Numéro  56, 

  (Décembre  2001)

Amezwaru

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Tamazight

Ddvapir n tghennawt n usinag n tussna tamazight

Anebdu

Asawar

Illan

Medden, mas g kkan?

Ashinneb n izvewran

s.o.s tamurt nnegh

Tamacaput n imzvyanen

Tifraz n tsrit n wenzvar

Tasfift n Rrayes Muhmmed ben yahya

Français

Qu'est-il- de l'amazighité loin des imazighn?

Quel alphabet pour tamazight?

Uniformiser ou diviser tamazight?

bmce empoisonne tamazight

Lettre ouverte à un père amazigh

Interview avec Karl-G Prast

العربية

ظهير إحداث المعهد الملكي للثقافة الأمازيغية

رد على مقال السعيد الحسن

كلمة مجنحة

من مفارقات القول الشعري الأمازيغي

وثائق تاريخية

هوروس والأمازيغية

العنصر يرفض ترسيم الأمازيغية

تكريم المايسترو موحا أولحسين أشيبان

النبض الغافي

 

 

 

 

A propos de la standardisation: Uniformiser ou diviser tamazight?!

Par: Lahbib Fouad

Le Centre Tarik Ibn Zyad pour les études et la recherche a organisé une conférence-débat le 3 octobre dernier à Rabat sur le thème de la standardisation de la langue tamazight, présenté par le Professeur Abdellah Bounfour, enseignant à l'Institut National des Langues Orientales (INALCO) à Paris.

Dans cet article, bien que je ne partage aucune des assertions avancées par le conférencier,  je n'ai pas l'intention de revenir sur tous les points qu'il a soulevés dans son intervention. Je souhaite simplement poser certaines interrogations au sujet de la langue tamazight et de son devenir.

Dès le début de son intervention, Mr. Bounfour a tenu à rappeler et préciser qu'il va utiliser le qualificatif "berbère” au lieu de tamazight!! En avançant pour argument, l'usage du mot "berbère“ dans les milieux "scientifiques"!! La persistance à utiliser la dénomination "berbère" par le conférencier est perçue par nombreux amazighs comme une volonté de perpétuer la tradition colonialiste qui, elle même a changé depuis que Larousse a introduit les mots amazigh et tamazight en 1998 dans son dictionnaire!! La vraie raison qui pousse Mr. Bounfour à utiliser quand même le péjoratif "berbère" est le fait que dans son approche dialectalisante, tamazight risque de faire penser au parler du Moyen Atlas marocain. Et, comme le conférencier appartient sûrement à un autre accent régional, et qu'il plaide par ailleurs pour le choix d'un "dialecte" pour référentiel standard, Mr. Bounfour a finalement opté pour le terme "Berbère" et ce pour dissimuler son approche régionaliste et dialectalisante. Pourtant cet amalgame est depuis longtemps dépassé par le mouvement amazigh ainsi que par l'ensemble des habitants de l'Afrique du Nord!!

Juste après sa précision "berbérisante", Mr. Bounfour a donné une définition de la standardisation pour le moins que l'on puisse dire médiévale et subjective. C'est selon lui "choisir un référentiel dialectal" qui, par la suite sera généralisé... Pour illustrer son opinion, il rappelle que la langue française est construite sur le parler de l'Ile de France imposée au reste des français!! Une politique linguistique du moyen âge serait-elle valable encore aujourd'hui?! En ce domaine, la science et le savoir n'ont pas évolué depuis?! Le cas du français peut-il être un modèle valable aussi pour tamazight?! le même modèle qui a imposé l'arabe au détriment de tamazight en Afrique du Nord!?

Pourtant, le problème n'est pas de choisir et d'imposer un "dialecte" donné au reste des imazighen!! Il s'agit bel et bien de la logique la plus adéquate pour ECRIRE les "dialectes" les plus représentatifs conformément à une orthographe grammaticale standard et uniforme, partout où tamazight est parlée. Ensuite, comme pour toutes les langues, les locuteurs amazighophones garderaient leurs accents respectifs sans pour autant que l'écrit change d'une région à une autre. Un francophone canadien prononce-t-il le français comme à Paris, aux Antilles ou aux Iles Maurice?? N'est ce pas que c'est l'écrit qui est commun à toute la communauté francophone??

