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Mrayûr  2002

(Octobre 2002)

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La fonction du mensonge historique pour le gain des élections

Par: Hassan Banhakeia (Université d’Oujda)

L'article d'Abdelkrim Ghallab (écrivain marocain) intitulé «Le parti de l'Istiqlal et la dimension amazighe», publié dans «Al-alam» numéro 19101, lundi 2 septembre 2002,  est composé sous la pression d'un «mea culpa» apocryphe. Il est né d'une angoisse sénile, pas d'un esprit autocritique, précisément dicté par un entêtement intellectuel à faire des pierres de l'or pur. L'article de Ghallab a une signification qui se fonde plus sur le signifiant que sur le signifié. Du référent, n'en parlons pas. Ce serait absurde de rechercher le sens des choses que l'auteur entend développer.

Ici, Ghallab entend défendre le mensonge, asseoir le mythique, fixer le volatile; tout un travail d'alchimie politique très ignoble. Dans son inconscient, l'écrivain dissimule une présomption de l'intellectuel «intelligent» qui s'adresse à une foule de faibles d'esprit! Il théorise, dicte, juge, calcule et analyse sans jamais se remettre en question, ni se dire pourquoi de tels mensonges à un peuple tant mystifié. Pourtant, monsieur l'écrivain, sache une chose importante: on ne peut pas «se moquer» de toute une ethnie et durant des décennies! Y a des limites à tout, de vraies limites. Chose qu'ignorent trop d'«intellocruels» marocains qui persistent encore à appeler, par mépris, les Imazighen: barbares, mutabarbares, barbariya, etc… Vous êtes l'un de ces intellocruels,  peut-être même le pionnier! Où est alors la dimension amazighe dans votre article? Dans votre parti? Cette dimension commence-t-elle par l'humiliation?

Après la lecture de cet article, maintes questions sont inévitables: Tout d'abord, ne serait-ce pas logique plutôt d'essayer de rédiger un «mea culpa» istiqlalien consciencieux envers tamazight par lequel on pourrait assainir l'histoire de demain du Maroc? Ensuite, qu'ont-ils en commun l'Istiqlal et tamazight? Enfin, pourquoi tamazight, la dimension effacée et absente du Maroc, doit-elle figurer en tant que dimension «factice» d'un parti?

Par ailleurs, s'il vous plaît, monsieur Ghallab, posez correctement (objectivement) d'une part les questions adéquates, et d'autre part le lien historique entre l'Istiqlal et tamazight. Si vous faites cela, vous n'aurez jamais le courage moral d'en parler. Vos préjudices envers l'amazighité dépassent de loin toute simple description.

Diverses annotations, sous forme d'un ensemble de rappels d'erreurs, sont à avancer:

1- Tout au début, au lieu de dire «L'institut royal de la culture amazighe», vous parlez plutôt de l' «Institut des études amazighes», institution qui, à mauvais escient, n'existe pas. Ce lapsus est intéressant à étudier; il émerge directement de votre inconscient attentif cyniquement au cheminement de l'amazighité. Tamazight est une culture, monsieur. Une culture millénaire. Une culture capable de survivre à vos guet-apens «connus» et criminels. Une culture survivant en marge des médias, des administrations et des institutions.

2- D'autres erreurs-lapsus s'enchaînent dans ce discours qui proclame haut l'unité des marocains, la force de cette histoire arabe et islamique. Hélas, vos erreurs dépassent de loin votre raisonnement léger et boitillant! A l'origine, il y a, faut le dire, le souci constant des élections à gagner jusqu'au point de devenir une hantise personnelle. Le pouvoir, le fameux pouvoir entaché... Ces fauteuils confortables, ces voyages agréables, ces réunions enchanteresses, ces intérêts infinis… Tout cela vous fait perdre la cohérence et l'enchaînement; l'erreur devient donc monumentale. Monsieur, faites vos élections, gagnez-les d'une forme ou d'une autre. L'expérience ne vous manque pas pour le renouvellement d'une telle réalisation afin d'occuper des espaces hauts sans réelle signification démocratique, mais ne profanez pas les victimes de l'histoire du Maghreb! Plutôt ne blessez pas l'amour-propre des pauvres gens, de ces aliénés! Ne piétinez pas cette culture authentique du Maroc si votre amour est vrai envers ce bout de terre!

3 - L'article n'oublie pas, par habitude,  de citer le mythe istqlalien (le dahir de 1930, le dahir fassi et colonial où les Imazighen n'ont rien à voir en tant que sujet ou objet) Où est tamazight? Où sont ces idées que vous osez narrer? Où sont les avantages offerts aux Imazighen aux dépens des arabohones? Le texte du dahir ne dit point tout cela. Cette culture ne peut pas naître d'un simple dahir (du Sultan). Cette culture existe avant le dahir de 1930! L'Istiqlal s'approprie un discours spécifique envers tamazight qu'on connaît communément sous le nom d'arabisation. En un mot, la politique des partis au Maroc s'est faite autour de l'éviction de tamazight  de toutes les institutions.

