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بالشفاء العاجل للأستاذ إبراهيم اخياط

 

 

de l’idylle au combat

témoignage du poète et écrivain français a t h a n a s e v a n t c h e v d e t h r a c y sur le recueil de poésies «ameksa» du m’hamed alilouch,

 

«d’ailleurs, c’est dans l’éternité qu’il faut placer l’identité et dans le temps l’altérité» (plotin, sur les difficultés relatives à l’âme, ii, 15)

voilà déjà quelques mois que le jeune poète amazigh, m’hamed alilouch, m’a fait parvenir son recueil de poésies en me demandant de l’adapter en français. ses poèmes étaient rédigés en tamazight, langue des imazighen, berbères du maroc, et il les avait traduits lui-même en français. la tâche nécessitait beaucoup de temps. plongé dans la rédaction de mon futur ouvrage d’éternité en éternité, dédié à l’un des personnages les plus fascinants du xxe siècle, l’argentin che guevara, je devais faire un saut de l’amérique du sud à l’afrique du nord. c’est pourquoi j’ai longtemps hésité avant d’accepter ce travail qui exigeait de moi un effort particulièrement rude. je ne possédais de la langue berbère que quelques rudiments.

enfin, je me décidais à lire le texte. quel ne fut mon étonnement de découvrir, au début du xxie siècle, un poète dont les vers exaltaient la vie champêtre d’un peuple qui avait su garder intacts et purs, au cœur même de notre monde bouleversé par la technologie, les charmes d’une vie idyllique. la poésie de m’hamed alilouch m’a fait entendre les doux accents de la poésie bucolique. elle représente avec une naïveté touchante la vie champêtre et les mœurs innocentes des bergers d’après nature. aucune idée ni image de convention. c’est une poésie portée par le souffle de l’âme, étrangère au langage discursif qui ne fait que constater. elle chante l’homme total, teleios / τέλειος, celui qui est né à l’esprit. elle se hâte de dire les sentiments qui émeuvent en profondeur le cœur avant que leur force ne s’affaiblisse. «il faut exprimer sur-le-champ, écrivait bashô, avant que la lumière ne s’éteigne». le sens de toute grande poésie est l’élévation de l’être de l’abîme vers la cime, du pesant vers l’aérien, de l’opaque vers le translucide. sa tâche divine est d’essayer d’arrêter par les mots la fugacité du monde, l’éphémère de la vie. le chantre disparu, reste à jamais dans l’air son chant. ce genre de littérature consacré à la description et à la célébration de l’univers de la campagne par rapport à celui de la ville avait connu son apogée pendant l’antiquité. le xvie siècle avait tenté d’adopter cette poésie. il a donné à la littérature quelques chefs-d’œuvre.

la poésie pastorale remonte à des temps reculés, au poème des travaux et des jours de l’immense poète grec du viiie siècle av. j.-c., hésiode. ce genre littéraire continua de fleurir pendant plusieurs siècles, mais ne retrouva jamais la splendeur de théocrite (vers 315 av. j.-c. – 250 av. j.-c.). il y a eu sans doute, longtemps avant hésiode, des poètes qui avaient chanté la campagne, mais leurs récits de la vie pastorale, ainsi que les chansons qui les accompagnaient, où figuraient des bergers et des laboureurs, n’avaient pas constitué un genre à part. le premier berger connu dans la littérature antique fut le beau daphnis, personnage adorable, dont le nom et les louanges reviennent souvent chez les poètes de l’antiquité. dans la mythologie grecque et latine, daphnis était le fils d’hermès et d’une nymphe. selon la légende, il aurait vu le jour en sicile, dans les campagnes aux alentours du village d'assoro, situé dans la province d’enna. il avait appris de pan à chanter et à jouer de la flûte. daphnis était protégé des muses qui lui avaient inspiré l'amour de la poésie. il fut le premier, dit-on, qui excella dans la poésie pastorale. avant lui, les bergers menaient une vie sauvage; il sut les civiliser et leur apprit à respecter et à honorer les dieux; il propagea parmi eux le culte de dionysos, qu'il célébrait solennellement. remarquable par sa beauté et sa sagesse, il était chéri à la fois des dieux et des hommes. à sa mort, les nymphes le pleurèrent, pan et apollon, qui suivaient ses pas, désertèrent les campagnes, la terre elle-même devint stérile ou se couvrit de ronces et d'épines. daphnis fut admis dans l'olympe et, une fois reçu parmi les dieux, il prit sous sa protection les pasteurs et les troupeaux. la campagne changea alors d'aspect, elle se recouvrit de verdure, de fleurs et de moissons. dans les montagnes, on n'entendit plus que des cris d'allégresse et des chants joyeux. les rochers, les bosquets retentissaient de ces mots: «daphnis, oui, daphnis est un dieu».

