Uttvun 76, 

Tamyûr 2003

(Août 2003)

Amezwaru

 (Page d'accueil) 

Tamazight

Netzvayet s tmazight deg wgherbaz azayez

Muhend abeldi

Izri n tudart 

Oica Mezrighd

Aghuyyi n wawmaten

Ifeqqeo dadad imazighen

Yurew icoeb asadv

Taghuyyit

Kenniw d awmaten

Ussan n tisegma

A Sifaw nnegh

Tasurifet n tidert 

S wuddur

Tawargit

Lunis 

Qrar

Toensvart

Français

En marge du vendredi 16 mai 2003

De l'"oraliture" à laLangue  littérature

Langue et violence au Maghreb

 La situation du berbère au Maroc 

C'est pour quand l'union des Etats de Tamazgha?

Berbères, libres et fiers de l'être 

Le vieux kabyle et l'arabe

Plainte contre les médias de la haine  

 

العربية

مرحبا بالأمازيغية في المدرسة العمومية

  هوس العربومانيا

الاستمرار في إعادة إنتاج أسباب 16 ماي

عودة إلى موضوع تيفيناغ ـ يركام

إتنوغرافية رقصة أحيدوس

القومجية والإسلاميزم: وجهان لعملة واحدة

المفاهيم باللغة الأمازيغية

على هامش سنة الجزائر بفرنسا

الإعلام الأمازيغي

أالمركب الثقافي للخميسات

عن الشيء الذي هو غير طبيعي

عذرا لوناس

أنت دم في عروق الأمازيغ

أغبالا تكرّم بحري وتدين الإرهاب

المؤتمر الليبي للأمازيغية 

بيان لجمعية تيفسا

بيان تنديدي لجمعية تاماينوت

بيان لجمعية تاماينوت

بيان لجمعية إيصوراف

جمعية آيت حذيفة

ببيان لجمعية إيموزّار

 

Berbères, libres et fiers de l'être

Par: Belkacem Lounes*

 

Qui sont les Berbères? Les Berbères constituent le peuple autochtone d'Afrique du Nord, présent depuis la plus haute Antiquité dans cette région. Aujourd'hui il subsiste une trentaine de millions de berbérophones occupant des territoires plus ou moins vastes, répartis sur une dizaine de pays: Maroc (Rif, Atlas, Sous), Algérie (Kabylie, Aurès, Chenoua, M'zab), Tunisie, Libye, Egypte (oasis de Siwa), Canaries, et le pays touareg découpé par les frontières de six Etats (Niger, Mali, Mauritanie, Burkina Faso, Libye, Algérie). Alors que l'appellation «berbère» qui vient du latin barbarus, est le nom donné par les Romains à tous les peuples qui leur étaient étrangers, les Berbères se désignent eux-mêmes par le terme d'«amazigh» qui signifie «homme libre».

Du VIIIe siècle avant J.-C. jusqu'au XIXe siècle de l'ère chrétienne, les Berbères ont eu à faire face à de nombreuses invasions (phénicienne, romaine, vandale, byzantine, arabo-musulmane, ottomane, française) qui se sont toutes déroulées dans la violence pour imposer la domination des conquérants.

Peuple méditerranéen et saharien, les Berbères constituent le substrat ethnique et socioculturel de l'Afrique du Nord auquel sont venues s'ajouter les composantes juive, européenne et arabe. Réputés pour leur hospitalité légendaire, les Berbères n'ont jamais livré bataille en agresseurs mais toujours en résistants défendant farouchement leur liberté et refusant de vivre sous domination. De tous les peuplements étrangers venus s'établir sur les terres berbères, seuls les juifs ont su vivre en harmonie avec les populations autochtones, partageant en partie leur mode de vie, parlant leur langue et les influençant en retour.

Sur le plan religieux, les Berbères ont toujours été pluriels: après avoir connu l'animisme et le paganisme, ils ont subi l'influence du judaïsme, du christianisme et de l'islam. Mais ces religions n'ont pas été adoptées de manière orthodoxe, elles ont toujours été adaptées à leurs coutumes et à leur mode de vie propres. Ainsi, le droit berbère, dit «azref», contrairement au droit musulman, est tout à fait indépendant de la sphère religieuse. Le Berbère est donc par essence laïc et égalitaire.

