planète.
Dans tous les cas, il serait plus judicieux de rédiger une nouvelle charte universelle des droits des peuples, d’en faire une nouvelle proclamation et de la soumettre aux instances internationales (Assemblée générale des Nations Unies, Conseil de sécurité) pour son adoption et sa ratification. Cela nous permettrait de construire, pour demain, un monde dont n’auront pas à souffrir les générations futures.
Je vous remercie. Gracias!
Barcelone le 24/11/05.
Ferhat MEHENNI
Porte-parole du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie. (M.A.K)
(Source: Kabyle.com: le dimanche 27 novembre 2005)

 

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