ce dieu champêtre avait ses temples, ses autels; on lui faisait des libations comme à dionysos et à déméter. pour les habitants des campagnes, c'était presque un autre apollon.

on dit que, non content de garder ses beaux troupeaux, il allait aussi à la chasse; et tel était le charme que ce chasseur divin répandait autour de lui que, lorsqu'il mourut, ses chiens se laissèrent mourir de douleur.

théocrite porta l’art de l’idylle à son apogée. son génie poétique n’a jamais été égalé. il a représenté la vie des champs dans toute sa vérité et sa rudesse. dans ses splendides idylles qui mettent en scène des bergers, des gardiens de bœufs, de brebis, de chèvres, tout est d’une vérité, d’une réalité saisissante. ses successeurs immédiats, bion de smyrne, qui florissait vers 290 av. j.-c. et moschus, qui évolua vers 150 av. j.-c., sont loin d’avoir la rayonnante simplicité de l’art de théocrite. c’est à ce dernier que je pensais en lisant les poèmes de m’hamed alilouch. tout dans ses vers est si spontané, si vrai, si simple. aucune recherche d’effet littéraire, d’éclat, de jeux d’esprit. j’avais aussi l’impression de lire les bucoliques du grand virgile, incontestablement l’œuvre pastorale la plus célèbre de l’antiquité. comme virgile (70-19 av. j.-c.), alilouch n’avait pris de la poésie champêtre que le cadre pour y placer toutes sortes d’idées relatives à la vie politique, à ses idéaux, à ses affections.

mais je suis persuadé qu’à l’époque où m’hamed alilouch avait composé ses vers, il n’avait pas lu tous ces auteurs de premier rang, encore moins leurs imitateurs comme calpurnius siculus (milieu du ier siècle ap. j.-c.), auteur d’églogues où on relève quelques touches d’élégance, ni le poète carthaginois nemesianus (iiie siècle ap. j.-c.), ni les idylles du poète gaulois ausone (vers 309-394 ap. j.-c.)

je suppose qu’il ignorait également les restaurateurs de la pastorale latine du xvie siècle, les poètes italiens giovanni pontano (1429 – 1503), jacopo sannazaro (1455/1458 – 1530), marco girolamo vida (1485-1566).

connaissait-il l’aminte du tasse (1573); le pastor fido de guarini (1590); l’alceo d’antonio ongaro (1591); la filli di sciro de guidobaldo bonarelli (1607) ou la fidalma de son jeune frère prospero (1642) ?

avait-il lu le tendre ronsard (1524-1585) et le baroque desportes (1546-1606), tous deux auteurs d’une série d’églogues ? ou encore vauquelin de la fresnaye (1535-1607), le véritable poète pastoral de cette époque ?

il se peut qu’il ait eu connaissance d’astrée (1607-1627) d’honoré d’urfé, roman-fleuve où les bergers occupent une place privilégiée; des bergeries (1625) de racan; de silvie (1621) et de silvanire (1625) de mairet; des douces eglogues (1658) de segrais; des eglogues (1688) de fontenelle.