4- Vous préférez parler longuement de l'amazigh mercenaire, point de l'amazigh résistant et patriote!  Ne me dites pas que c'est une tranche de l'histoire.  Ce que vous cachez est à la fois monstrueux et fâcheux: tout le monde connaît le rôle des «montagnards» démunis, avant et après l'indépendance, de tous les droits et surchargés de devoirs et de déboires, et le rôle des citadins intelligents et «aisés»…

Vous «portez» dans votre âme assez d'insolence jusqu'à considérer l'amazighité comme un héritage qui dérive directement de la philosophie colonialiste. De ce colonialisme, ce sont bien les Imazighen qui en ont le plus souffert et à différents degrés. Le portrait que vous dressez de l'amazigh est celui d'un mercenaire sauvage, mais vous oubliez de parler de cet amazigh qui affamé, faible et sans armes, lutte, tout seul, dans les montagnes contre la colonisation et les vendus «citadins».

5- Depuis l'indépendance, le politique «marocain» accapare le droit de déformer (dévier) cette société plurielle afin d'en faire un monstre apprivoisé. Sa première et unique arme est l'hypocrisie ou l'intelligence machiavélique. Ce politique calcule alors ses intérêts dans un système caduc, créant des crises. Monsieur Ghallab, vous parlez bien (pardon, vous écrivez), vous parlez comme un maître du mensonge, vous prétendez définir le parti de l'Istiqlal, vous le faites comme un représentant total. Vous effacez des faits historiques importants; le peuple ne peut pas juger. Voilà le travail d'un intellocruel. Ghallab, il faudrait vous définir intellectuellement comme un donneur de fausses vérités. Des espoirs, n'en parlons pas.

6- A propos, vous parlez de l'Istiqlal comme si c'était une «obsession de la fin imminente», et quand vous citez tamazight vous ne le faites que pour la mépriser ou dire explicitement: la séparation ethnique ou la sécession. De pures chimères. Où est alors cet amour ombilical entre les deux parties? Laissons de côté vos spots «intellocruels» qui parlent de contact constructif, d'alliage parfait ou d'existence harmonieuse entre les Imazighen et les Arabes, en injectant une politique d'arabisation de plus en plus sauvage et douloureuse. Il suffit de penser à vos programmes politiques, à vos ministres  successivement  fuyants des différents gouvernements pour voir à quel haut degré se situe votre aversion envers tamazight. Vous n'avez rien fait pour ce corps qui respire à peine, de moins en moins fort. Et, vous prétendez faire quelque chose un jour pour ces misérables! Demain, ce jour qui ne peut remplacer aujourd'hui…

7- Quand les élections approchent, certains politiques aboient positivement; précisément, ils se métamorphosent en démocrates, gens modernes enclins au dialogue, mais au fond adhèrent ou bien au groupe des loups et des hyènes ou bien au groupe des renards et des vautours. A l'orée des élections, les partis se souviennent du «troupeau amazigh», un troupeau énorme de voix. Des votes dévots.  Ensuite, les coups d'amnésie s'ensuivent après les scrutins.  Maintenant, il faut se rendre compte d'une chose, monsieur Ghallab, c'est que les Imazighen des années 50-80 ne sont pas aussi naïfs que ceux de nos jours. Le mal est déjà fait; essayez de parler correctement!

8- L'Istiqlal n'est pas suffisamment porteur de valeurs démocratiques pour pouvoir se référer à l'amazighité en tant que marque de différence par rapport à l'arabité que vous défendez à corps et âme. L'istiqlal crée maintenant une philosophie de «dialectique entre l'imaginaire et le fictif», de manière à fonder le faux-vrai. La vérité, à cause de votre parti, n'est pas hors histoire ni sans histoire. Vous l'avez multipliée en mythes et en une illusion purement électoraliste pour ces désespérés de l'histoire. Votre pouvoir, depuis l'indépendance, a crée le modèle du politique marocain qui ne résout pas des problèmes, mais crée toutes pièces des «illusions», de «fausses réalités». Là y a risque de détruire l'identitaire. Là, y a danger de rendre bâtard l'univers marocain. Là y a surtout menace de créer le vide culturel.