Comme pour dissimuler le vrai problème que soulève toute standardisation, Mr. Bounfour, pendant toute son intervention, n'a à aucun moment cité le mot ECRITURE ni celui de TRANSCRIPTION encore moins celui de GRAPHIE comme s'il s'agissait de standardiser les réalisations phonétiques dialectales!! Rien que pour ça, je doute même des compétences de notre "éminent" professeur en le sujet qu'il a fait semblant de traiter... C'est par la suite, pendant le débat et en réponse à une question posée au sujet du "choix" du caractère, que Mr. le conférencier a avancé une de ses dernières spéculations en la matière en affirmant: "tamazight peut démocratiquement s'écrire en trois graphies différentes" en insistant sur le caractère démocrate des "berbères"!! Avancer cette absurdité, c'est mépriser et sous-estimer la langue tamazight. C'est une volonté suspecte de vouloir enfermer tamazight dans ce ghetto de "dialecte" impropre à tout enseignement, en se rangeant par ailleurs aux cotés de ceux qui pensent toujours que les imazighen sont éternellement incapables de prendre en charge leur culture et le devenir de leur langue!! C'est d'autant plus aberrant qu'une négligence d'une telle taille est affirmée par quelqu'un qui se veut "scientifique"!! Comment, lorsque on prétend analyser les voies de la standardisation de tamazight on n'est même pas capable de décider de la graphie susceptible de réaliser cette opération?! Comment est-ce possible d'écrire une langue en trois différents caractères, si ce n'est insulter l'intelligence des imazighen et se moquer de leur langue?!! N'est-ce pas qu'une langue écrite respecte les normes exigées par sa grammaire qui dicte son orthographe selon la graphie utilisée?? N'est-ce pas que dans une langue comme le cas du français les mots tels: "sot, seau, seaux, sauts, saut...", bien qu'ils se prononcent de la même manière n'ont de sens que lorsqu'ils sont écrits en graphie latine, et ne peuvent être déchiffrés que par ceux qui ont appris le français à l'école!! Amusez-vous à retranscrire ces vocable en graphie arabe ou autre, le résultat est décidément plus que méprisant vis-à-vis du français!!

Aussi, dès le début de son intervention, Mr. Bounfour a tenu à préciser qu'il existe plusieurs langues "berbères"!! sans pour autant en préciser le nombre. Et, tel un Don Quichotte, ne trouvant pour argument que d'affirmer: "si un chleuh ne comprend pas un habitant de Jerba, c'est qu'ils ne parlent pas la même langue!! En suivant ce "raisonnement" absurde, nous en déduisons que: "lorsque un québécois ne comprend pas les propos d'un malgache c'est qu'ils ne parlent pas la même langue, quoique qu'ils utilisent le français"!!

Mr. Le professeur! une même langue est celle régie partout où elle est parlée par la même grammaire et par un fond lexical commun. Les réalisations phonétiques régionales ou continentales ne peuvent rien changer à cette définition. Ainsi, de Tiznit à Zouara, de Nador à Tamenrasset, de Ifran à Siwa en passant par Tizi Ouzou et Ghedamaes, imazighen parlent la même langue, elle s'appelle tamazight. Elle est régie partout par la même grammaire et utilise le même vocabulaire! Imazighen se comprennent plus au moins entre eux Monsieur!! Et ce n'est pas parce que vous n'appréciez que tachelhit que vous allez priver les imazighen d'Agadir ou ceux de Taroudant de communiquer avec leurs frères de Figuig ou ceux de Batna!! Les moyens de communication modernes - dont internet, radio et antennes paraboliques - ainsi que les mouvements et les rencontres entre les populations amazighes ont démontré l'inter-compréhention entre les imazighen et l'unité de la langue tamazight. Que vous l'admettiez ou pas, la langue amazighe, telle qu'elle est parlée au Rif est la même que celle parlée au Souss. Et, ne diffère de celle des Atlas que par des réalisations phonétiques instables et fragiles... caduques et négligeables lorsque tamazight sera enseignée en classe.

Au moment où le mouvement amazigh réclame l'enseignement d'une langue amazighe nationale standard, Mr. Bounfour vient contre toute attente pour dialectaliser encore plus tamazight, et semer la division entre les locuteurs d'une même et seule langue, exactement comme faisaient, sinon pire, les éthno-linguistes-colonialistes fondateurs de son école. De ce fait, notre "éminent" professeur n'a pas changé d'un iota ce que ses maîtres orientalistes ont écrit au sujet de tamazight dès les premières années de colonialisme en Afrique du Nord.

Le conférencier a tout de même proposé de "standardiser dialecte par dialecte"!! et préconise pour cela un ensemble de "démarches" illustrées par des "exemples" pour le moins que l'on puisse dire déplacés et hors sujet. Dans le cas de la terminologie par exemple, il prétend qu'il faut retenir pour nos dictionnaires les termes " Tatbirt " et " Titbirt ", malgré leur différence morphologique, car estime-t-il, les deux termes sont en usage dans la langue parlée!! Mr. Bounfour ignore peut-être que selon la règle grammaticale retenue pour la langue standard, une des deux formes citées est forcément erronée. Et, malgré son usage dans le langage parlé, la forme ne respectant pas la règle établie, ne doit en aucun cas figurer dans le dictionnaire que s'il s'agit d'un autre vocable à valeur sémantique différente. De même, dans le cas du pluriel, le conférencier ne savant vraiment pas à quel saint se vouer s'interroge: "... dans le cas du pluriel, lequel retenir, le pluriel en (awen) ou le pluriel en (en)"?!. L'on comprend alors pourquoi un agrégé en arabe ne pourra jamais être utile pour standardiser tamazight. Car, jamais il n'admettra qu'en tamazight, comme pour toute les langues respectables, c'est l'orthographe d'un substantif au singulier qui détermine le cas de son pluriel et indique la prononciation de la désinence qui lui est attribuée.

Lahbib Fouad

 

 

 

 

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