peut-être avait-il eu vent du célèbre ouvrage de salomon gessner (1730-1788), «le théocrite de zurich», qui a marqué la poésie française du xviiie siècle. il y a dans les poésies pastorales de m’hamed alilouch une grande tendresse rêveuse étrangère à toute préciosité, à tout maniérisme, une délicate grâce des sentiments. on pense en le lisant à berquin, léonard, florian, andré chénier, gorge sand, von kleist, goethe et son magnifique poème hermann et dorothée.

m’hamed alilouch avait peut-être lu le calendrier du berger (the shepheardes calender - 1579) de l’anglais du xvie siècle spenser; le roman de sidney, arcadia; les très émouvantes églogues sur les pêcheurs piscatory eclogues (1633) de flecher; la pastorale de milton lycidas; le cidre de john philips; les saisons (1730) de thomson; le fils du fermier (1800) de robert bloomfield; des églogues de collins; les pastorales de pope.

l’espagne et le portugal auraient pu lui fournir des exemples édifiants: la galatée (1585) de cervantes (1547-1616); la diane amoureuse (1559) de jorge de montemayor (1520-1561). il aurait pu connaître boscán (vers 1485-1542); manuel de villegas (1585-1669); les splendides romances pastorales de meléndez valdés (1754-1817); le «horace portugais» antónio ferreira (1528-1569); sá de miranda, camões, pedro de andrade caminha; le «prince de la poésie pastorale» diego bernardès; alvarez de oriente; falcão de resende; le chef-d’œuvre de francisco rodrigues lobo (1578-1622), la corte na aldeia (1619), pastorale mêlée de prose et de vers.

voici le début du magnifique poème de m’hamed alilouch, le berger:

«je suis le berger, le berger de la vie!

le berger des montagnes et des forêts,

là où les brebis que veut manger le loup sont sous la garde

de mon ami le chien et de mon bâton.

je suis le berger, le berger des brebis!

je me réveille avant le lever du soleil

pour faire sortir mes brebis, pour chercher le meilleur pâturage

qui soit sur la face de la terre.

je suis le berger, le berger des agneaux!

j’endosse mon sac, un maigre déjeuner dedans,

de l’eau dans l’outre, la flûte à mon côté.

le bouc prend la tête du troupeau, je suis derrière,

le chien marche au milieu et monte la garde,

le troupeau se répand cherchant de l’herbe.»

ou encore son poème le pur amour, qui fait frémir le cœur. comme plotin (205-270 ap. j.-c.), m’hamed alilouch sait que la belle poésie est comparable aux cordes d’une lyre qui, vibrant par sympathie, produisent une mélodie naturellement harmonieuse:

«l’amour! ah, le pur amour!

tu es la source que désire l’assoiffé,

tu es le doux parfum

que chacun veut respirer,

où tu passes, tu exhales les senteurs

qui exaltent les cœurs.

l’amour! ah, le pur amour!

je te cacherai dans les cieux

où personne, hors l’aigle noir,

ne peut se rendre.

l’amour! ah, le pur amour!

tu es un remède bien précieux.

tu apportes la santé au plus grand malade.

tu soignes mieux que le miel amer.»