Hélas, l'Istiqlal a parfait l'aliénation politique, culturelle du Maroc. A titre d'illustration, le Maghreb Arabe est, selon vous, une chose indiscutable, il faut utiliser la graphie arabe pour écrire tamazight… Les Imazighen, nous sommes réellement de ce monde, faut-il vous le rappeler. C'est vrai, aussi, nous connaissons nos ennemis (c'est-à-dire ce qui ne pensent qu'à nous anéantir), pas la peine de faire de la démagogie à deux sous. En outre, monsieur, vous êtes des professionnels de la chimère qui vous  lègue le pouvoir (social, économique, culturel). Et politique (historique). A mauvais escient, vous utilisez la religion en tant qu'argument pour expliquer l'inexplicable, pour légitimer l'illégitime.

 Votre article devient alors un discours de messe assumé par un fqih débauché. Vous parlez de religion, de langue sacrée… et dans votre tête s'enfilent des images diaboliques. Quelle honte! Par conséquent, votre discours pénible et raturé ne peut pas être consommé. C'est connu pour ses épines idéologiques, ses incohérences historiques et ses incongruités philosophiques.

9- Sous forme de jeu surréaliste, on peut supposer un Istiqlal «démocratique» tel que vous le décrivez (ou essayez de vendre) qui a, en fait, défendu l'amazighité du Maroc: tamazight culture, tamazight langue, tamazight histoire, qui peut vous croire? Surtout, vous maltraitez les concepts jusqu'au point de les utiliser à tort et à travers, avec une vision clamée «scientifique». Votre idéologie, si elle en est une, est archaïque. Laissez de côté ce discours caduc et ces idées «nostalgiques». Les Imazighen ne sont plus ces paysans, ceux à qui on demande plus de résistance claironnée par des citadins «amoureux du confort». Les Imazighen sont maintenant suffisamment mûrs pour choisir eux-mêmes pour qui ils votent, assez conscients pour qu'ils ne votent pour personne: aucun parti ne les reconnaît.

10- Vous osez parler de la graphie. No comment. Votre savoir sur la question fait de la peine. Unir par la graphie arabe les «dialectes» amazighes! Quelle honte! Je vous cite: «1-La langue amazighe (…) pour qu'elle devienne une langue (…) doit être unie  par des études scientifiques qui commencent par l'unité de la graphie arabe» Où est cette langue dont vous parlez? Ces contradictions trahissent votre pensée: tamazight n'est pas une langue. Cette langue aussi, faisant partie de la dimension effacée et absente? Où est la dimension amazighe? Où est tifinagh? Où est l'amazighité? Où va s'arrêter votre impérialisme culturel?

11- Y a une autre gaffe terrible: vous osez tracer les étapes de la promotion de tamazight. Non. Qui êtes-vous? Un seigneur. Vous ne l'êtes pas. Sachez-le! Les Imazighen ne sont point des serfs éternels… Cette supériorité vous joue de mauvais tours intellectuels; les cultures et les langues se valent pourvu qu'on leur octroie les mêmes chances d'existence.

12- Ainsi, l'Istiqlal ne peut pas être le parti de tous les citoyens, comme vous le prétendez dans votre article, c'est le parti de quelques «marocains» qui dénudent d'autres de leurs droits. Précisément, les Imazighen ne font pas parit de ces citoyens. Peut-être sont-ils des citoyens inachevés: ils ont des devoirs, mais aucun droit. Monsieur, sache encore: «la fausse bonne conscience électoraliste» tue physiquement les Imazighen de peine. Cessez le jeu intellocruel!

13- Certes, les dernières lignes de l'article montrent nettement comment votre approche s'articule sur l'exercice constant de la mystification: l'arabe (glorieux, constitutionnel et officiel) ne doit pas être «dénié» par les amazighistes. Chose déjà vue dans la pétition contre le racisme au Maroc. Donc, l'article, à vrai dire, parlait tout simplement de la langue arabe, et de la menace fictive des dérives de la langue amazighe…

14- Enfin, la parution de ce genre d'articles «infâmes» envers tamazight au moment des élections confirme un ensemble de vérités inéluctables:

a- Tamazight est une cause démocratiquement juste;

b- La faute est là, non assumée explicitement par les partis en général, et par l'Istiqlal en particulier;

c- La crise est là, présente à tous les niveaux, au cas où tamazight ne serait pas prise sérieusement en charge.

Le dépassement de cet état (de crise) est de ne pas s'engager dans ces «recettes faciles et politiques» que sont les élections. La constitution, les médias, les administrations et les institutions doivent s'ouvrir démocratiquement sur tamazight.

En conclusion, monsieur Ghallab, le poids de l'âge de vos idées vous malmène intellectuellement: vous perdez la raison en tâtonnant l'Histoire faite de plaies et des blessures. Reste à dire que le malheur des Imazighen est de subsister «muets politiquement». L'amazighité a besoin d'un parti pour la défendre. Cela est sûr, et ce qui est encore sûr: ce n'est pas l'Istiqlal qui peut le faire ou les autres partis dits démocratiques.

 

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