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L’euphonie de la poésie de Khadija Arouhal à travers le poème/ incipit: Tasa nu

Par: Ayad Alahyane (Filière des Etudes Amazighes, Ibn Zohr- Agadir)

 

Il est certain que le lecteur est emporté au premier abord du recueil de Khadija Arouhal, «azvawan n urmmadv», (La symphonie du marasme) publié en 2009. La force séductive de sa poésie résulte certes d’un ensemble d’images novatrices, frappantes et évocatrices que la poétesse emploie mais aussi d’un dispositif phonique mis en place par l’écrivain, lequel dispositif dote les vers d’une harmonie acoustique qui confère à l’ensemble du vers sinon à tout le poème un timbre mélodieux et une musicalité rythmée.

Pour asseoir ce constat de lecteur averti, nous nous proposons d’étudier le poème/incipit «tasa» nu non dans son aspect thématique mais sous un angle purement phonique. Pour ce faire et pour la commodité de l’analyse, nous allons tout d’abord procéder à la décomposition du texte en parties:

Partie1:

Tasa nu maxx tgit

Asddi n tgudvi?!

Maxx lligh tusit

Gh tassast agudi?!

La musicalité de cette partie résulte de l’allitération de la consonne constrictive sourde «s» présente dans chaque vers: tasa-asddi-tusit-tassast. Ce timbre sourd rejoint la tonalité élégiaque des vers et reflète en toute sincérité l’état d’âme de la poétesse. Il semble par un simple examen de ces mots que le dernier tassast porte en lui-même cet écho de la consonne alvéolaire sourde «s», ce qui fait de l’image acoustique (le Sa selon De Saussure) un support solidaire avec le contenu. En d’autres termes, cette répétition reflète bel et bien cette charge, ce fardeau porté en agudi. En second lieu, vient l’allitération de la vélaire sonore «g» présente presque de toute la strophe. Tgit-tagudvi-agudi- sans oublier que la consonne «gh» uvulaire sonore peut parfaitement combiner avec sa variante dialectale «g», ce qui donnera lieu à llig/g tassast. Relevons également, celle de la dentale sourde «t» qui rythme par occlusion (c’est une consonne occlusive qui suppose une fermeture de la bouche et une ouverture qui s’ensuit) ce texte par sa résonnance dans les quatre vers à des lieux variés. L’harmonie phonique dans ce bloc vient également de la répétition du morphème interrogatif «maxx» qui vient appuyer le questionnement de la poétesse. La richesse naît aussi de l’emploi d’une forme de rime qui dote la fin de chaque vers d’un écho sonore cadencé; tgit rime avec tusit (it), et tgudvi rime avec agudi comme forme de paronomase (le «dv» est l’emphatique de «d»).

Partie2:

Maxx tujjit artum

Ad gim ikrz aggasn

Is d gim tikssvadv

D wargigi?

Cette partie ne constitue pas une entité à part. Elle s’enchaîne avec la première étudiée ci-haut car en fait le texte est un tout qu’il faut prendre dans sa globalité. Sa décomposition obéit certes à un principe thématique et structurel, mais il ne faut oublier que le texte reste toujours un «continuum». Notons ici, la résonnance du «s», du «t» avec une spécificité à savoir l’allitération du «g» dans gim-aggasn-gim-wargigi. Il semble encore une fois que cette répétition renforce le sémantisme des mots «aggasn» nom pluriel, et «wargigi» qui désigne un état du corps dans une activité convulsive «répétitive».

Partie3:

Maxx ad d ur tssutlt

Iwtta n wuzzal

Ad km sar ur ilkm

Usmmidv n tgrst

Ula tirghi n unbdu

Ad km sar ur issalla

Uzngig n waggas

Ula tssiwd km

Tsgni n tillas

Le morphème interrogatif et anaphorique «maxx» inaugure cette partie et installe de prime abord la résonance acoustique le liant ainsi aux vers précédents. Cet écho permet de ponctuer le poème à des endroits précis choisis par l’écrivain. Ici encore le phonique, le verbal, ou le formel se veut un reflet de l’état d’âme qui est dans le questionnement permanent. La sourde «s» vient confirmer cette idée par son allitération qui jalonne tout le vers; tssutlt-sar-usmmid-tgrst-sar-issalla-waggas-tssiwd-tsgni-tillas. La surdité certes traduit le mal intériorisé par le poète et le questionnement se veut une sorte d’extériorisation et donc de catharsis. La reprise anaphorique «ad km sar ur» fait écho également et instaure une forme de parallélisme au niveau des deux vers. Sans oublier la semi-voyelle «w» dans le deuxième vers de cette strophe: iwtta n wuzzal. A cela s’ajoute la rime qui résonne à travers la tension de certaines consonnes des mots de la fin comme issalla-waggas- tillas comportant l’assonance «a».