outre les accents idylliques, cette poésie est aussi une redoutable arme de combat. combat pour rendre toute sa dignité, toute sa gloire passée à l’antique langue des berbères appelée tamazight. langue parlée dans la tamazgha, terme berbère qui désigne l’afrique du nord et qu’on pourrait traduire par «pays des berbères». tamazgha est un nom relativement récent; il a une connotation très liée à la renaissance et l'affirmation de l'identité amazighe. il affirme l'existence d'une nation berbère transcendant les frontières géopolitiques actuelles. le tamazight possède sa propre écriture, le tifinaghe (ou tifinagh). selon les berbères eux-mêmes, le tifinagh serait un mot composé de tifi qui signifie «trouvaille» ou «découverte» et de l'adjectif possessif nnagh qui signifie «notre». pour jean servier, le mot tifinagh renvoie à «la racine fnk rappelant l'origine phénicienne, évidente, de cet alphabet». d'après slaouti taklit, enseignante de linguistique au département de français à l'université d'alger et auteur de l'ouvrage l'alphabet latin serait-il d’origine berbère, certains signes de l’alphabet libyque remonteraient à l’époque du caspien (6800-4500 av. j.-c.). ces signes auraient été tout d'abord des symboles religieux permettant de nommer des êtres ou des objets. elle remarque que «l'écriture libyque semble être une écriture basée sur des croyances religieuses où les divinités astrales jouent un rôle primordial». «tifinagh, écrit slaouti taklit, est le pluriel de tafineq qui signifie caractère d'écriture en touarègue. par extension, tifinagh désigne toutes les gravures et les peintures aussi bien que les caractères alphabétiques. on peut même dire que c'est ce dernier sens qui prévaut en certains cas». la langue berbère appartient à la famille des langues afro-asiatiques: langues couchitiques, copte, langues sémitiques, langues tchadiques, etc. selon les linguistes, l’afro-asiatique, qui remonterait à 17 000 ans, vient de l’afrique orientale.

la langue est le trésor inaliénable d’un peuple. elle porte dans son cœur toute son histoire. elle oublie les souvenirs pour lesquels elle n’a pas d’estime et ne garde que les hauts faits. l’âme d’une langue est la poésie. et il n’y a ni passé ni présent ni futur dans l’âme, puisque tout en elle se présente simultanément. elle porte en elle le verbe divin. il y a dans le verbe primordial une vie qui ne s’écoule pas, mais reste en lui, et une autre qui acquiert une existence indépendante et qui, détachée de sa source, frappe en premier l’oreille des grands poètes. le verbe, parvenu à sa perfection, engendre la splendeur rayonnante du poème. c’est en lui que se réalise la disposition ordonnée du mouvement de l’univers. grâce à lui, il ne reste aucune part en nous qui ne nous mette en contact avec les dieux. si le verbe devient matière, forme déchue de l’énergie divine, il s’éteint.

il sera impossible de comprendre la noble lutte que mène le poète m’hamed alilouch si l’on ignore l’histoire des berbères qui s’appellent eux-mêmes imazighen, pluriel de amazigh, terme qui signifie «homme libre». les imazighen sont ces hommes libres qui occupaient depuis la nuit des temps l’immense territoire qui s’étend de l’océan atlantique à la mer rouge. les imazighen appartiennent à une même communauté linguistique, à une même civilisation. c’est un vaste ensemble d’ethnies autochtones qui ont des points communs entre elles: langues, habillements, coutumes, musiques, organisations sociales. l’antiquité pharaonique les connaissait sous les noms de lebu, tehenu, temehu, meshwesh, l’antiquité grecque, puis romaine, les nommait libyens, maures, gétules, garamantes, numides. depuis le maroc jusqu’à l’egypte (siwa), les berbères parlent le tamazight, langue déclinée en plusieurs dialectes locaux. ils sont répartis sur plus de cinq millions de kilomètres carrés. outre les pays de l’afrique du nord, les berbères vivent également au soudan, au mali, en mauritanie, au niger, au tchad, au sénégal, au nigeria, etc. en 2009, les berbères fêtent leur 2959ème année. les premières mentions des tribus berbères datent de 1000 ans environ av. j.-c.

durant l'époque pré-romaine, plusieurs états indépendants se succédèrent en afrique du nord - ceux des massaesyles, des massyles, des maures, etc. - avant que l’illustre roi massinissa n’unifie la numidie. massinissa était fils du roi (agellid en berbère) gaïa, petit-fils de zelalsan et arrière-petit-fils d’illès. il naquit vers 238 v. j.-c. dans la tribu des massyles (mis illès, littéralement «le peuple d’illès»). il mourut en janvier 148 av. j.-c. massinissa, sans l'aide romaine, œuvra durant toute son existence à la récupération des territoires annexés par carthage depuis son établissement en afrique au ix siècle av. j.-c. il contribua largement à la victoire de scipion l’africain contre les puniques de carthage lors de la fameuse bataille de zama en 202 à la tête de sa fameuse cavalerie numide.

