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  2005

(Janvier  2005)

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Itri, l’éternel.
Par: Mohamed El Bouazzaoui (Casa)

C’est un jeudi, jour de Souk hebdomadaire à Temssamane. En dépit du froid glacial de l’hiver, un petit cercle est vite crée autour du conteur, un habitué du souk. Il commence par faire sortir son bendir, d’ailleurs son seul et unique matériel. Il se met au centre de la helka, pose sa main gauche sue sa tête, plonge dans une petite réflexion avant d’entamer son discours.
Idir naquit dans une famille au bord de la misère, grandit écrasé par le fardeau de la responsabilité. Son père mourut et tout le destin se trouva entre ses mains: une mère à protéger, des lopins de terre à cultiver, des oliviers à entretenir. Idir se mit à travailler d’arrache-pied, mais la terre était ingrate. A chaque fois qu’il essayait de renoncer à ses occupations, sa mère, Fetouch, l’en dissuadait. Elle piquait une crise de colère quand son fils, au bout de ses forces, lui révéla son intention de partir travailler à l’étranger. Elle y opposa un refus farouche. Il voulait emboîter le pas à son ami d’enfance, Itri. Il voulait se délester de la misère, assurer d’autres revenus, garantir son avenir, mener une vie décente…. La France, terre d’iroumayanes, faisait rêver Idir, il passait des heures à y penser, à nourrir des illusions.
Mais, un soir, sa mère lui parla sans ambages.
-Il est hors de question que tu partes.Veux-tu faire comme Itri? Veux-tu me laisser seule? A qui vas-tu confier les biens que ton défunt père t’a légués?
Fetouch pleurait, Idir perdit son appétit et rejoignit sans piper mot, sa chambre. Il n’arrivait pas à fermer les paupières, tellement contrarié par la position de sa mère. Comme dans un rêve, Idir vit son père faire les cent pas dans sa chambre, grommeler des propos intelligibles, le regarder fixement dans les yeux. Un regard chargé de reproches. Idir se réveilla, sortit promptement de son lit, alluma la lampe à pétrole et s’approcha, les larmes aux yeux, le cœur serré, du portrait de son père. Une aura impénétrable se dégageait de ce visage à la barbe blanche. Idir comprit que même son père n’acceptait pas son projet. Fetouch vint frapper à la porte de son fils, apportant dans un plat de cuivre, le petit déjeuner. Idir avait l’appétit coupé, le visage de son père le hantait. La maman renchérit sur le sujet de la veille.
-Tu as pris de l’âge mon fils, dit-elle, tant que je suis vivante, tu dois te marier.
Idir sombrait dans un silence sans précédent, et comprit que sa mère se mettait en quatre en vue de le garder tout près d’elle.
-J’ai rencontré ton oncle. Je lui ai demandé la main de sa fille, Tlaytmasse, elle est de notre sang . Il accepte… Jeudi prochain, les fiançailles.
Idir demeurait stupéfait. Sa mère avait anticipé les choses, préparé du henné, une bague en or et invité la famille. Pris au dépourvu, Idir esquissa un petit sourire à peine perceptible, baissa sa tête après avoir embrassé celle de sa mère.
Juste après les fiançailles, Idir convola en justes noces. Ourar fut marqué par Arazik, rituel ancestral .Tout le douar avait pris part à la fête. C’était un événement inoubliable.
Idir ne tarda pas à renouer avec son travail aux champs. Il était davantage motivé, trouvait un plaisir inouï à cultiver la terre, à conduire son troupeau.Même le douar semblait, à ses yeux, prendre une allure et une couleur différentes. Sa nouvelle vie métamorphosa complètement sa vision, lui donna des ailes et s’attacha viscéralement à sa campagne enclavée, au point de ne plus songer à partir, à franchir le détroit, à bord d’une pattera. Ce projet ne lui effleurait point la tête. Des jours, voire des mois, s’étaient égrenés comme les grains d’un chapelet. Sa femme était enceinte. Un beau jour, revenant de la forêt où il partait chercher du bois, entendit de loin jwarou de sa mère. Il ressentit alors des frissons dans le dos. Il pressa le pas. Sa mère l’attendait sur le seuil de la maison. Elle lui annonça la bonne nouvelle.
-Idir, Dieu merci, tu as eu un superbe bébé, de sexe masculin. Je l’ai prénommé Itri.
-Comme vous voulez Ayamma, ag mantakhssad, J’accepte volontiers le prénom que vous proposez. Je suis aux anges!
Le jour du baptême, Idir égorgea le meilleur de ses moutons et invita tout le monde. Une euphorie totale. Mais vers la fin de l’après-midi, une mauvaise nouvelle tomba, comme le tonnerre, sur la campagne et ne manqua pas de gâcher la fête. Itri, fils de Yamna, était mort à Bastia, le jour même de la naissance du petit Itri. Ses funérailles étaient prévus pour le lendemain. Toute la tribu sombrait dans le deuil.
Le conteur s’assit sur le bât de sa monture, posée à même la terre. Il avait le front ruisselant de sueur. De la helka provenaient des soupirs. Les gens avaient le visage crispé, des larmes au bord des yeux. Le conteur fouillait dans sans son sac avant de faire sortir un bout de papier jaunâtre.
-Ne partez pas! J’ai quelque chose à vous lire. Cette lettre on l’a trouvée dans les affaires d’Itri. Il prit un air des plus chagrinés avant d’entamer la lecture du texte.
-Je serai laconique. Je réalise que vous m’en voulez. J’ai dû revenir parmi vous, j’ai dû faire quelque chose pour vous. Mais, bientôt, je serai de retour. Les médecins ont déjà prévu la date de ma mort. Tous les bilans médicaux que j’ai subis ne relèvent aucune maladie grave, ni d’infection virale. Tout bonnement, je me sens ruiné, je me sens découpé de mes racines, dessaisi de mon identité. Ce sentiment m’a miné, je n’arrive pas à dormir, j’ai l’impression que mon âme avait délogé, déserté mon corps décrépit. J’ai péché en oubliant ma langue maternelle. Je ne parle qu’un langage saugrenu, bâtard. Ma maladie est essentiellement due à cet atroce oubli… J’ai fait un rêve qui fait toute ma consolation: un autre Itri verra le jour au douar, il ne m’emboîtera pas le pas. Prenez bien soin de lui. Il sera votre lumière.
Une vieille femme, aux joues tatouées, entra au centre de la helka, cria de toutes ses forces: -Ayammi Itri inou, Ayammi atssa inou.
( Mohamed El Bouazzaoui(Casa), Bouazzaoui15@hotmail.com)


 

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