Partie 4:

Ha nn igh tkrm tgrst

Rad sul trgh tizi

Igh tnfd trghi n unbdu

Tg afdaddu

Rad d sul isvudv uzuzwu

Iqqan d atrs

Mqqar ifrs

As ijji

Iqqan d i tsgni n tillas

Ad tzri

Mqqar d s unzvarv

N itri

Ce qui est nouveau dans cette partie à part ce dont nous avons parlé comme allitération, est une forme de répétition phonique entre le verbe est son nom comme c’est le cas de trgh/trghi-tnfd/afdaddu. Le choix des mots est aussi important comme nous l’avons déjà vu. Afdaddu qui est une forme d’augmentatif puisqu’il contient une idée d’exagération se voit supporté par l’allitération de la dentale occlusive «d» qui lui confère une résonnance sourde comme pour signifier que le poète se consume de l’intérieur. Ce genre d’écho est également produit par l’allitération de la dentale vibrante «r» qui en réalité confère aux vers cette vibration qui va de pair avec l’idée de «afdaduu» comme étant une grande vibration de flammes. Le poème chute par la résonnance des rimes atrs/ifrs-ijji/izri/itri.

Pour ce qui est des assonances, nous pouvons dire que c’est une caractéristique frappante de la poésie amazighe en générale car la langue amazighe comporte un consonantisme important alors que le système vocalique est réduit à la trilogie «a, i, u». Ce qui fait que l’assonance comme figure phonique est fortement présente dans la poésie. Néanmoins, le choix des mots surtout en poésie doit obéir à un principe d’harmonie vocalique, de phonotactique qui donne au vers sa fluidité mélodieuse tant au niveau de l’encodage que du décodage. Remarquons cela dans la chute de la voyelle initiale de inu «de moi» dans tasa nu (revient dans un exemple comme tabrat inu). Voyons la disposition des voyelles dans la première strophe:

1- a-a-u-a-i

2- a-i-u-i 

3- a-i-u-i

4- a-a-a-u-i

 Ce dépouillement nous montre deux choses fondamentales: d’abord le vers 1 et le vers 4 comportent le même nombre de voyelles identiques avec une légère différence au niveau de l’emplacement de des trois dernières voyelles, ce qui n’est point fortuit dans la mesure où cette disposition instaure un chiasme phonique: u-i-a devient a-u-i. Ensuite vient la frappante harmonie du vers 2 et 3 puisqu’ils contiennent le même nombre de voyelles identiques disposées dans le même ordre. Ceci confère à la strophe certes un parallélisme phonique au niveau syntagmatique mais aussi une symétrie acoustique au niveau paradigmatique.

Nous nous ne prétendons point à l’exhaustivité dans cette analyse. Nous sommes convaincus qu’une étude approfondie peut nous faire découvrir la richesse de la poésie d’Arouhal. Notre analyse n’est que superficielle, mais elle ouvre une piste de recherche dans la nouvelle poésie amazighe. Nous avons vu, des exemples à l’appui, que la poésie de Khadija Arouhal est une poésie à résonance phonique. Qui dit phonie dit l’essence même de la poésie, car celle-ci est faite premièrement pour qu’elle soit dite, écoutée et savourée par l’oreille. Si nous avons à parler métaphore de la poésie d’Arouhal, nous dirons que son poème s’articule en un orchestre où chaque instrument apporte sa contribution harmonieuse à l’édifice musical (pour reprendre son terme azawan). Un orchestre dont la symphonie ne discorde pas devant un maestro qui n’est que le poète lui-même.

Pour conclure cette étude succincte de ce poème, nous dirons que la poésie de Khadija Arouhal est une poésie riche tant au niveau thématique qu’au niveau phonique. Il est certain que l’acte d’écriture chez elle est un acte conscient, une recherche judicieuse de mots évocateurs constituant tout au long du poème une trame phonique, un réseau résonateur qui donne à la lecture du texte son charme séduisant. La disposition des sonorités dans le texte d’Arouhal crée chez le lecteur une autre disposition conative qui facilite certes la réception du texte mais le plus important sa dégustation. Voici donc une poésie qui frappe, qui attire et qui vous plonge dans l’univers des mélodies et des sonorités au point de croire que vous êtes devant un concerto. Les mots dans la poésie d’Arouhal créent leur propre parade expressive qui défile en paroles ensorcelantes. C’est pour cela, nous dirons que la poésie de Khadija Arouhal constitue une valeur ajoutée à la néolittérature amazighe non seulement parce que c’est une littérature féminine moderne mais aussi elle assoit de par sa langue les fondements d’une langue amazighe qui se veut poétique et littéraire.

 

 

 

 

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