il me plaît de donner ici la liste des rois numides:

rois de la numidie occidentale des massaesyles:

syphax (215 av. j.-c. à 220 av. j.-c.)

rois de la numidie orientale des massyles:

roi zelalsen (vers 225 av. j.-c. jusqu'à vers 215 av. j.-c.)

roi gaïa (vers 215 av. j.-c. à 207 av. j.-c.)

roi ozalces (207 à 206 av. j.-c.)

roi capusa (206 à 206 av. j.-c.)

roi lacumazes (206 à 206 av. j.-c.)

roi massinissa (206 à 202 av. j.-c.), qui unifia la numidie

rois de la numidie unifiée:

roi massinissa (202 à 148 av. j.-c.)

roi micipsa (148 à 118 av. j.-c.)

roi gulussa (148 à 145 av. j.-c.) - vice-roi, ministre de la guerre

roi mastanabal (145 à 118 av. j.-c.) - vice-roi, ministre de la justice

roi adherbal (118 à 112 av. j.-c.)

roi hiempsal ier (118 à 118 av. j.-c.)

roi jugurtha (118 à 106 av. j.-c.)

roi gauda (106 à 88 av. j.-c.)

roi hiempsal ii (88 à 60 av. j.-c.)

roi juba (60 à 46 av. j.-c.)

souveraineté saisie par la république romaine (46 a 30 av. j.-c.):

roi juba ii (30 à 23 av. j.-c.)

roi ptolémée de maurétanie (23 av. j.-c. à 40 ap. j.-c.) - fin de la dynastie numide.

rome perdit la domination de l’afrique du nord en 439 ap. j.-c. au profit de la domination partielle vandale. celle-ci dura jusqu’en 530 ap. j.-c. les vandales furent évincés par les byzantins dont la domination dura jusqu’en 647. a leur tour, les omeyyades de damas, sous le règne du calife mu’awiya (647-656), commencèrent la conquête de l’afrique du nord. ils islamisèrent ce vaste territoire et imposèrent la langue arabe comme langue officielle. la colonisation française débuta en 1830 sous charles ix (1824 - 1830). pendant des siècles, les berbères opposèrent une résistance farouche à tous leurs envahisseurs.

un des héros préférés des imazighen, devenu le symbole sacré de leur lutte contre les envahisseurs, reste jugurtha. il naquit vers 160 av. j.-c. et mourut vers 104 av. j.-c. il s'opposa héroïquement à la puissance romaine de 111 à 105 av. j.-c. jugurtha était le petit-fils du roi numide massinissa. son père, mastanabal, était frère de micipsa, tandis que sa mère était une esclave concubine. cela l’éloignait du trône. le successeur de mastanabal était son fils légitime gauda, être faible et maladif. micipsa, roi de numidie à l’époque, se débarrassa de jugurtha en l’envoyant en hispanie (actuelle espagne) combattre à côté des troupes auxiliaires romaines. jugurtha se montra particulièrement courageux et les armées numide et romaine furent victorieuses à numance. jugurtha se fit beaucoup d'amis à rome. sous la pression des romains, micipsa finit par l’adopter trois ans avant sa mort. micipsa disparu, le royaume fut partagé entre ses fils adherbal, hiempsal et son fils adoptif jugurtha.

jugurtha, qui ne voulait pas voir le royaume de numidie divisé de cette manière, n'accepta pas la décision du sénat numide. il fit assassiner hiempsal, le plus jeune des deux frères. la numidie fut alors partagée entre adherbal et jugurtha. les deux hommes continuèrent à se faire la guerre jusqu'en 113 av. j.-c., date à laquelle adherbal fut assassiné par jugurtha.