Après avoir consenti le plus lourd des sacrifices dans la lutte pour la décolonisation de l'Afrique du Nord, les Berbères se retrouvent aujourd'hui à vivre une situation inédite de «colonisation interne» qui n'a rien à envier à la colonisation d'hier. Par la négation de leur existence, par la falsification de leur histoire, par les interdits qui frappent leur expression culturelle, par la persécution implacable pouvant aller jusqu'au crime, comme c'est le cas en Kabylie, les Etats nord-africains mènent une politique ethnocidaire qui vise à effacer toute trace de berbérité encore vivante. A l'évidence, cette politique découle du rattachement artificiel de ces pays au monde arabe moyen oriental et son corollaire: une seule langue, l'arabe, et une seule religion, l'islam. Conformément à ces options fondamentales, les gouvernements de ces pays mettent un zèle particulier à poursuivre le processus d'arabisation entamé il y a plus de quatorze siècles, sous couvert de l'islam. Et l'amalgame entre la langue arabe érigée en langue «sacrée» du Coran et la religion musulmane est sciemment entretenu afin de culpabiliser les Berbères musulmans et de les empêcher de s'opposer à l'arabisation, véhiculée par l'islam. Au besoin, les mosquées, l'école, les médias publics et la presse panarabiste s'emploient à cultiver le mépris et la haine des Berbères réfractaires à l'idéologie dominante, les présentant comme des sauvages bons à «civiliser», c'est-à-dire à arabiser ou des antimusulmans, des mécréants qu'il est légitime de combattre.

Au fur et à mesure qu'ils prennent conscience de ces stratagèmes, les Berbères reprennent confiance et s'organisent dans tous les pays où ils vivent, pour défendre leur droit à l'existence en tant qu'identité, en tant que peuple.

L'immigration berbère en France est l'une des plus anciennes puisqu'elle remonte à la fin du XIXe siècle. Elle répondait à la fois aux besoins de mobilisation des soldats en période de guerre (Première et Seconde Guerres mondiales) et au déficit de main-d'oeuvre, notamment dans les secteurs de l'industrie et du BTP. On estime actuellement l'immigration berbère à environ deux millions d'individus, contribuant en toute discrétion à l'épanouissement économique, scientifique, artistique et sportif de la France. Il est utile de rappeler par exemple que Edith Piaf, Mouloudji, Daniel Prévost, Isabelle Adjani, Zidane et bien d'autres personnalités de tous horizons, sont le fruit de cet apport berbère.

Les Berbères ont naturellement retrouvé dans les fondements de la société française, les valeurs essentielles sur lesquelles repose leur propre société : démocratie, liberté, laïcité, équité. Ils n'ont donc pas eu de difficultés majeures à adhérer au modèle républicain d'intégration, tel qu'il leur a été proposé.

Aujourd'hui tout le monde reconnaît que ce modèle a échoué, ou du moins connaît une grave crise dont les symptômes sont le malaise social qui sévit dans les banlieues et la montée du communautarisme que d'aucuns affirment même qu'il est encouragé, au moins par laxisme, par ceux-là mêmes qui sont censés le combattre. Ainsi, les Français d'origine non européenne ne sont plus considérés comme des «citoyens français» comme l'exigerait le principe de l'intégration républicaine, mais plutôt désignés par rapport à leurs origines réelles ou supposées. Les citoyens français d'origine berbère découvrent alors avec étonnement qu'ils sont «arabes» ou d'«origine musulmane», ce qui est à la fois insensé, stigmatisant, ignorant de la réalité berbère, à moins que ce ne soit par volonté de l'occulter?

La France va plus loin dans l'abandon de ses valeurs modernes, notamment la laïcité, lorsque, prétendant organiser l'islam de France, elle ne fait en réalité qu'encourager l'islam en France. Elle l'a fait en créant le Conseil national du culte musulman qui ne représente que ses membres et ses imams dont la plupart sont aux ordres de puissances étrangères. Tout se passe par ailleurs comme si la France ne faisait que relayer ici les politiques d'arabisation en oeuvre dans les pays d'origine.

En tout état de cause, la très grande majorité des deux millions de Berbères de France ne se définit pas par rapport à une éventuelle religion, qui ne serait d'ailleurs pas forcément l'islam, mais par rapport à leur identité propre. De même, ils ne se reconnaissent nullement ni dans cette politique française à courte vue, ni dans ces organisations artificielles abusivement qualifiées de «représentatives» d'une «communauté musulmane» inventée pour la circonstance et dont les chiffres sont exagérément gonflés.

C'est dans ce contexte de grave crise des valeurs républicaines que les Berbères de France sont amenés à s'interroger sur leur place dans la société française, sur leurs revendications d'être considérés comme des citoyens à part entière et sur leurs valeurs identitaires et culturelles qu'ils souhaitent mettre au service de la République des Liberté, Egalité, Fraternité, Laïcité et des Droits de la personne.

* Président du Congrès mondial Amazigh.

(Source: Le Figaro du 27/06/2003)

Copyright 2002 Tawiza. All rights reserved.

Free Web Hosting