à rome, les avis concernant la numidie étaient divisés: les optimates considéraient que la numidie devait rester un royaume indépendant, alors que les populares considéraient au contraire que la numidie devait être propriété du peuple romain. jugurtha fut convoqué devant le sénat romain. c'est alors que le consul postimius albinus proposa de régler le problème en donnant la couronne à massiva, un cousin de jugurtha. ce dernier se débarrassa aussitôt de massiva et prit la fuite. les hostilités entre romains et jugurtha reprirent. postimius albinus, vaincu par jugurtha à la bataille de calama, fut remplacé par un nouveau consul, quintus caecilius metellus. metellus sortit victorieux de la confrontation, s'empara des villes de zama et thala, et obligea jugurtha à se retirer en maurétanie. en 105 av. j.-c., jugurtha fut capturé par son beau-père bocchus, roi de maurétanie, qui le livra à rome. il mourut étranglé en captivité dans la prison de tullianum vers 104 av. j.-c.

d'après les historiens du moyen âge, les berbères se divisaient en deux branches, toutes deux issues de leur ancêtre commun, amzigh, le patriarche des berbères. les deux branches botr et barnès se subdivisèrent en tribus. les grandes tribus berbères étaient les sanhaja, les houaras, les zénètes, les masmouda, les kotama, les lamtouna, les awarba, les barghawâta, les ghomara kharijites, etc.

les imazighen opposèrent une résistance héroïque aux envahisseurs arabes. au moyen âge, la plus puissante tribu berbère du maghreb central était les banou ifren (zénètes). ils servirent la grande héroïne amazighe, la reine guerrière dihya ou damya. surnommée kahina (la magicienne), elle combattit avec un acharnement extraordinaire l’expansion islamique en afrique du nord au viie siècle ap. j-c. avec kusayla, chef de la tribu des aurébas des aurès, dihya fut une des principales figures de la résistance berbère.

dihya procéda à la réunification de nombreuses tribus d'afrique du nord orientale et du sud. elle défit par deux fois la puissante armée des omeyyades grâce à l'apport des cavaliers des banou ifren. dihya régna sur toute l'ifriqiya pendant cinq années. elle fut finalement vaincue par les armées arabes. dihya fut la seule femme de l'histoire à combattre le puissant empire des califes de damas. ironie du destin, ce fut grâce aux berbères vaincus qu’ils surent s’associer que les omeyyades conquirent plus tard l’andalousie.

plusieurs dynasties berbères régnèrent pendant le moyen âge au maghreb, au soudan, en al-andalus (espagne du sud), en italie, en mauritanie, au mali, au niger, au sénégal, en egypte, au portugal, etc. le grand historien, philosophe et homme politique d’ifriqiya (afrique du nord), ibn khaldoun (tunis 1332 – le caire 1406) dresse un tableau des dynasties berbères, celles des zirides, ifren, maghraoua, almoravides, hammadides, almohades, abdalwadides, wattasides, meknassa, hafsides, zianides, sonrhaïs des dia en afrique noire, etc.

nombreux étaient les chefs arabes et perses qui avaient épousé des femmes amazighes.

de nos jours, la plupart des berbères sont sédentaires: en algérie vivent les chaouis, les kabyles, les touaregs, les mozabites, les beni snous, les chenouis, les banou ifren, les maghraoua, etc. au maroc, on trouve les rifains, les chleuhs, les beni snassen, les awarba, les zayanes, etc. on trouve des berbères dans plusieurs régions du sud de la tunisie et à djerba. en espagne, il y a les berbères des îles canaries.

outre ibn khaldoun, d’autres auteurs, comme ibn hasm, emile félix gautier, gabriel camps, rachide bellil, benabou, potiron, etc., étudièrent l’histoire des berbères.

la culture et la langue berbère ont survécu depuis les grandes conquêtes. ce fut l’administration française, à partir de 1881, qui força les berbères de l’afrique du nord à porter des patronymes arabes. jusqu'à cette époque, les imazighen avaient leurs propres noms de familles. certains avaient même conservé des noms à consonance latine.

la structure sociale des berbères est tribale. un chef est désigné pour commander la tribu. au moyen âge, plusieurs femmes ont eu le pouvoir de gouverner, comme la kahina (dihya) mentionnée plus haut. il y a eu des reines berbères comme tin hinan au hoggar, chemci, de la grande tribu des aït iraten de kabylie, fatma tazoughert des aurès, lalla fatma n’soumer qui a combattu les français. les touaregs ont un roi qui décide du sort de la tribu et qui est connu sous le nom de amenokal. la société berbère est très hiérarchisée. dans les mariages, c'est l'homme qui choisit la femme, et souvent, c'est la famille qui décide, tout dépend de la tribu. par contre, chez les touaregs, c'est la femme qui choisit son futur époux. les rites de mariages sont différents pour chaque groupe. selon la tribu, les familles sont soit patriarcales, soit matriarcales.

la musique berbère présente de nombreuses variétés de styles. les instruments utilisés sont le grand tambourin rustique appelé bendir, le gambri (instrument à cordes) ou encore la flûte. ils accompagnent les chants, les danses et la riche poésie berbère.

les rites de fantasia sont purement amazighs. dès l’antiquité, les berbères étaient connus pour leur excellente cavalerie.

saurais-je dire la pléiade d’hommes illustres qu’ils donnèrent à l’humanité. je ne citerai que quelques noms universellement connus: l’éminent auteur latin apulée (vers 123/125 – vers 170 ap. j.-c.); l’empereur romain septime sévère (lucius septimius severus pertinax - 11 avril 146 - 4 février 211), qui régna de 193 à 211, un des plus grands bâtisseurs de tous les temps; augustin d’hippone (aurelius augustinus), ou saint augustin, né à thagaste (actuelle souk-ahras, algérie) le 13 novembre 354, mort le 28 août 430 à hippone (actuelle annaba, algérie). d’origine berbère, il est un des plus grands philosophes et théologiens chrétiens, évêque d’hippone et écrivain romain. saint augustin figure parmi les principaux pères de l’eglise latine. il est l’un des 33 docteurs de l’eglise chrétienne universelle. les catholiques célèbrent sa fête le 28 août, anniversaire de sa mort. sa tombe se trouve à pavie (italie). il est considéré comme le personnage le plus important après saint paul dans l’établissement et le développement du christianisme occidental.

je voudrais citer deux autres noms qui me sont particulièrement chers: le premier, celui de saint cyprien, de son vrai nom thascius caecilius cyprianus, né vers 200 et décédé en martyr le 14 septembre 258, évêque de carthage, père et docteur de l’eglise; le second, celui de quintus septimus florens tertullianus, dit tertullien, né entre 150 et 160 à carthage et décédé vers 230-240 ap. j.-c. dans sa ville natale. cet immense écrivain de langue latine était issu d’une famille berbère. tertullien se convertit au christianisme à la fin du iie siècle et devient vite la figure emblématique de la communauté chrétienne de carthage. théologien, père de l’eglise, auteur prolifique, catéchète (celui qui fait la catéchèse, c’est-à-dire le service de formation à la foi chrétienne). son influence dans l'occident chrétien fut colossale. il est pourtant un personnage très controversé, car, d'une part, il lutta activement contre les cultes païens et est considéré comme le plus grand théologien chrétien de son temps (on lui doit le terme de trinité) et, d'autre part, il rejoint les hérétiques montanistes à la fin de sa vie. le montanisme est un mouvement chrétien hétérodoxe du iie siècle fondé par le prophète montanus en phrygie, région de turquie actuelle.

la poésie de m’hamed alilouch garde une profonde nostalgie de la gloire ternie des berbères. comme beaucoup de jeunes à travers toute la tamazgha qui ont pris conscience de leur amazighité, il combat l’arabisation forcée des tribus amazighes. non, il n’est pas, il ne veut pas être arabe. comme 95% des marocains, m’hamed est berbère. et il rêve de voir sa langue maternelle, le tamazight, retrouver la place qu’elle mérite. cette magnifique langue berbère, fruit d’hommes entiers, rude comme leur vie et douce comme la caresse au printemps d’une goutte d’eau sur les premières feuilles des acacias. langue aux mots porteurs en leur cœur de l’antique résonance des siècles, mots où on sent la violente vigueur du labeur qui a su faire de chaque petit champ pierreux un jardin de grasse verdure. mots qui aident l’homme à retrouver, dans son sommeil mérité, dans les plus reculés secrets de la nuit, la lumière d’une nouvelle espérance. c’est comme si les berbères avaient suspendu leur âme aux sonorités exquises des syllabes de leur langue.

m’hamed alilouch se dresse violemment contre les berbères renégats. qui sont-ils ? tous ceux qui ont oublié la parole qu’ils ont tété avec le lait de leur mère, tous ceux qui ont tourné le dos à la civilisation berbère et s’extasient devant une culture arabe qui leur est profondément, je dirais plus, viscéralement étrangère. ce rejet comprend également la civilisation occidentale qui a tout fait pour détruire l’identité amazighe. alilouch dit non à un monde occidental qui ne croit plus en rien, pour qui le seul dieu est l’argent, monde voué à l’éclatement, à la dissémination, au nihilisme, monde incapable de voir la magnificence de la beauté répandue dans la nature. m’hamed alilouch, resté ami de la vie simple et laborieuse, a compris avec tout son être que l’âme humaine est de nature intelligible et de rang divin:

«puni sera celui qui se vêt des habits des autres,

celui qui calque une allure étrangère,

celui qui, indifférent, ronfle du fond de son sommeil,

mais aussi celui qui, rêvant de choses lointaines, oublie la beauté de sa patrie!

le châtiment! ah, le châtiment!

chacun recevra le salaire de ses actes!

chacun de nous est le fils de ses ancêtres,

ils t’ont choisi, ils t’ont fait connaître la vie,

ils t’ont transmis leur langue, ils t’ont nourri de leurs belles paroles,

pour que tu remues les cœurs endormis,

garde-toi de trahir leur antique volonté!»

telle est la poésie de m’hamed alilouch. elle aime, elle fustige, elle rêve d’un monde où le berbère retrouvera toute sa dignité. il sait que les martyrs sont toujours infiniment plus grands que les bourreaux et que c’est leur silence qui dit leur splendeur et l’infinie innocence de leurs yeux. les bourreaux ne pourront jamais comprendre la langue de toute cette lumière qui s’écoule des visages des morts justes.

toute grande poésie exige du poète une extase, une simplification, un don de soi, une méditation des faits de l’histoire et des phénomènes de la nature. il n’y a pas d’unité historique si la continuité et la fidélité des générations qui se suivent ne mènent pas à une telle unité. la tâche du poète est d’éviter l’épistrophé/’επιστοφή, cette conversion de l’âme qui fait qu’elle se détourne de dieu et de l’univers pour se recroqueviller sur elle-même. la poésie est comme une lettre amoureuse couchée sur un papier. elle est dans la beauté des lettres élégantes, dans la douceur de la page, dans le parfum et le doux bruit que celle-ci émet. elle est enfermée dans la chaleur du pays secret du cœur, seule mesure de la civilité du monde. elle est comme la tendre brise de bonheur qui se lève et court dans l’air frais, comme l’haleine suave venue de la douce contrée de l’âme. la poésie est le meilleur moyen d’exalter la liberté. elle est le lieu éthique de la transcendance. elle est le cœur où afflue tout le sang du monde. elle surmonte l’irréversibilité et le côté non négociable de la mort. la vraie poésie ne connaît ni altération ni dépérissement. elle est comme l’âme qui reste tout à fait entière avec elle-même. elle est illimitée parce que sa puissance est illimitée.

tout vrai poète doit avoir en mémoire les paroles du grand plotin avant de mourir:

«je m’efforce de faire remonter ce qu’il y a de divin en moi à ce qu’il y a de divin dans l’univers».

athanase vantchev de thracy

paris, janvier 2009

http://www.athanase.org

 

 

 

 

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